Gertjan Verdickt
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Notre récente étude expérimentale récente sur la confiance des investisseurs dans les prévisions générées par IA a mis en avant quelques conclusions notables. Elle a dressé un tableau complexe de la manière dont les investisseurs manipulaient les prévisions financières issues de différentes sources.

Imaginez que vous soyez sur le point de prendre une décision d’investissement cruciale. À qui ferez-vous le plus confiance : un analyste aguerri de Wall Street ou un système d’IA sophistiqué ? La réponse est plus surprenante qu’on pourrait le penser.

Alors que l’IA gagne toujours plus de terrain dans le secteur financier, nous nous sommes plongés au plus profond de la psyché de l’investisseur moderne. Nous avons réuni 3600 investisseurs américains – un groupe suffisamment étendu pour satisfaire même les statisticiens les plus sceptiques – et les avons embarqués dans un voyage fascinant dans le monde des prévisions financières.

Notre mission ? Savoir si les investisseurs sont aussi séduits par l’IA que ce que les passionnés de technologie veulent bien nous le faire croire. Nous avons donné à tous nos participants la même prévision – un modeste rendement de 5 % pour le S&P 500 –, mais leur avons raconté différentes versions quant à qui, ou quoi, était à l’origine de cette prévision. Parfois, il s’agissait du nom familier de Goldman Sachs, parfois d’un mystérieux système d’IA, et parfois d’une combinaison futuriste entre humain et machine.

Aversion algorithmique

Ce que nous avons découvert étonnerait même le vétéran le plus endurci de Wall Street :

  1. La bonne nouvelle : les investisseurs ne sont pas totalement figés dans leurs schémas de pensée. Ils adaptent leurs attentes en fonction des nouvelles informations, peu importe la source. Il y a donc de l’espoir !
  2. La nouvelle surprenante : lorsque l’IA entre en scène, les investisseurs se montrent subitement beaucoup plus circonspects. Ils ont moins tendance à changer leurs convictions lorsqu’une nouvelle information leur est présentée, même si une personne humaine est encore impliquée. Les investisseurs font moins confiance à la combinaison Humain + Machine qu’à l’analyste financier de chair et de sang. En psychologie, ce phénomène s’appelle l’« aversion algorithmique ». 

Ces résultats ont d’importantes implications pour le secteur financier. Bien que l’IA soit de plus en plus puissante et précise dans la génération de prévisions, un fossé sépare toujours progrès technologique et confiance des investisseurs.

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Graphique 1 : Crédibilité d’une prévision selon qu’elle provienne de l’IA, de l’humain + IA ou de l’humain seul.

Les femmes et les démocrates

Ajoutons quelques explications et nuances. Nous avons découvert qu’on ne pouvait pas mettre tous les investisseurs dans le même panier :

⦁    Les investisseuses se révèlent plus ouvertes aux conseils de l’IA. Qui l’eût cru ? 

⦁    Les démocrates ont davantage tendance à suivre l’oracle de silicium que leurs homologues républicains. Les préférences politiques semblent donc également jouer un rôle dans les salles des marchés.

⦁    Plus les investisseurs possèdent de connaissances sur l’IA, plus ils ont tendance à l’écouter. Si cela n’est pas une surprise, le message est néanmoins clair : l’éducation est un facteur clé. 
 

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Graphique 2 : Crédibilité d’une prévision selon qu’elle provienne de l’IA, de l’humain + IA ou de l’humain seul pour les différents groupes.

Que signifie tout cela pour l’avenir des marchés financiers ? Eh bien, il semblerait que l’IA ait encore un long chemin à parcourir avant de conquérir totalement les cœurs (et portefeuilles) des investisseurs. Les établissements financiers désireux d’implémenter l’IA devront ainsi réfléchir scrupuleusement à leur stratégie de communication. . 

Conclusion

Pour conclure, l’IA a beau être toujours plus efficace dans ses prévisions de marché, la confiance humaine reste la seule véritable « devise » du monde financier. Le défi que doit à présent relever le secteur consiste à combler le fossé entre ce dont l’IA est capable et ce qu’en pensent les investisseurs.

En conséquence, chers professionnels de la finance, préparez-vous à un avenir où l’enjeu ne sera pas uniquement de développer de meilleurs algorithmes, mais aussi de conquérir les cœurs et les esprits. 

L’étude complète peut être consultée ici

Gertjan Verdickt est professeur assistant de finance à l’université d’Auckland et chroniqueur pour Investment Officer.

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