
Pour Raya Bentchikou (Axa IM), la prochaine étape dans le développement de l’investissement durable passera par davantage d’impact investing. Les actifs sous gestion dans ce domaine devraient augmenter significativement durant les prochaines années.
Axa Investment Managers s’est engagé depuis plus de vingt ans dans l’investissement socialement responsable (ISR). En 2017, « nous avons voulu formaliser et généraliser ce qui avait été mis en place depuis 20 ans, avec une intégration des critères ESG (Environnement, Social, Gouvernance) à toutes les étapes de la prise de décision », souligne Raya Bentchikou, head of ESG Business Development.
Sur l’ensemble des actifs sous gestion, 90% (soit environ 700 milliards d’euros) font actuellement l’objet d’une politique active de gestion des exclusions, tandis que les actifs gérés sur base d’une analyse ESG représentent 463 milliards d’euros. « Notre ambition est de porter cette poche à 90% des encours durant les prochaines années, notamment en mettent en ligne avec les critères ESG un grand nombre de nos fonds ouverts ».
« C’est un développement qui est poussé par l’évolution de la réglementation en France (et en Europe), qui incite les gestionnaires des fonds à intégrer les critères ESG et à communiquer sur la manière dont le gestionnaire engage les directions des groupes. Il est également poussé par l’émergence des millenials chez les investisseurs particuliers, une population plus sensible à la thématique des investissements durables ».
Analyse sectorielle
Outre l’équipe centrale chargée de donner les directives et de maintenir le modèle de scoring avec les déclinaisons sur l’ensemble des secteurs, Axa IM a engagé une quinzaine de spécialistes ESG, qui seront directement intégrés au niveau des équipes de gestion. « Le gestionnaire de fonds a directement dans ses outils les rapports de nos analystes ESG, et il ne doit donc plus faire une démarche spécifique pour obtenir des informations. En outre, il doit pouvoir donner des exemples de sociétés qui ont été ajoutées ou écartées pour des questions de durabilité. Les sociétés à problèmes constituent un risque qui est de plus en plus matériel pour les investisseurs ».
Pour chaque secteur, Axa IM utilisera le fournisseur de données externes qui fournit les données les plus pertinentes, et le modèle de scoring ESG sera adapté afin de prendre en compte les enjeux les plus significatifs. « Pour une banque, ce seront par exemple les critères sociaux qui seront davantage mis en avant, tandis que pour un groupe automobile, les préoccupations sur la gouvernance passeront au premier plan ».
Standardisation
Raya Bentchikou s’attend à ce que l’ESG devienne rapidement une méthode d’analyse relativement standardisée chez tous les gestionnaires de fonds, afin notamment de contrôler la manière dont les risques sont gérés au sein du portefeuille. « Désormais, c’est sur l’impact investing que la différence va se faire entre les gestionnaires ». Cette poche ne représente à l’heure actuelle que 18 milliards d’euros chez Axa IM, essentiellement sur des fonds thématiques en actions (sur le capital humain, sur la montée en puissance des femmes dans les entreprises ou sur l’économie propre) ainsi que sur les Green Bonds. « Notre ambition est de continuer à grossir sur ce segment ».
« Le but ultime est de pousser les entreprises à adopter un comportement vertueux », souligne Raya Bentchikou, « et à adopter les meilleures pratiques. Dans ce but, il faut les confronter pour qu’elles se dirigent dans la bonne direction. Nous faisons aujourd’hui face à des enjeux majeurs au niveau de la survie de nos sociétés, et il ne faut pas croire que les actions locales seront suffisantes. Il faut que les détenteurs de capitaux se mobilisent pour infléchir la trajectoire ».
Si les institutionnels sont déjà bien engagés dans la voie de l’investissement durable, elle souligne toutefois que les particuliers restent encore souvent à la traîne. « Les intermédiaires financiers ne sont pas encore assez souvent formés pour expliquer les avantages à investir durablement, et ils ont encore souvent une vision mystique et déformée de l’investissement durable ».