Pour les investisseurs, 2022 a été une année bien noire. Un cocktail d’évolutions préoccupantes, et notamment le pic atteint par l’inflation, le resserrement des politiques monétaires, les implications économiques de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, une crise énergétique et les craintes de récession, a résulté en une année historiquement mauvaise, avec des pertes énormes pour les investisseurs en actions et en obligations.
Dans ce contexte, ces derniers ont retiré au total 130 milliards d’euros d’actifs des fonds d’investissement européens (à gestion active et passive), si bien que l’année restera la pire depuis 2008 pour le secteur. La plus forte décollecte (84 milliards d’euros) a été enregistrée par les fonds obligataires, qui ont connu une croissance organique négative de plus de 2 %. Les fonds en actions se sont contractés de 0,44 % (-28 milliards d’euros) sous l’effet des sorties enregistrées.
Ce sont surtout les fonds à gestion active qui ont souffert ces douze derniers mois. En effet, les investisseurs ont continué à placer leur fortune dans les fonds indiciels et des ETF. Les fonds passifs ont ainsi accueilli 55 milliards d’euros d’argent frais, tandis que les stratégies obligataires voyaient affluer près de 63 milliards d’euros. À l’inverse, les fonds d’actions à gestion active ont subi une décollecte nette de 83 milliards d’euros, les fonds obligataires de 147 milliards d’euros. La décollecte totale pour les fonds à gestion active a atteint 238 milliards d’euros – un chiffre sans égal, si l’on excepte l’année de crise 2008, où les investisseurs avaient retiré 387 milliards d’euros. La collecte annuelle totale pour les fonds passifs (107 milliards d’euros) a été la plus faible depuis 2016. Au vu de ces mouvements inverses, la part de marché des fonds passifs en Europe atteint 23,79 %, contre 22,04 % en 2021. Au niveau mondial, 38 % des actifs sont désormais gérés par le biais de produits indiciels.
La série de relèvement des taux des banques centrales a mis fin à la popularité des actions de croissance, ce qui se reflète aussi dans les flux de fonds de la catégorie Morningstar des actions internationales de grandes capitalisations axées sur la croissance, lanterne rouge, avec une décollecte de plus de 24 milliards d’euros. C’est NN IP qui a connu la sortie de fonds la plus importante de la catégorie (3,6 milliards d’euros). Cette décollecte est surtout imputable au fonds NN Duurzaam Aandelenfonds, qui est devenu une solution de mandat. Parmi les perdants de la catégorie figurent quelques grands noms axés sur la croissance, et notamment Fundsmith, Morgan Stanley et Baillie Gifford, mais aussi Robeco, qui a enregistré plus de deux milliards d’euros de sorties sur le Robeco Global Consumer Trends.
Sur le front obligataire, les stratégies investissant dans des obligations à échéance courte ont connu de fortes décollectes. L’Eurizon Bond Short Term EUR T1 a ainsi affiché une décollecte de 62 %, ce qui représente près de 5,5 milliards d’euros. Les stratégies de haut rendement américain ont aussi été peu prisées. En 2022, elles ont perdu 12 milliards d’euros, soit environ un cinquième de leur actif sous gestion. Les stratégies de JPMorgan, Pimco et AXA, notamment, ont été parmi les plus touchées de la catégorie.
Le bilan des sociétés de gestion montre qu’en 2022, c’est Pimco qui a connu les plus fortes décollectes. Sur les douze mois écoulés, le spécialiste obligataire a vu s’envoler 21,7 milliards d’euros d’investissements ; il connaît ainsi sa plus forte décollecte en 15 ans. Les sorties ont surtout concerné les fonds obligataires flexibles. En termes de fonds individuels, le Pimco GIS Income, le Pimco GIS Diversified Income et le Pimco GIS Global Investment Grade Credit ont été les plus touchés, perdant entre 2,6 et 4,7 milliards d’euros.
Chez Insight Investment Management, une filiale de BNY Mellon, la décollecte a atteint 17 milliards d’euros en 2022 ; elle a notamment concerné les fonds de liquidités et les stratégies de titres adossés à des actifs.
BlackRock a pour sa part connu une décollecte totale de 16,2 milliards d’euros sur la totalité des classes d’actifs. Les fonds d’actions ont perdu davantage de fonds (10,7 milliards d’euros) que les fonds obligataires (8 milliards d’euros). C’est la première fois depuis quinze ans que la société enregistre une décollecte annuelle. Fait notable, les sorties ont surtout concerné les fonds indiciels de la maison, tandis que la branche ETF commercialisée sous le label iShares affichait une collecte de 43 milliards d’euros. Les investisseurs qui se sont défaits de leurs fonds indiciels ont surtout cédé les participations dans les trackers ciblant les actions japonaises, britanniques et des marchés émergents.
Name |
Estimated Net Flow (€Mil) 1-Yr |
PIMCO |
(21,755) |
Insight Investment Management |
(17,000) |
BlackRock |
(16,260) |
Eurizon |
(12,594) |
Credit Suisse |
(12,590) |