Dans cet article, nos chroniqueurs et experts exposent les défis qu’ils attendent pour cette nouvelle année au sein de leur domaine d’expertise et présentent, ce faisant, les thèmes sur lesquels ils écriront en 2024.
Au nom de la rédaction et de tous nos chroniqueurs et collaborateurs, nous vous souhaitons d’ores et déjà une bonne année 2024 et une bonne santé !
Han Dieperink, domaine d’intérêt : tendances et constitution de portefeuille
« Le scénario de base pour l’an prochain est celui d’un atterrissage en douceur. L’augmentation des taux d’intérêt pourrait éventuellement entraîner une récession ou une crise du système financier, ce qui ouvrirait grand le robinet monétaire et augmenterait les chances que survienne un autre scénario : celui d’un emballement sur le marché boursier. Pour le long terme également, cette année sera vraisemblablement le meilleur moment du siècle pour acheter. Des taux d’intérêt plus élevés, la multiplication rapide des possibilités d’investissement et des frais réduits offrent aux portefeuilles neutres le pronostic de rendement le plus élevé des cent dernières années. »
« Les taux d’intérêt vont probablement poursuivre leur baisse l’an prochain. À plus long terme, ils remonteront sous l’impulsion de la croissance économique générée par un accroissement de la productivité, une contribution accrue de l’Inde et de la Chine et une forte demande d’argent consécutive à de nombreux investissements capitalistiques, au moment même où la génération des baby-boomers part en pension. Cet accroissement de la productivité est rendu possible par l’intelligence artificielle et renforcé par des risques géopolitiques, avec pour conséquence nécessaire davantage d’innovation. »
Han de Jong, domaine d’intérêt : économie et marchés
« Quatre questions sont au cœur de la formulation d’une vision pour 2024. La première est de savoir si l’inflation est plus ou moins sous contrôle. Bien qu’elle ait baissé avec une remarquable rapidité, les incertitudes l’entourant demeurent importantes, et de rapides et substantielles baisses des taux constituent encore un obstacle pour le moment. »
« La deuxième question concerne la gravité du déclin de la conjoncture américaine. En 2023, la croissance a été portée par le fait que les ménages aient vidé leurs tirelires et par une politique budgétaire expansionniste. Si ces facteurs disparaissent à présent, les effets négatifs de l’augmentation des taux demeurent, et le risque d’un atterrissage assez difficile est donc bien réel. »
« La troisième question est : la relance économique chinoise va-t-elle se poursuivre ? Cela paraît probable, même si cette croissance se trouvera limitée par les problèmes que rencontre le secteur immobilier. »
« La quatrième question est de savoir si l’intelligence artificielle aura déjà, en 2024, une influence matérielle sur la productivité du travail. Si c’est une réelle possibilité, elle est encore très incertaine. »
« En définitive, les prévisions pour l’économie et les investissements à risque ne me semblent pas extraordinaires. »
Anne Gram, domaine d’intérêt : développement durable
« La tendance d’une prise de conscience accrue quant à l’importance du développement durable va encore s’amplifier. Les investissements durables sont devenus grand public. Les investisseurs voient le dérèglement climatique se produire sous leurs yeux et veulent des placements verts pour leur argent. Les institutions financières devront utiliser leurs flux monétaires de manière plus consciente et s’en servir pour résoudre les problèmes au lieu de les aggraver. »
« Les fonds de pension vont prendre encore plus de mesures en matière de climat, et le thème de la biodiversité va lui aussi gagner en importance. La perte de biodiversité et le changement climatique sont étroitement liés et exigent d’adopter une vision intégrale, tant outside‑in qu’inside-out. D’une part : quel en est l’impact sur les actifs ? Comment le changement climatique influence-t-il nos investissements et comment ces risques peuvent-ils devenir plus compréhensibles et gérables ? Et d’autre part : quel est l’effet des investissements sur le monde ? C’est une question que les investisseurs institutionnels, notamment sous la pression de l’enrichissement de la réglementation et de la législation, vont développer plus avant.
« La bonne gouvernance et les droits humains restent toujours d’importantes conditions‑cadres pour investir. La diversité et l’inclusion bénéficient quant à elles d’une attention plus prononcée. »
Koen van Mierlo, domaine d’intérêt : marchés privés
« Les investisseurs en private equity font face à un climat d’investissement compliqué du fait des taux d’intérêt plus élevés et des incertitudes entourant l’inflation et la politique monétaire. Notamment le potentiel de rendement du segment du buyout, dépendant de la dette, est ainsi sous pression jusqu’à ce que se matérialise la baisse attendue des taux. Les gestionnaires de fonds n’ont plus accès à un financement bon marché de la dette, voient baisser les flux de trésorerie disponibles du fait de frais d’intérêt plus élevés et doivent naviguer à travers un marché de sortie refroidi. »
« Ce climat d’investissement offre aux gestionnaires de fonds une excellente opportunité de justifier leur structure de coûts relativement chère. En particulier les parties dotées d’expertise en matière d’améliorations opérationnelles, de structures transactionnelles alternatives ou de restructuration de la structure de capital peuvent se distinguer et acquérir des fonds efficaces. Dans le même temps, il est tout à fait concevable que ces défis économiques renforceront la dispersion des rendements des fonds, soulignant l’importance d’un processus de sélection rigoureux. Enfin, le besoin de solutions de liquidités reste élevé pour les investisseurs comme les gestionnaires de fonds, et cela rend intéressants les investissements secondaires. »
« L’investisseur rationnel triomphe même en dépit d’un sentiment d’investissement atténué et des défis posés par l’implémentation. Le private equity n’y fait pas exception. »
Frank ‘t Hart, Hart Advocaten, domaine d’intérêt : réglementation et législation
« 2024 sera l’année de la préparation au règlement DORA et à la Retail Investment Strategy (RIS), qui entreront en vigueur dès le début de 2025. »
« L’AFM a récemment commencé à inciter les sociétés d’investissements et gestionnaires de fonds à dresser l’inventaire de leurs contrats passés avec des fournisseurs d’ICT. La prochaine étape consistera naturellement à adapter ces contrats aux exigences du règlement DORA. Les institutions devront déterminer avec davantage de rigueur à qui elles sous‑traitent et devront disposer d’une stratégie de sortie. Cette évolution prendra forme l’année prochaine. »
« La RIS couvre de nombreux sujets, allant d’un renforcement du principe de la connaissance du client pour l’execution only à l’obligation de conserver tous les messages publicitaires pour reproduction potentielle sur une période de cinq ans. Elle impose également que des rapports annuels sur la stratégie marketing soient soumis à la direction. Enfin, elle comporte des règles sur l’objectivation des prix ; il s’agit en réalité de l’introduction d’une régulation tarifaire. »
« Si ces enjeux n’ont rien de très affriolant, ce sont néanmoins des sujets qui exigeront une préparation en 2024. »