Tom Loonen et Jan Saalfrank
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L’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) a mis à jour ses orientations sur la définition de ce qui doit être considéré comme un conseil en investissement. Cela peut signifier que certains gestionnaires doivent être plus prudents lorsqu’ils communiquent des informations sur l’investissement à leurs clients.

Le 11 juillet 2023, l’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) a publié une mise à jour des orientations concernant la définition du concept de « conseil en investissement ». Cette mise à jour a été effectuée par le biais d’une instruction de supervision, mettant à jour les précédentes Q&A du CESR (le prédécesseur de l’AEMF) afin de prendre en compte l’évolution des business models des entreprises et des nouvelles technologies qu’elles utilisent (réseaux sociaux, applications mobiles), lesquelles entraînent un besoin croissant d’une explication actualisée des règles existantes. Cette instruction de supervision n’est pas soumise à l’obligation de « se conformer ou s’expliquer » par les autorités de contrôle et n’est pas contraignante. Elle vise à fournir une orientation plus précise sur la manière d’interpréter le concept de « conseil en investissement ». 

Les principaux thèmes abordés dans l’instruction de supervision sont les suivants :

  • La prestation de recommandations personnelles et la question de savoir si d’autres formes d’information peuvent constituer un conseil en investissement ;
    Des orientations sur les cas où les recommandations sont considérées comme fondées sur une perception de la situation d’une personne ;
    Les questions relatives à la définition des recommandations personnalisées ; 
    Les problèmes relatifs à la manière de communiquer, y compris l’utilisation des réseaux sociaux.
     

Statut de l’instruction de supervision

En principe, l’instruction de supervision est uniquement destinée aux autorités de surveillance, mais l’AEMF indique qu’elle est également utile pour les institutions financières. Tous les gestionnaires de fonds agréés en vertu de l’AIFMD ne disposent pas nécessairement de la licence MiFID II complémentaire (services auxiliaires) et l’instruction de supervision devrait donc être d’un grand intérêt pour eux, en particulier afin d’éviter de fournir par inadvertance des conseils en investissement (réglementé). 
 

Le conseil en investissement en tant que service réglementé 

Le conseil en investissement tel que défini par l’article 4, paragraphe 1, point 4, de la Directive MiFID II (Directive 2014/65) est « la fourniture de recommandations personnelles à un client, soit à sa demande, soit à l’initiative de l’entreprise d’investissement, concernant une ou plusieurs transactions portant sur des instruments financiers ». La recommandation doit être présentée comme adaptée à cette personne ou, à défaut, être fondée sur l’examen de sa situation. Le conseil en investissement nécessite une autorisation, à moins qu’une exemption ne puisse être invoquée. 
Une entreprise (et donc aussi un gestionnaire de FIA) qui n’a pas l’intention de fournir des conseils en investissement doit veiller à ce que les services à fournir soient clairement compris. Cela doit se refléter dans la formation du personnel, l’information fournie aux clients ainsi que les systèmes et contrôles internes. Le simple fait de qualifier un service de « non conseillé » ne suffit pas à garantir légalement qu’aucun conseil en investissement n’est fourni par une entreprise. Il est souligné qu’il s’agit d’un aspect difficile à contrôler de manière claire. En particulier dans les situations en face à face avec les clients, le personnel peut involontairement fournir un conseil personnel et adapté à ce client spécifique. 
 

Quel type d’information constitue une « recommandation personnelle » ?

Une « recommandation » comporte toujours un élément de suggestion implicite ou explicite de la part du conseiller. L’« information » se réfère à des énonciations de faits ou de chiffres, en termes généraux et contenant des informations objectives. L’« information » ne comporte ni jugement ni suggestion spécifiques à l’intention d’un investisseur. 
Même si la délivrance d’informations n’a pas pour objectif pas de constituer une recommandation, le simple fait de les fournir peut très bien être considéré comme une recommandation et il convient d’évaluer la situation afin d’éviter toute tromperie. L’instruction de supervision cite l’exemple d’une entreprise qui accorde une attention particulière aux avantages d’un produit par rapport à d’autres vis-à-vis d’un client, de sorte que l’information « tendrait à influencer la décision » du client de choisir tel produit d’investissement plutôt qu’un autre. Cela peut être qualifié de recommandation personnelle et donc, de conseil en investissement. 
En outre, l’AEMF énumère des situations spécifiques dans lesquelles une recommandation constitue effectivement un conseil en investissement, telles que :
 

  • des informations générales concernant les objectifs du client, dans lesquelles il est indiqué que ceux-ci peuvent être atteints par le biais d’un instrument financier autre que celui choisi par le client ;
  • l’information communiquée à un client stipulant qu’un instrument financier particulier ne répond plus à ses objectifs d’investissement ;
  • un message, envoyé à un client, concernant un instrument financier particulier acheté par des investisseurs d’une manière générale, alors que ces investisseurs présentent des caractéristiques et besoins similaires à ceux du client auquel le message est adressé ;
  • les recommandations portant sur des instruments financiers effectuées par l’intermédiaire de sites internet, d’applications d’investissement ou de réseaux sociaux (y compris par des « influenceurs ») peuvent, dans certaines circonstances, être considérées comme une recommandation personnelle et, par conséquent, une pas être émises à l’intention du public en général.

À l’inverse, les conseils à caractère général ne sont pas considérés comme des conseils en investissement. Entrent notamment dans cette catégorie les conseils d’ordre général sur les classes d’actifs ou ceux sur des investissements devant être réalisés dans certaines zones géographiques. Il convient de noter que même dans le cas d’un conseil à caractère général relatif à l’adéquation d’un instrument financier particulier est fourni, lorsque ce conseil n’est en réalité pas adapté au client spécifique ou n’est pas fondé sur la situation particulière de ce client, l’entreprise peut être en infraction avec l’article 24, paragraphes 1 et 3, de la Directive MiFID II (principes généraux et information aux clients). 
Bien que l’instruction de supervision présente encore d’autres exemples de conseils en investissement, le message général de cet article est que les gestionnaires de fonds qui ne disposent pas de complément MiFID II à leur licence AIFMD doivent faire preuve de prudence lorsqu’ils communiquent des informations sur l’investissement à leurs clients. Nous recommandons à ces gestionnaires de prendre connaissance du contenu de l’instruction de supervision et de demander un avis juridique concernant son interprétation. 

Tom Loonen est professeur de droit financier à l’Université d’Amsterdam et special counsel chez Pinsent Masons Pays-Bas. Dr. Jan Saalfrank est associé spécialisé dans les fonds d’investissement chez Pinsent Masons Luxembourg. Lous Vervuurt est avocate chez Pinsent Masons Pays-Bas et conseille les clients en matière de réglementation financière et relative à la lutte contre le blanchiment d’argent. Le cabinet d’avocats est un partenaire expert en connaissances d’Investment Officer.

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