Les gérants de fonds axés sur les marchés frontières rongent leur frein depuis janvier : la pandémie a une nouvelle fois amené ces investisseurs aventuriers à reporter leurs voyages. Mais ils se consolent en prenant acte des gains enregistrés en 2021.
Selon Thomas De Fauw, analyste chez Morningstar, l’indice global MSCI Frontier Markets affiche un rendement de 9,5 % sur les quatre derniers mois et de 26,9 % sur les douze mois écoulés. Malgré tout, le premier trimestre de l’année a été marqué par une décollecte de quelque 100 millions d’euros.
À titre de comparaison, l’indice MSCI Emerging Markets, qui reflète les performances des économies émergentes, a gagné respectivement 6,6 % et 35,3 % sur les mêmes périodes. La catégorie des actions internationales des marchés émergents a affiché un afflux de 4,7 milliards d’euros sur les trois premiers mois de 2021.
Le MSCI Frontier Markets s’est distingué par un rendement annuel de 6,4 % sur la décennie écoulée, soit légèrement mieux que les 5,8 % de l’indice MSCI Emerging Markets en euros.
Comme toujours, les disparités géographiques sont importantes. Le Kazakhstan (+83,5 %), le Vietnam (+48,1 %) et la Roumanie (+42,1 %) ont fait bien mieux que le Maroc (+27,3 %) et le Kenya (+18,9 %) sur les douze mois écoulés. Ces cinq pays affichent actuellement les plus fortes pondérations du MSCI Frontier Markets.
Koweït
La situation du Koweït interpelle : plus importante pondération de l’indice lors de notre dernier top 5 consacré au sujet, en septembre 2020, il a désormais disparu de ce dernier. Il y a toutefois une explication : le pays pétrolier est désormais considéré comme un marché émergent par le promoteur de l’indice.
La sortie d’un pays de l’indice, comme cela a été le cas du Pakistan il y a quelques années, peut avoir des répercussions sur de nombreux portefeuilles axés sur les marchés frontières.
C’est souvent le cas pour les fonds passifs, car les investisseurs actifs disposent généralement d’un mandat plus large, qui leur permet de continuer à investir dans quelques marchés émergents récents, ou du moins, d’éviter de devoir vendre immédiatement des positions dans un tel cas de figure.
Mais alors que de plus en plus de marchés frontières accèdent au rang supérieur et que les gérants de fonds puisent hors de l’indice de référence, la pertinence de la catégorie pourrait être remise en cause. La catégorie Morningstar des actions internationales des marchés frontières représentait fin mars quelque 2,2 milliards d’euros d’actifs, soit une baisse de plus de 60 % par rapport aux 5,7 milliards d’euros de fin mars 2018.
Certains investisseurs choisissent l’approche inverse et ciblent les bonnes affaires parmi les pays auxquels MSCI n’a pas accordé de statut (Mongolie, Iran…), mais ce n’est pas sans risque.
Selon Thomas De Fauw, « il s’agit ici d’exceptions, des gérants qui ont des clients patients, car sur les marchés frontières, ce sont généralement les individus fortunés locaux qui donnent le ton ; trouver une contrepartie est souvent difficile. »
Le top 5 de cette semaine, qui porte sur la catégorie Morningstar des fonds d’actions des marchés frontières, tient compte des performances des quatre premiers mois de l’année 2021.
T. Rowe Price
La première place du classement revient au fonds T. Rowe Price Frontier Markets Equity, noté Neutral par les analystes de Morningstar, prudents depuis l’annonce du départ du gérant, Oliver Bell, au 1er janvier 2021. « Oliver pilotait la stratégie depuis le lancement du fonds en 2014 ; il est remplacé par Johannes Loefstrand, co-gérant du fonds depuis le 1er août 2020. Son expérience limitée de la gestion du portefeuille nous invite à la vigilance, malgré le soutien de cinq analystes. »
Le fonds a pour objectif d’investir dans des entreprises offrant des perspectives de croissance durables. Il adopte surtout une approche ascendante mais tient compte des évolutions macroéconomiques.
Le portefeuille est fortement exposé au secteur financier, ce qui n’est pas inhabituel dans la catégorie, selon Thomas De Fauw. « Fin mars 2021, l’exposition à la finance était de 35 %, soit cinq points de pourcentage de plus que la moyenne de la catégorie.
Le portefeuille est également très concentré, avec près de la moitié de l’actif investi dans les dix principales positions. Cette année, le fonds a notamment profité de la belle tenue de FPT Corp et de Mobile World, deux actions vietnamiennes en portefeuille depuis 2017 et 2015, respectivement, ainsi que de celle de Safaricom, opérateur mobile kenyan. »