La popularité des thèmes d’investissement varie grandement, mais l’eau semble une constante. En outre, l’or bleu joue un rôle central dans grand nombre de défis liés à la durabilité auxquels notre planète est confrontée. Les investisseurs semblent de plus en plus conscients de son importance ces dernières années, si bien que le thème a attiré beaucoup d’argent frais.
L’investissement thématique est souvent associé à un phénomène de mode, comme en témoigne le nombre de fonds spécialisés dans l’Internet et l’informatique créés pendant la bulle technologique. Or, plus de la moitié de ces fonds ont disparu après avoir engrangé de lourdes pertes en 2001. D’autres thèmes résistent mieux à l’épreuve du temps ; c’est notamment le cas de l’eau. Parmi les stratégies les plus anciennes, certaines ont été lancées à l’aube du nouveau siècle.
De nombreux arguments plaident en faveur d’un investissement dans l’eau ; l’or bleu est en effet indispensable pour la vie sur terre, mais le stock disponible est limité. En outre, nombre des défis et risques climatiques auxquels nous sommes confrontés ont un lien avec l’eau : la pollution de l’eau ou encore le réchauffement climatique sont responsables de l’élévation du niveau des mers et des inondations, mais aussi de la sécheresse et d’une pénurie d’eau croissante.
Ces problématiques forment un vivier intéressant à exploiter pour les entreprises en quête de solutions. Les fonds spécialisés dans la thématique de l’eau investissent notamment dans des entreprises telles qu’Aalberts (producteur de raccords pour la distribution et la régulation d’eau et de gaz), Arcadis (bureau d’ingénierie), Geberit (fabricant de systèmes sanitaires), Veolia Environnement (entreprise de services aux collectivités spécialisée dans l’eau, le traitement des déchets et l’énergie), American Waterworks (qui propose des services liés à l’eau et à l’assainissement de l’eau) et Ecolab (fournisseur de services, technologies et systèmes pour le traitement, l’assainissement et la purification de l’eau).
Les investisseurs n’ont que récemment pris toute la mesure du rôle joué par l’eau, ce qui s’est reflété dans la nette hausse de l’actif des fonds spécialisés ces dernières années. L’actif sous gestion de ces fonds fluctuait entre 3 et 5 milliards d’euros jusqu’en 2014, mais un net afflux a par la suite été constaté. Et le mouvement s’est accéléré ces dernières années, avec une collecte de 3,1 milliards d’euros en 2019, 2,7 milliards en 2020 et un sommet absolu en 2021, avec pas moins de 5,4 milliards d’euros de collecte nette. Les fonds se sont quelque peu taris l’an dernier, avec une collecte de 918 millions d’euros seulement, mais cela s’explique sans doute davantage par le climat boursier difficile que par une perte d’intérêt pour la catégorie.
Dopé, en premier lieu, par la forte collecte nette, l’actif sous gestion total des fonds de la catégorie Morningstar des actions du secteur de l’eau a augmenté, dépassant les 31 milliards d’euros fin janvier 2023. Cet actif est réparti sur plus de 56 fonds distribués en Europe. Toutefois, plus de la moitié de ce montant est aux mains de deux acteurs : Pictet-Water, le plus important, affiche un encours de 8,3 milliards d’euros, tandis que BNP Paribas Aqua (géré par Impax) peut se targuer d’un actif de 7,2 milliards d’euros. Loin derrière, le numéro trois, RobecoSAM Sustainable Water Equities, gère un actif de 3,5 milliards d’euros.
Le top 5 de cette semaine, qui porte sur la catégorie Morningstar des fonds d’actions spécialisés dans l’eau (dont une classe d’actions sans frais de distribution est disponible en Belgique) tient compte des performances entre début février 2022 et fin janvier 2023.
La pole position revient à KBI Water, fonds lancé en 2000 par KBI, filiale du français Amundi ; il s’agit de l’une des stratégies les plus anciennes de la catégorie. Le fonds est géré par un duo expérimenté composé de Catherine Cahill (depuis 2009) et Matthew Sheldon (depuis 2011), qui font tous les deux partie de l’équipe Natural Resources Equity Strategies, une équipe qui investit principalement dans des actions liées à l’eau, aux énergies propres et à l’agriculture. Les gérants ciblent principalement les entreprises proposant des solutions contre les pénuries d’eau et couvrent l’ensemble du cycle de l’eau, et notamment les sociétés spécialisées dans le traitement des eaux usées ainsi que les infrastructures et les technologies liées à l’eau. Fin janvier 2023, le portefeuille comptait au total 48 positions. Du fait de la concentration de la stratégie, les dix principales expositions représentaient au total 48 % du portefeuille.
Les trois principales positions du fonds étaient Danaher, Veolia Environnement et Essential Utilities.
Le fonds Thematics Water occupe pour sa part la troisième place. Il fait partie des huit stratégies proposées par Thematics Asset Management, acteur de niche spécialisé créé en 2019 et faisant partie du groupe Natixis. Comme son nom l’indique, la société propose des fonds thématiques qui visent à tirer profit de tendances de croissance séculaires. À sa création, cinq investisseurs expérimentés, dont Arnaud Bisschop et Simon Gottelier, ont ainsi été recrutés chez le concurrent Pictet ; anciens co-gérants chez Pictet-Water, ils pilotent désormais ce fonds.
La stratégie met l’accent sur les entreprises impliquées dans la gestion de la demande d’eau et de la pollution, ainsi que les entreprises actives dans les infrastructures liées à l’eau, et notamment les services aux collectivités. L’approche bottom-up qui s’affranchit de tout indice de référence a donné naissance à un portefeuille comportant une cinquantaine de titres, avec un tiers de l’actif concentré sur les dix plus importantes positions. Fin décembre 2022, le fonds affichait les mêmes trois expositions principales que le KBI Water.
BE