François Lecomte - Belfius Asset Management
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La fuite massive des capitaux européens vers les États-Unis préoccupe vivement François Lecomte, CEO de Belfius Asset Management (35 milliards d’euros sous gestion). « Cette situation est intenable. Les marchés des capitaux européens saignent. Nous allons devoir agir. »

François Lecomte n’est pas le seul à percevoir ces signaux alarmants : les capitaux européens sont massivement investis dans des actions américaines, de grandes entreprises européennes envisagent de transférer leur cotation à Wall Street et certaines start-ups européennes migrent directement aux États-Unis avec leurs innovations.

« Les deux tiers des capitaux d’investissement européens sont alloués à des actions américaines. C’est inquiétant », déclare le Français. Le fait que différentes sociétés de Bourse privilégient les actions américaines au détriment des actions européennes dans leurs perspectives de fin d’année ne fait qu’amplifier la fuite des capitaux à court terme. »

Le problème structurel réside dans la fragmentation des marchés des capitaux de l’UE, un constat maintes fois établi ces derniers mois. Cette situation pousse les entreprises européennes à chercher un financement non pas sur les Bourses européennes, mais là où les processus sont plus rapides et moins coûteux, comme sur les marchés privés florissants ou aux États-Unis.

« Pour moi, les marchés des capitaux sont le système sanguin de l’économie. Plus les flux de capitaux sont fluides, plus l’économie est saine. Or aujourd’hui, l’Europe saigne », déclare François Lecomte.

Union des marchés des capitaux

Le grand projet européen visant à créer une Union des marchés des capitaux (UMC) est resté lettre morte depuis plus de dix ans, déplore le CEO de Belfius AM. Cependant, ce projet d’UMC a été relancé dans l’intervalle sous le nom d’Union pour l’épargne et l’investissement (UEI). Christine Lagarde, la présidente de la BCE, appelle notamment à prendre des mesures concrètes face à une évolution géopolitique marquée par un protectionnisme croissant.

« Nous devons inciter les investisseurs européens à investir en Europe », résume François Lecomte. Comment ? En accordant des avantages fiscaux ? « C’est certainement une piste à explorer. On pourrait envisager de rendre les investissements dans les actions européennes fiscalement plus attractifs que ceux dans les actions non européennes. Mais je suis bien conscient du fait que c’est plus facile à dire qu’à faire. Il existe probablement d’autres solutions. Quoi qu’il en soit, nous allons devoir agir. »

« La carotte et le bâton »

Une différence de traitement entre les actions européennes et non européennes ne va-t-elle pas à l’encontre du principe du libre marché ? « Je suis un fervent défenseur du libre marché. Cependant, la souveraineté de l’Europe constitue également une valeur fondamentale. Il faudra trouver un équilibre entre ces deux principes. Pour rendre l’Europe plus attractive en tant que destination d’investissement, il faudra combiner des mesures incitatives et réglementaires. En d’autres termes, un peu de carotte, mais aussi un peu de bâton », répond François Lecomte.

Un nombre croissant de PME ambitieuses, en Belgique et en Europe, n’aspirent même plus à une introduction en Bourse, car elles parviennent à se financer sur les marchés privés par le biais de mécanismes tels que le capital-investissement ou la dette privée.

François Lecomte considère les marchés privés comme « un complément indispensable » aux marchés publics, mais en aucun cas comme un substitut. Selon lui, la Bourse doit continuer à jouer son rôle de marché efficace et liquide. « Je préfère voir le plus grand nombre possible d’entreprises en croissance entrer en Bourse, afin que les épargnants puissent investir dans des actions de leur propre économie. »

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