Offshoring wordt reshoring
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Tout investisseur qui suivait cette plateforme en 2012 bénéficiait d’‘informations privilégiées’. Et ce, grâce à Larry Fink, le président-directeur général de BlackRock. Il avait prédit que les États-Unis se trouvaient à l’aube d’une renaissance industrielle. L’année 2022 a confirmé la justesse de cette prédiction : 108 milliards de dollars ont été investis dans la construction de nouvelles usines (de production), ainsi que le montrent les données du Bureau du Recensement des États-Unis (Census Bureau).

Dans une  interview  accordée à Investment Officer, Fink avait prédit que les ‘délocalisations’ se transformeraient en ‘relocalisations’ au fil du temps. Selon lui, cette évolution serait stimulée par la révolution énergétique silencieuse en cours. D’ici cinq à dix ans, les États-Unis devraient être autosuffisants en matière d’extraction de pétrole et de gaz en Amérique du Nord et au Mexique. « Cela aura un impact incroyable sur les États-Unis et l’économie mondiale », avait-il déclaré - et c’est ce qui s’est produit. 

Les États-Unis sont aujourd’hui le premier producteur mondial d’énergie et, en raison de la guerre en Ukraine, l’Union européenne est dépendante aussi bien de leur gaz naturel liquéfié que de leur parapluie de sécurité militaire. Mais l’UE risque en outre d’être victime d’une troisième carte maîtresse jouée par l’administration Biden. Il s’agit de L’Inflation Reduction Act, qui vise aussi bien à stimuler la production énergétique aux États-Unis qu’à réduire les émissions de CO2 de 40 % d’ici 2030 en se concentrant sur une production à haut rendement énergétique.  

L’UE bondit 

Le gouvernement américain a dépensé plus de 360 milliards de dollars pour servir ces intérêts nationaux. Washington souhaite par exemple que les microprocesseurs et les batteries soient produites aux États-Unis, car il pourrait maintenant s’agir de technologies clés face à un avenir incertain. En effet, la crise du coronavirus et le processus de démondialisation qui s’est amorcé depuis lors ont clairement mis en évidence la vulnérabilité des chaînes d’approvisionnement mondiales. 

Cet Inflation Reduction Act a fait bondir l’Union européenne. Elle considère les subsides comme une tentative d’inciter les entreprises européennes à délocaliser leur production aux États-Unis. Le président français Macron s’en est déjà plaint auprès de son homologue Biden. La perspective d’un monde multipolaire incertain a encouragé la France et d’autres États membres de l’UE à viser une ‘autonomie stratégique’. Macron a de nouveau défendu cette stratégie lors de sa visite d’État aux Pays-Bas, mardi à La Haye, lors d’une conférence donnée à l’Institut Nexus (photo). 

« Défendre notre modèle »

L’Union européenne doit mener une politique commune si elle veut rester pertinente dans le monde. Selon Macron, cela nécessite une politique qui mette en place un marché des capitaux unique, mène une politique industrielle unique et exige une réciprocité dans les accords et conventions conclus avec d’autres blocs commerciaux. 

« Car si vous perdez votre souveraineté, si vous acceptez de dépendre d’autres puissances, vous ne décidez plus pour vous-même ». Et d’ajouter : « Si nous ne voulons pas être dépendants des autres, si nous voulons conserver notre modèle européen, nous devons élaborer une nouvelle doctrine économique », a déclaré Macron. « Nous devons mener notre propre politique industrielle. Cela a toujours été tabou car l’État interfère alors sur le marché, mais nous avons besoin de notre propre politique industrielle car les États-Unis et la Chine, eux, interfèrent. »

Des subsides importants

Le président français estime qu’une politique industrielle réussie nécessite des subsides importants, mais aussi que l’Union européenne doit être en mesure de protéger les entreprises européennes contre la concurrence déloyale. Il s’est déclaré favorable à la liberté de contenu sur l’autoroute numérique, mais sans régulation, on est vulnérable à la propagande et aux algorithmes qui peuvent être utilisés pour manipuler les opinions. « Nous devons défendre notre modèle contre les intérêts non-européens. »

Enfin, il a souligné que la durabilité constitue une valeur fondamentale et que l’Union européenne ne peut donc pas « signer d’accords avec des pays ou des blocs commerciaux qui ne respectent pas la lutte contre le changement climatique et ne reconnaissent pas l’importance de la biodiversité. »

Position indépendante

Le président Macron plaide depuis des années en faveur d’une position indépendante de l’Europe dans le monde. Il met en garde contre les changements majeurs (dans les rapports de force et de pouvoir) que connaît le monde. L’Europe y est vulnérable et doit acquérir une autonomie stratégique. S’il n’en tenait qu’aux Français, cela conduirait à une politique européenne unique sur les dossiers clés. Cela implique que l’UE puisse fonctionner et prospérer entre les blocs de puissance que sont la Chine et les États-Unis. C’est pourquoi Macron a déclaré, lors de sa visite en Chine la semaine dernière, que la France ou l’UE ne suivraient pas les États-Unis en cas de conflit à propos de Taïwan.

Le week-end dernier, le président a renchéri en déclarant, lors d’un entretien avec Les Échos et Politico, que l’Europe ne devait pas se laisser entraîner comme une ‘vassale’ dans l’escalade entre les deux superpuissances. « Nous Européens, nous devons nous réveiller. Notre priorité n’est pas de nous adapter à l’agenda des autres dans toutes les régions du monde. » Il n’a pas abordé ce thème dans son discours à La Haye, qui a été dominé au début par une protestation bruyante de certains manifestants.

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