Un ratio cost/income de 40 % ne peut être atteint que par une stratégie claire, une réelle efficacité, le courage de dire ‘non’ et la digitalisation. La gestion discrétionnaire va encore gagner en importance au détriment de la gestion conseil. Et oubliez le market timing, c’est un exercice inutile.
C’est ce qui ressort d’un entretien avec René Havaux (CEO) et Michel Buysschaert (membre du comité de direction) de Delen Private Bank. Ils sont très satisfaits de l’augmentation brute des actifs sous gestion à concurrence de 9 milliards d’euros l’année dernière (effet de marché compris). Le chiffre net (sans effet de cours) était de 2,5 milliards d’euros.
« Nous parvenons à convaincre 99 % de nos clients de ne pas sortir après une baisse. Nos chargés de relation affirment que nos clients restent également très sereins. » Après un rendement de 22 % en 2021, le profil full-equity enregistre actuellement une perte de 12 à 13 % depuis le début de l’année. « Pendant des années, le pourcentage moyen d’actions dans les portefeuilles n’a cessé d’augmenter, ce qui est bien sûr également dû à la baisse des taux d’intérêt », explique René Havaux.
Selon Michel Buysschaert, un client moyen chez Delen a également un profil de risque supérieur à la moyenne, quelque part entre équilibré et dynamique, avec une moyenne d’environ 60 % d’actions. « C’est pourquoi les clients parviennent mieux à prendre du recul par rapport aux corrections boursières. En raison de la hausse des taux d’intérêt, les portefeuilles moins risqués ou défensifs souffrent plus depuis le début de l’année. »
DIYers
René Havaux mentionne que 93 % des investisseurs sont investis dans les fonds de la banque, et 7 % choisissent leurs propres investissements. « Nous avons étudié cette question sur une période de dix à vingt ans, et il s’est avéré que 80 % de ces 7 % de DIYers ont sous-performé nos fonds patrimoniaux. La principale raison de leur sous-performance est qu’ils sortent aux mauvais moments et ne rentrent pas à temps. 20 % font par contre mieux que nos fonds. L’explication réside principalement dans la concentration dans un petit nombre d’actions « gagnantes », alors que nous sommes très diversifiés. Nous avons en moyenne 260 lignes, alors que certains clients ont dix actions en portefeuille. Nous avons délibérément opté pour une large diversification, ce qui permet aux clients d’avoir l’esprit serein. »
Coûts
Même un acteur comme Delen, caractérisé par un faible ratio cost/income, se voit confronté à des coûts de plus en plus élevés en matière d’IT, de compliance et de réglementation. « Aujourd’hui, nous avons par exemple deux fois plus de collaborateurs au sein du département compliance qu’il y a deux ans et demi. Ces coûts ne vont faire qu’augmenter. Ce département doit suivre le développement de notre clientèle. Heureusement, nous pouvons déjà informatiser en grande partie les processus KYC. Les nouveaux défis, comme les clients qui investissent les revenus de leurs bitcoins, sont une nouveauté à laquelle il faut s’adapter. »
Marché belge
Le marché belge du private banking a connu en 2020 un afflux net négatif. En 2021, l’afflux net était plutôt stable, voire légèrement positif. En 2021, il y a bien sûr eu un effet de marché très important, de sorte qu’au bout du compte, le secteur a vu ses actifs augmenter. La gestion discrétionnaire, qui représente 40 % du marché total, est en forte progression au détriment de la gestion conseil.
Auparavant, il y avait trois types de service, explique Michel Buysschaert, répartis à parts égales entre gestion discrétionnaire, gestion conseil et execution only, mais le marché évolue aujourd’hui vers le 40-30-30, une tendance qui devrait se poursuivre.
Selon lui, le positionnement sur le marché belge n’a pas beaucoup changé, mais Van Lanschot Kempen opère un solide mouvement de rattrapage parmi les acteurs de niche à la suite de l’intégration de Mercier Vanderlinden. Les trois principaux acteurs de niche dans le segment des clients privés en Belgique pourraient alors se présenter comme suit (estimation personnelle) : Delen en première position, suivie de Degroof Petercam et Van Lanschot Kempen et Puilaetco, puis ABN-AMRO en troisième position.
« Lorsque les choses se passent moins bien, les acteurs commencent à réfléchir à la concentration et à la consolidation. 2021 a été une bonne année, et les gens se posent alors moins de questions. Maintenant que la situation se corse, cette question revient sur la table. Les coûts de la réglementation et de l’IT augmentent fortement et les clients veulent également une réponse immédiate. Ce sont ceux dont le ratio cost/income est plus élevé qui doivent y réfléchir. Ce n’est pas au niveau de la taille de l’organisation qu’il faut chercher la bonne réponse. Au cours des vingt dernières années, nous avons eu un ratio cost/income d’environ 40 %. L’efficacité est plus importante que la taille d’une organisation, et il faut également oser dire non et faire des choix. Il faut ensuite déployer une stratégie de manière efficace, et l’IT offre un levier énorme sur l’ensemble de la banque. Vous n’avez alors besoin que d’un petit back-office », ajoute René Havaux.
À l’étranger
Le Luxembourg et la Suisse pèsent ensemble 2,5 milliards d’euros. Ces pays sont assez stables.
Michel Buysschaert : « Les Pays-Bas sont une formidable success-story, car plus d’un milliard d’euros y sont investis, principalement grâce à la croissance organique – nous parlons de l’ancien Oyens & Van Eeghen et de l’acquisition de Nobel. Ce qui est bien avec les Pays-Bas, c’est qu’ils ont intégralement et brillamment implémenté la stratégie de la Belgique, notamment les fonds patrimoniaux. Ils étaient même prêts à abandonner l’ancien nom Oyens & Van Eeghen pour notre marque. J’ai trouvé cela remarquable et très beau. »
Il ajoute que le marché néerlandais est très fragmenté et que la gestion conseil y reste très importante. « La gestion discrétionnaire a encore une marge de croissance considérable aux Pays-Bas. »
Enfin, René Havaux mentionne que préserver l’ADN et l’âme de Delen constitue un défi majeur. « Il est plus difficile de diriger une grande entreprise qu’une petite. Sachant que 90 personnes nous ont rejoints l’année dernière et que nous devons les former et les motiver, il est évident que nous avons encore du pain sur la planche. »
Partie de Ackermans & van Haaren
54 mrd EUR AUM