Deux mois après l’appel de Mario Draghi à une unification du marché européen des capitaux, l’opérateur boursier Euronext annonce des projets qui devraient ravir l’ancien président de la BCE.
Dans le rapport sur la compétitivité européenne qui a fait couler beaucoup d’encre, Mario Draghi exhorte l’UE à remettre sur la table ses anciens projets d’unification du marché des capitaux. L’ancien Premier ministre italien estime que le regroupement des marchés financiers fragmentés de l’UE permettrait aux entreprises d’être moins dépendantes des banques et d’obtenir des financements moins chers par le biais des marchés, ce qui relancerait plus rapidement l’économie.
Réduire la fragmentation du paysage financier européen est justement l’une des principales missions d’Euronext. Lors de la Journée des investisseurs, organisée la semaine dernière à Paris, son CEO, Stéphane Boujnah (qui s’exprimait près du drapeau européen, un détail qui n’avait rien de fortuit), a précisé que cette ambition reposait sur un double argument : « premièrement, cet éclatement constitue un obstacle de taille pour les clients d’Euronext, et deuxièmement, proposer des solutions européennes uniques peut également rapporter de l’argent. »
Euronext, dont la Belgique (par le biais de son bras financier, la SFPIM) est l’un des actionnaires majoritaires, englobe sept Bourses européennes : Amsterdam, Bruxelles, Paris, Lisbonne, Dublin, Oslo et Milan. Stéphane Boujnah souhaite étendre les services du groupe et vise, au final, une fusion. Le groupe a annoncé plusieurs initiatives allant dans ce sens, tant pour la négociation même des valeurs mobilières mêmes que pour la phase amont (introductions en Bourse) et en aval (règlement et dépôt).
ETF
Euronext a ainsi confirmé son ambition de fusionner, d’ici 2027, ses trois grandes plateformes de négociation d’ETF – Milan, Paris et Amsterdam – en vue d’en faire une Bourse européenne unifiée pour ce type de trackers.
« Pour l’heure, une fragmentation existe encore à deux niveaux, explique Anthony Attia, membre de la direction d’Euronext. Tout d’abord, les émetteurs d’ETF doivent ouvrir un carnet de commandes pour chaque pays, afin de toucher les investisseurs locaux. En outre, les négociations se font actuellement aussi par le biais de plateformes RFQ (request-for-quote, NdlR) non réglementées telles que celles de Bloomberg ou Tradeweb. »
« Si nous parvenons à combiner Milan, Paris et Amsterdam, nous créerons ainsi la plus grande plateforme européenne de négociation d’ETF et proposerons une solution à cette fragmentation. Nous constituerons donc une petite « union des marchés de capitaux » qui pourra faire office de modèle pour de nouveaux produits Euronext. »
Un extrait de la présentation destinée aux investisseurs d’Euronext :
Primarybid
Euronext souhaite aussi simplifier la cotation des petites et moyennes entreprises, et proposer un processus attrayant. L’une des pistes envisagées consiste à rendre les introductions en Bourse plus accessibles aux investisseurs particuliers. En France, l’opérateur boursier travaille pour cela avec la fintech Primarybid : une alliance qui, en trois ans environ, a permis à plus de trente PME de lever des capitaux auprès d’investisseurs de détail.
Primarybid est aujourd’hui également présente au Benelux via le courtier en ligne Bux, qui appartient à ABN Amro. L’application permet aux investisseurs particuliers des Pays-Bas et de Belgique d’accéder à des introductions en Bourse et d’autres augmentations de capital réglementées, dont des transactions auparavant réservées aux investisseurs institutionnels. « Ce nouveau contrat constitue une étape importante dans notre objectif commun de promouvoir la participation des investisseurs de détail aux marchés financiers », affirment les partenaires.
Règlement
Le rapport de Mario Draghi notait que le suivi effectué après les transactions sur titres – les services post-trade – était encore extrêmement fragmenté en Europe, ce qui contraste avec les États-Unis, où les services de règlement et de dépôt sont très centralisés.
Dans ces domaines également, Euronext espère jouer un plus grand rôle grâce à ses services Euronext Clearing et Euronext Securities. À l’horizon 2027, l’opérateur boursier entend se positionner comme « le point d’entrée unique, et le plus efficace, vers les marchés des capitaux européens pour la cotation, la négociation, la compensation, le règlement et le dépôt. »