Jeroen Blokland
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Si l’on prend un peu de recul par rapport aux réactions quelque peu à courte vue du marché aux nouvelles données sur les prix à la consommation, une chose saute aux yeux : « le » taux d’inflation est une chimère. Le comportement des banques centrales en constitue la preuve la plus importante.

Le chiffre annualisé sur 3 mois ?

Il n’y a pas si longtemps, le président de la Fed nous obligeait à examiner un chiffre d’inflation très spécifique, l’annualized Core Services ex Housing CPI sur 3 mois. L’idée sous-jacente était qu’en ne considérant que cette (petite) partie très spécifique du panier d’inflation, on pouvait obtenir une meilleure image des tendances « réelles » de l’inflation. En effet, tant l’inflation globale que l’inflation de base – cette dernière mesure a longtemps été la référence ultime des « experts » de l’inflation – avaient été terriblement faussées par toutes les péripéties liées à la pandémie et aux chaînes d’approvisionnement.
Mais au moment où cette même inflation de base - et surtout l’inflation globale - a fortement baissé, j’entends peu, voire guère, Jerome Powell ou ses collègues parler du Core Services CPI. Bien sûr, on pourrait argumenter ici qu’il est « logique » que la Fed revienne aux anciennes mesures de l’inflation à mesure que l’économie continue à se normaliser. Cependant, lorsque je regarde mon US Inflation Monitor, qui inclut six mesures différentes du CPI, dont le Core Services ex Housing, ce changement de politique à peine communiqué se révèle dans les faits arranger une banque centrale qui n’est guère encline à relever une fois de plus les taux d’intérêt. En effet, l’annualized Core Services ex Housing CPI sur 3 mois a augmenté pendant quatre mois consécutifs et s’est établi à 4,9 % en octobre, ce qui est nettement supérieur à l’inflation globale.

Les attentes des consommateurs

Le Core Services ex Housing CPI n’est pas la seule mesure de l’inflation à avoir été reléguée à l’arrière-plan. Lors d’une conférence de presse en 2022, laquelle Jerome Powell a directement fait référence aux attentes des consommateurs, mesurées par l’Université du Michigan, pour justifier le relèvement non pas de 0,50 %, mais de 0,75 %. 
 

Mais si ces attentes étaient si importantes pour maintenir la stabilité des prix, que penser du fait que les attentes à long terme sont aujourd’hui plus élevées que l’année dernière ? En fait, les consommateurs s’attendent, pour les cinq prochaines années, à l’inflation la plus élevée depuis 2008. Si l’on ajoute à cela que les prévisions pour les 12 prochains mois ont grimpé à 4,5 %, bien loin de l’objectif de la Fed, on peut se demander pourquoi la Fed et Jerome Powell évitent maintenant largement ces chiffres. 

Des êtres humains comme les autres

Les banquiers centraux sont aussi des êtres humains ! Et ce serait aller trop loin que de conclure qu’ils font simplement ce qu’ils veulent. Mais ce qui précède suggère que même eux ne savent parfois pas exactement s’ils sont sur la bonne voie, ni à quelles mesures de l’inflation ils doivent prêter attention. Ce qui m’amène à m’interroger : l’objectif d’inflation de 2 % sera vraiment aussi sacré qu’il le semble ?

Jeroen Blokland  est le fondateur de  True Insights, une plateforme qui fournit des recherches indépendantes permettant de composer des portefeuilles multi-actifs diversifiés. Il était précédemment Head of multi-assets chez Robeco. Son graphique de la semaine est publié chaque lundi sur Investment Officer.

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