Les valeurs financières européennes sont une fois de plus sous les feux de la rampe. Et une fois de plus, ce n’est pas à cause de quelque chose de bon. Le spread CDS sur le Credit Suisse a augmenté ces derniers jours. Mais n’est-ce que la partie émergée de l’iceberg ? De nombreux «investisseurs» et «gourous» s’empressent de signaler un éventuel risque systémique. Mais du moins, d’après ce que je peux voir, il n’y a rien de tout cela en ce moment.
Le graphique ci-dessous montre l’écart entre les CDS du Credit Suisse et ceux de ses homologues suisses UBS, Deutsche Bank (parce que, vous savez), BNP Paribas, la plus grande «banque» d’Europe, et un panier de 25 grandes sociétés financières européennes.
À l’heure où nous écrivons ces lignes - ce qui peut avoir une grande importance - le spread CDS du Credit Suisse s’élève à 370 points de base, un record. Et si les écarts de CDS sur d’autres sociétés financières sont également en hausse, on peut dire que le Credit Suisse se distingue clairement.
Le spread CDS du Credit Suisse est :
2,5 fois plus élevé que le spread CDS sur le panier de 25 valeurs financières européennes
3,3 fois plus élevé que le spread CDS de son homologue UBS
4,4 fois plus élevé que l’écart de CDS sur BNP Paribas
Écarts des obligations d’entreprises
Pour déterminer s’il existe un risque systémique ou un risque lié au secteur financier, je compare l’écart entre les CDS sur le panier de 25 valeurs financières et l’écart sur les obligations d’entreprises en euros. Donc, y compris tous les secteurs autres que les finances.
Le graphique montre que la corrélation entre les deux est particulièrement élevée. Bien sûr, ce n’est pas surprenant. Les deux disent quelque chose à propos du risque de faillite perçu. Et avec la récession qui s’annonce en Europe, il n’est pas surprenant que les deux spreads augmentent. En termes relatifs, l’écart de taux sur les obligations d’entreprises en euros a augmenté plus fortement encore que l’écart de taux sur les CDS des 25 financières.
Prêts non performants
Le pourcentage de créances douteuses est passé sous la barre des 2 % dans la zone euro. Ce n’est pas mauvais.
Besoins en capitaux
Depuis le début de l’année, la BCE exige que les établissements financiers de la zone euro disposent d’une réserve de capital totale de 15,1 %. Sur ce total, les fonds propres de base - le ratio CET1 - doivent être d’au moins 10,6 %. Dans le tableau ci-dessous, à l’extrême droite, figurent les volants de fonds propres de 112 institutions financières surveillées par la BCE au premier trimestre de cette année. Les ratios de fonds propres, soulignés par la ligne pointillée verte, sont nettement supérieurs aux exigences de la BCE.
Au fait, notez l’ovale rouge. Ce n’est pas parce que les institutions financières ont de bons tampons qu’elles sont aussi de bons investissements. Le rendement des fonds propres a fortement chuté au cours des derniers trimestres.
Aucun risque ?
Au vu de ce qui précède, je ne peux conclure à l’existence d’un risque systémique pour le secteur financier européen. Soit dit en passant, ce n’est pas la même chose que de dire qu’il ne peut y avoir d’effets de débordement. Le Credit Suisse subit une perte et puise donc dans ses fonds propres, ce qui réduit les réserves de capital. Une grande question semble évidente. En outre, le Credit Suisse perd des clients et n’en gagne pas de nouveaux. Cela met la pression sur les bénéfices.
Le dernier point à garder à l’esprit est que le Credit Suisse, comme son nom l’indique, est suisse et traite donc avec la banque centrale suisse (BNS). La BNS est beaucoup plus petite que la BCE et le Credit Suisse, en revanche, est particulièrement important par rapport à l’économie suisse. Cela rend le risque systémique déjà plus rapide pour la BNS que pour la BCE.
Je pense que c’est aussi, avec les facteurs idiosyncratiques, l’une des raisons pour lesquelles les investisseurs s’intéressent au Credit Suisse et pas, disons, à la Deutsche Bank.
Jeroen Blokland est le fondateur de True Insights, une plateforme qui fournit des recherches indépendantes pour construire des portefeuilles multi-actifs diversifiés. M. Blokland était jusqu’à présent responsable des actifs multiples chez Robeco. Son graphique de la semaine paraît chaque jeudi sur Investment Officer.