À l’aune de leur performance en dollar, les fonds ciblant les obligations des marchés émergents ont terminé dans le rouge pour le troisième trimestre de suite. En euro toutefois, ils ont légèrement progressé.
Les obligations des marchés émergents libellées en monnaie locale ont progressé de 1,7 % au cours du troisième trimestre 2022, après avoir cédé 2,8 % au deuxième trimestre et 4,4 % au premier. Entre début janvier et fin septembre 2022, l’indice JPMorgan GBI-EM Global Diversified perdait 5,5 %, devançant largement les obligations des marchés émergents libellées en monnaie forte, en recul de 11,7 % à l’aune du JPMorgan EMBI Global Diversified. Cette performance s’explique notamment par la stabilité des monnaies locales dans des pays où les banques centrales avaient déjà mené plusieurs hausses de taux avant même l’intervention de la Fed.
Des problèmes
Les marchés émergents forment un groupe hétérogène : un certain nombre d’économies sont de plus en plus sous pression du fait de la hausse des cours de l’énergie et des denrées alimentaires, ainsi que du regain de vigueur du dollar américain.
Le Sri Lanka s’est rapidement retrouvé dans la tourmente et l’ancien président Gotabaya Rajapaksa a dû fuir son pays. Il a présenté sa démission depuis Singapour, alors même que la foule prenait d’assaut son palais à Colombo. La violence a depuis cessé, mais les problèmes économiques sont loin d’être résolus. La crise sanitaire a entraîné des souffrances humaines, mais aussi un endettement accru et moins d’activité économique pour réduire la dette. S’ajoutent aujourd’hui au tableau l’inflation élevée et la crainte d’une récession planétaire.
Le rôle de la Chine
Mais la crise économique ne se limite pas au Sri Lanka. La Chine, qui octroie des prêts à de nombreux pays en voie de développement, et notamment au Sri Lanka et au Pakistan, est pour la première fois confrontée à une crise de la dette étrangère. De nombreux impayés ont émaillé la nouvelle route de la soie (Belt and Road Initiative), car un grand nombre de projets financés par la Chine ne sont pas assez rentables et les prêts pour les infrastructures augmentent la pression financière sur des gouvernements déjà fragiles. Et lorsque l’endettement devient insoutenable, la Chine se voit soudain contrainte d’émettre de nouveaux prêts pour éviter que la situation ne devienne purement et simplement ingérable.
Plus forts
Lors des crises précédentes, l’appréciation du dollar avait causé des problèmes, car les pays émergents empruntent souvent en dollars ou dans d’autres devises. Mais cette fois-ci, la situation est différente. Ainsi, l’Inde et le Brésil empruntent désormais surtout en monnaie locale et une grande partie de leur dette est détenue par des investisseurs locaux, si bien qu’ils sont moins sensibles aux variations de cours de change.
Fin septembre, la banque centrale brésilienne a maintenu son taux directeur à 13,75 %. Elle avait été l’une des premières à donner des tours de vis, dès le premier trimestre 2021, et son offensive commence à porter ses fruits. Le réal brésilien s’est apprécié de 5,6 % par rapport au dollar cette année (et de 21,3 % face à l’euro), tandis que le MSCI Brazil gagnait pas moins de 39,7 % en euro et que les statistiques économiques commençaient à s’améliorer. Le taux à dix ans vient de repasser sous les 12 %, soit moins que les 13,7 % du mois de juillet. (Chiffres au mardi 18 octobre)
Le top 5
Pour le top 5 de cette semaine, nous passons en revue les fonds investissant dans des obligations des marchés émergents en devise locale et identifions les meilleures performances sur les neuf premiers mois de 2022.
La première place du podium est occupée par un fonds de Rubrics. Le Rubrics Emerging Markets Fixed Income UCITS vise un rendement corrigé du risque maximal, et investit pour cela dans des emprunts d’État et d’entreprises des marchés émergents. Il s’agit d’un fonds de rendement total, qui met fortement l’accent sur la protection du capital. Les gérants investissent dans de la dette souveraine et supranationale des marchés émergents du monde entier, très liquide et transparente, libellée en monnaie forte ou locale.
La deuxième place revient à un fonds de NNIP, le NN (L) Emerging Market Debt (Local Currency), qui a progressé de 4,6 % depuis le début de l’année (+2,6 % au premier semestre). L’échéance résiduelle des obligations en portefeuille est souvent inférieure à un an. Ce positionnement a porté la stratégie sur les neuf premiers mois de 2022. Les données de Morningstar montrent que fin juillet, pas moins de 89 % du portefeuille était investi dans des obligations affichant une échéance inférieure à un an ; pour l’ensemble de la catégorie Morningstar des marchés émergents en devise locale, le chiffre était de 6,9 %.
Le fonds est géré par Marcin Adamczyk et Jaco Rouw. Le premier est responsable de la dette émergente chez le gestionnaire basé à La Haye, qui a perdu, fin 2019, Marcelo Assalin, Marco Ruijer et neuf autres membres de l’équipe en charge de l’univers, partis chez le concurrent américain William Blair Investment Management.
La stratégie investit principalement dans des emprunts d’État d’Amérique latine, d’Asie et d’Europe centrale et de l’Est. Le fonds achète également des titres de dette onshore chinois via le programme Bond Connect, qui permet aux investisseurs étrangers de se positionner sur le marché obligataire chinois local.
BE