
Selon Morningstar, les fusions entre gestionnaires d’actifs européens génèrent rarement des bénéfices. À titre d’exemple, les avantages du rachat de NNIP par Goldman Sachs AM ne sont pas évidents. « Les investisseurs n’ont pas constaté de baisse des frais, même dans les marchés émergents ou les stratégies à haut rendement où des synergies ont été réalisées », met en garde la société.
La baisse des commissions, l’augmentation des coûts et l’essor de l’investissement passif ont plongé les gestionnaires d’actifs européens dans une crise identitaire. Certains misent sur des économies d’échelle grâce à des fusions, d’autres sur l’innovation et une culture centrée sur le client. Un nouveau rapport de Morningstar révèle que pour les investisseurs professionnels, la question n’est pas de savoir qui survivra, mais qui apportera de la valeur ajoutée. . Les investisseurs ont davantage intérêt à choisir des gestionnaires qui se développent de manière organique plutôt que des sociétés qui se consolident. Les stratégies de croissance flexibles génèrent structurellement des rendements plus élevés.
« Les gestionnaires d’actifs qui réussissent se concentrent sur l’innovation, la transformation numérique et les solutions personnalisées – pas tellement sur la taille », déclare Monika Calay, directrice de recherche pour le Royaume-Uni chez Morningstar. « La consolidation sélective se poursuivra, mais les stratégies de croissance flexibles sont mieux positionnées pour l’avenir. »
Quand rachat rime avec sortie de fonds
Les fusions font leur retour dans l’actualité depuis la fin de l’année dernière : BNP Paribas acquiert AXA Investment Managers, Natixis fusionne avec Generali Investments et Amundi et Allianz Global Investors auraient discuté d’un méga-deal. Celui-ci n’a pas eu lieu – une occasion manquée ? Pas forcément, suggère Morningstar.
Selon le rapport mené par ce dernier, de nombreuses fusions réalisées au cours de la dernière décennie n’ont pas permis d’améliorer les performances, de réduire les coûts ou d’augmenter les bénéfices. Certaines d’entre elles ont même entraîné des sorties de capitaux et des dépréciations. À la suite de leurs fusions en 2017, Janus Henderson et Aberdeen Standard Life ont dû procéder à d’importantes dépréciations de goodwill.
« Les investisseurs n’ont pas constaté de baisse des frais, même dans les marchés émergents ou les stratégies à haut rendement où des synergies ont été réalisées. »
Morningstar, à propos de l’acquisition de NNIP par GSAM
De même, les avantages du rachat de NNIP par Goldman Sachs AM en 2022 pour deux milliards d’euros ne sont toujours pas évidents. « Les investisseurs n’ont pas constaté de baisse des frais, même dans les marchés émergents ou les stratégies à haut rendement où des synergies ont été réalisées », selon le rapport. Une offre de produits plus large peut être bénéfique, mais c’est rarement un élément décisif.
Goldman Sachs réagit en soulignant que la réussite d’un rachat ne se mesure pas forcément à l’aune des commissions. « Outre l’extension de la gamme de produits, nos clients ont aussi accès à davantage d’expertise et de solutions d’investissement sur mesure », affirme un porte-parole de la société.
Les risques d’une fusion
Les économies d’échelle, telles qu’une meilleure exécution, une réduction des coûts ou une gouvernance plus forte, aboutissent rarement à des résultats tangibles, selon Morningstar. Les auteurs de l’enquête dressent la liste des cinq pièges les plus fréquents après une fusion : l’inadéquation culturelle, la complexité du leadership, la perte de talents, des perturbations au niveau des produits et la lourdeur de la structure. Ces éléments détournent l’attention de l’essentiel : des rendements stables.
« Même pour les actionnaires, les avantages de la consolidation ne se concrétisent pas toujours, conclut Morningstar. Aucune des fusions examinées n’a conduit à une amélioration démontrable des bénéfices. »
Les avantages d’une croissance organique
Les entreprises qui se développent par croissance organique obtiennent de meilleurs résultats que les entités fusionnées sur des indicateurs clés. Elles ont plus souvent obtenu une note High ou Above Average sur le pilier Parent de Morningstar, qui évalue la gouvernance, la stabilité et l’intérêt des investisseurs.
Ces sociétés favorisent des cultures plus fortes, retiennent les talents et prennent des décisions plus cohérentes à long terme. Elles sont plus susceptibles d’investir dans la numérisation, l’intégration ESG et la personnalisation pour les clients institutionnels.
« La croissance organique tend à favoriser une culture plus forte et un comportement plus favorable aux investisseurs que la croissance par le biais d’acquisitions », indique le rapport.
Coûts et performances
Dans les stratégies passives, les frais ont été nivelés par la concurrence et non par les fusions, conclut Morningstar.
Dans la gestion active, les coûts dépendent davantage du positionnement et de la valeur ajoutée que de la taille. Le rapport ne constate pas de différence majeure en termes de rendement entre les organisations qui se sont développées de manière organique et celles issues de fusions. Mais le contexte est important. Les performances sont souvent mises sous pression lors des fusions, et les investisseurs font les frais des problèmes de restructuration et d’intégration.
Intérêts des investisseurs
Pour les responsables de l’allocation et les investisseurs, la leçon de Morningstar est claire : plus grand n’est pas forcément synonyme de meilleur. Les organisations les plus orientées client sont souvent celles qui connaissent une croissance constante, en mettant l’accent sur les processus, la stabilité et l’innovation ciblée.
« Les acquisitions génèrent rarement des coûts plus bas ou de meilleures performances », explique Monika Calay. « La pression sur les prix reste forte, en particulier pour les produits passifs. Les frais convergent grâce aux forces du marché et non à la consolidation. »
En bref, quiconque évalue les sociétés de gestion de fonds devrait examiner de plus près la manière dont elles investissent plutôt que les organisations qu’elles ont acquises.