Des taux d’intérêt et d’inflation réels élevés et volatils, une corrélation positive entre les deux primes de risque, la stagflation et une politique monétaire procyclique ont été historiquement les principaux facteurs déclenchant une corrélation positive entre les actions et les obligations. Si l’on compare avec la période 2000-2020, certains de ces facteurs sont aujourd’hui évidents.
À tout le moins, la corrélation négative à long terme devrait être remise en question et les investisseurs devraient soumettre leurs portefeuilles à des tests de résistance pour tenir compte des périodes de corrélation positive.
Les investisseurs se sont habitués à une corrélation négative
La corrélation sur 5 ans entre les grandes actions américaines et les bons du Trésor à 10 ans depuis 2000 est de -0,35. Cette corrélation négative est bénéfique pour les investisseurs, car elle réduit la volatilité d’un portefeuille mixte et holistique et limite les pertes. Bien sûr, nous avons également connu des fluctuations à court terme au cours des deux dernières décennies, avec des corrélations parfois moins négatives. Toutefois, depuis l’année dernière, nous constatons une corrélation positive plus forte entre les actions et les obligations. La question clé est de savoir s’il s’agit d’une situation exceptionnelle et si nous revenons à l’ancien régime. Peut-être que l’évolution des conditions économiques et (géo)politiques et la nouvelle dynamique de la politique monétaire indiquent un changement de régime. Rappelons que nous avons enregistré une corrélation positive dans la plupart des périodes de 5 ans entre 1931-1955 et 1970-1999. Pour répondre à cette question, nous devons identifier les facteurs déterminants.
Quels sont les facteurs qui déterminent la corrélation entre les actions et les obligations ?
Nous savons que les prix des actions et des obligations reflètent la valeur actualisée des flux de trésorerie futurs. Le taux d’actualisation utilisé à cette fin est la somme du taux d’intérêt réel sans risque, de l’inflation et d’une prime de risque destinée à compenser l’incertitude des flux de trésorerie futurs. Dans le cas des actions, un taux de croissance des bénéfices ou des dividendes des entreprises est ajouté. Ainsi, les actions et les obligations ont non seulement des facteurs communs, mais aussi des facteurs uniques qui orientent leurs rendements dans la même direction ou qui leur permettent de se dissocier.
Taux d’intérêt réels sans risque
Une hausse des taux d’intérêt à court terme affecte les actions et les obligations dans la même direction. Pour les obligations, l’impact est uniformément négatif. Pour les actions, l’impact négatif dépend de l’appétit du marché pour le risque. Si l’incertitude économique s’accroît, la prime de risque augmente en même temps que les taux d’intérêt. En revanche, si les perspectives sont favorables, l’augmentation des taux d’intérêt peut être plus que compensée par une baisse de la prime de risque, ce qui se traduit par un effet net positif pour les actions. Il est vrai que des taux d’intérêt directeurs plus élevés (et plus volatils) réduisent l’appétit des investisseurs pour le risque, ce qui est négatif tant pour les actions que pour les obligations.
L’inflation
Les obligations sont évidemment affectées négativement par la hausse de l’inflation, car les flux de trésorerie futurs (fixes) perdent de leur valeur. Pour les actions, l’effet dépend du pouvoir de fixation des prix et des marges bénéficiaires des entreprises. L’inflation augmente de toute façon les bénéfices nominaux (chiffre d’affaires = prix x volume) et stimule donc les actions. Tant que les coûts des entreprises augmentent moins rapidement que les ventes et que le volume n’est pas trop affecté (les marges bénéficiaires restent stables ou augmentent), l’inflation entraîne une hausse des bénéfices nominaux. L’effet net de l’augmentation des bénéfices nominaux, etc. et d’un taux d’actualisation plus élevé, etc. détermine la réaction des actions dans un environnement d’inflation plus élevée. Les recherches montrent que les taux d’intérêt plus élevés dominent lorsque l’inflation annuelle moyenne dépasse 3 % sur des périodes de 5 ans.
Prime de risque
Étant donné que les actions dépendent fortement du cycle économique et que leurs rendements sont variables et incertains, les investisseurs exigent une prime de risque pour compenser cette incertitude. Les obligations, quant à elles, ont un coupon et un rendement (certains) fixes, mais comportent d’autant plus de risques que leur durée est longue. En d’autres termes, une courbe de rendement ascendante représente la prime de risque pour les obligations. Au cours des dernières décennies, la corrélation entre les deux primes de risque a été le plus souvent négative, car les obligations sont considérées comme une valeur refuge en période de volatilité et d’incertitude et comme un élément de diversification dans un portefeuille. Ainsi, plus le marché est incertain, plus la prime de risque des actions est élevée et plus celle des obligations est faible. (scénario «risk-off»)
Dans un scénario inverse, la prime des obligations augmente par rapport à celle des actions. Un scénario inhabituel est cependant celui où l’appétit pour le risque diminue parce que les gens craignent la stagflation. C’est ce qui s’est produit notamment dans les années 1970, avec pour conséquence une corrélation positive entre les deux primes de risque.
Plusieurs scénarios sont possibles dans les années à venir, qui affecteront ces facteurs déterminants. Le lecteur attentif devra décider comment chacun de ces facteurs évoluera structurellement.
Stephan Desplancke est le fondateur de Toward et l’expert en connaissances de l’Investment Officer.