
La demande de coopératives d’habitation – une solution intermédiaire entre la location et l’achat – est en hausse. Cependant, la contribution financière des résidents eux-mêmes est insuffisante pour financer les projets. Le spécialiste gantois wooncoop espère attirer davantage de family offices et d’investisseurs institutionnels comme prêteurs.
Diversifier les sources de financement pour que l’habitat coopératif reste évolutif et abordable : c’est l’une des missions stratégiques que wooncoop s’est assignées lorsqu’elle a renouvelé son conseil d’administration l’été dernier, avec l’analyste immobilier Gert De Mesure comme nouveau président du conseil d’administration. Joris De Kelver (ancien CFO adjoint de Belfius) est le directeur général de la société.
Louer à soi-même
Dans une coopérative d’habitation, les résidents ne sont pas propriétaires de leur logement, mais achètent des parts d’une société coopérative faîtière. En échange de cet apport en capital, ils se voient accorder un droit d’habitation à vie et paient une contribution mensuelle au logement à prix coûtant, une sorte de loyer à eux-mêmes et aux autres coopérateurs.
Dans le système de wooncoop, plus un coopérateur possède de parts, plus sa contribution mensuelle au logement est faible. Les coopérateurs ne perçoivent pas de dividendes, mais ils ont droit à toute plus-value réalisée lors d’une vente. Le modèle de propriété se situe donc entre l’achat et la location.
La société coopérative, créée il y a huit ans, est à l’origine de 23 projets de logement de ce type, répartis dans toute la Flandre. Son bilan compte environ 50 millions d’euros d’actifs, principalement des terrains, des bâtiments et des projets en construction.
Grâce à l’achèvement de plusieurs projets, le nombre de logements occupés sous gestion a doublé pour atteindre 132 en quelques mois seulement. Les trois derniers projets résidentiels en phase de construction sont Dikken Eik à Gand, Stek Future à Louvain et Moos-Herk à Hasselt.
« La demande émanant de futurs résidents est forte et les municipalités sont également très ouvertes au modèle, car le logement abordable est une priorité politique partout. Nous entrons donc dans une nouvelle phase de croissance et, pour cela, nous avons besoin d’un financement structurel plus important. C’est pourquoi nous recherchons de nouveaux partenaires », explique M. De Kelver.

Investissement d’impact
Pour couvrir les coûts d’investissement, wooncoop fait appel à trois sources différentes. Les coopérateurs et les sympathisants qui achètent des parts sociales représentent 40 % des fonds collectés. Environ 25 % proviennent de prêts bancaires à long terme. Les 35 % restants sont obtenus grâce à des prêts accordés par des sympathisants ou des investisseurs.
« Nous ne prévoyons pas de changement dans les ratios entre nos sources de financement, mais les montants nécessaires deviennent de plus en plus importants, précise Joris De Kelver. C’est pourquoi nous discutons avec des fonds de pension, des family offices et des investisseurs d’impact pour voir s’ils souhaitent devenir prêteurs. »
Un atout pour convaincre les investisseurs institutionnels est effectivement que les coopératives d’habitation peuvent être considérées comme des investissements d’impact. L’investissement d’impact ne vise pas seulement un rendement financier, mais également un objectif social mesurable. « Nous obtenons naturellement un bon score pour le « S » de ESG (écologie, social, gouvernance) », déclare le président Gert De Mesure. M. De Kelver décrit wooncorp comme un « investissement à intérêt avec un rendement social ».
Concrètement, la société émet des prêts subordonnés avec un dépôt minimum de 5000 euros et une durée de trois, cinq, sept ou dix ans. Selon M. De Kelver, le rendement est comparable aux intérêts d’un compte à terme, majorés d’une prime.
N’est-il pas envisageable de créer une catégorie d’actions distincte pour les grands investisseurs ? « Ce n’est pas prévu pour le moment », répond M. De Kelver. « Nous voulons préserver l’idée de coopérative, où une personne détenant une part de 250 euros a les mêmes droits de vote qu’un investisseur qui apporte 400 000 euros. Plutôt que de faire appel à des investisseurs externes, nous voyons plus d’avantages dans la diversification et l’expansion de nos prêteurs. »
Suisse et Pays-Bas
Pour M. De Kelver, la ville de Zurich, en Suisse, est le grand exemple européen en matière de coopératives d’habitation. On estime que 27 % du marché locatif urbain y est constitué de coopératives. « L’avantage, c’est que les loyers des coopératives d’habitation sont inférieurs de 20 à 30 % au prix du marché. Les coopératives d’habitation permettent donc d’améliorer l’accessibilité financière. »
Ce type de logement devient également de plus en plus populaire aux Pays-Bas. L’État néerlandais a récemment mis en place un fonds renouvelable de 40 millions d’euros. L’objectif est que les prêts gouvernementaux encouragent davantage de parties privées à cofinancer des projets de logements coopératifs.
Aux Pays-Bas, le financement se fait généralement au niveau des projets. Pourquoi wooncoop a-t-elle opté pour une société coopérative pour plusieurs sites ? « En théorie, nous pourrions placer chaque projet dans un véhicule distinct, un SPV ou special purpose vehicle. Mais la complexité administrative est aujourd’hui trop grande pour cela », explique M. De Kelver.
« Le fait de tout gérer au sein d’une seule société nous permet également de rester plus flexibles. Lorsqu’un bien immobilier prend de la valeur, nous pouvons contracter des emprunts supplémentaires. Nous pouvons ensuite utiliser cet argent pour préfinancer d’autres projets. »
À terme, wooncoop espère passer du statut de promoteur de projets résidentiels à celui de gestionnaire. La coopérative s’est fixé un objectif à long terme : l’ambition est de gérer environ mille logements coopératifs d’ici 2040.