Pieter Van Neste,  Koen Steeland, managing directors, Truncus
Truncus Park 01(1).jpg

La directive européenne MiFID II n’aurait pas eu de raison d’être si le secteur financier n’avait pas négligé sa responsabilité fiduciaire. Et les nouvelles technologies ne vont pas forcément faciliter la vie des sociétés de gestion d’actifs et de leurs clients. « Le ‘big data’ risque de déplacer l’accent du court vers le long terme. »

Ce sont les propos qu’ont tenu Pieter Van Neste et Koen Steeland, Managing Directors auprès de Truncus, dans un entretien avec Investment Officer. 

Même si l’image qui ressort au sein du secteur est celle des petites sociétés de gestion d’actifs et des agences familiales en train de crouler sous la charge administrative supplémentaire que la directive MiFID 2 a causée, Truncus s’en sort plutôt bien, expliquent Pieter Van Neste et Koen Steeland. Bon nombre d’experts fixent à 10 milliards d’euros le seuil critique pour pouvoir survivre en tant que gestionnaire indépendant ou banque privée. 

Une règlementation rigide

Avec des capitaux de près de 300 millions d’euros en gestion propre et près de 6,5 milliards d’euros de capitaux externes dont la société assure la gestion administrative, Truncus fait figure d’exception, explique Koen Steeland. D’après lui, la raison en est qu’à la base, l’approche qu’a adoptée la société d’actifs ne s’éloignait pas beaucoup des nouvelles exigences strictes de la directive MiFID. 

« Bien sûr, les règles strictes et formelles nous compliquent un peu la tâche. Mais les fameux profils d’investisseurs de la directive MiFID qui font aujourd’hui suer sang et eau de nombreuses parties émettrices, ont toujours fait partie de notre approche. Nos clients ne s’interrogent pas sur le fait que nous fouillons les moindres recoins de leur vie. Nous l’avons toujours fait. »

La règlementation MiFID laisse à bien des entités un goût amer car souvent, elles n’ont pas connaissance de la totalité des capitaux de leurs clients. Cela les empêche de fournir un travail personnalisé. Selon Pieter Van Neste, la plupart des familles fortunées se montrent réticentes à donner un droit de regard total à tous les gestionnaires qui s’occupent de leurs actifs, car elles craignent que des intervenants commerciaux tentent de s’approprier une part toujours plus grosse du gâteau. 

Selon les gestionnaires, la responsabilité en incombe en grande partie à l’image désastreuse que le secteur a lui-même diffusée. Koen Steeland : « pendant des années, on a fait croire aux gens qu’ils ne payaient rien mais au bout du compte, l’argent sortait de leur compte. C’est hallucinant. Il ne faut donc pas s’étonner que le législateur se soit senti obligé d’imposer la transparence. » 

Des conseils à profusion

Les nouvelles technologies qui ciblent l’accès total aux capitaux à l’aide de plateformes numériques, auxquelles viennent s’ajouter d’autres règlements européens comme le GDPR et la PSD2, vont justement complexifier le conseil en gestion de fortunes, pensent les gestionnaires. Beaucoup trop d’émetteurs pourraient obtenir un droit de regard sur tous les capitaux des familles, ce qui d’après Pieter Van Neste risque d’entraîner des réflexions à court terme et des situations conflictuelles au sein des portefeuilles. En tant que gestionnaire de capitaux jouissant d’une expérience en comptabilité, Truncus contrôle près de 6,5 milliards d’euros et a un aperçu global des capitaux en exerçant ce rôle de supervision.

« Dans notre rôle de supervision en tant qu’émetteur indépendant, c’est justement notre responsabilité de détecter les écarts au sein des portefeuilles. Au sein du secteur, nous sommes aujourd’hui engagés dans un processus intéressant où le règlement GDPR va protéger la vie privée tandis que la directive PSD2 autorise les acteurs non-bancaires à se lancer sur le marché. Aujourd’hui, plusieurs banques privées gèrent bien souvent une fraction d’un capital. Si demain, les plateformes numériques leur donnent accès aux capitaux globaux de leurs clients, les familles vont se retrouver submergées de conseils qui seront tous aiguillonnés en fonction de la stratégie d’une banque en particulier. C’est une illusion de croire que cela va simplifier la vie des gens. »

Toutes ces nouvelles évolutions vont finalement relancer la question des ‘opérations bancaires à l’ancienne’, estime Koen Steeland. Pour Truncus, cela revient à poursuivre sur la même voie. « Nous fonctionnons sur la base d’un forfait fixe en fonction des capitaux totaux du client  et nous versons d’éventuelles rétrocessions. Sur ce point donc, peu de choses changent pour nos clients. »

Des haut rendements, même sans les FAANG

La société de gestion d’actifs collabore avec douze fonds d’investissement de tiers dits « value based » triés sur le volet et gère elle-même deux fonds. Un fonds d’actions et le fonds de fonds dynamique Truncus Best Selection assez récent. Pour ce fonds, la société a engagé l’expert en placements Patrick Vermeulen en tant qu’administrateur. Pendant des années, Patrick Vermeulen a occupé des fonctions de haut niveau à la City de Londres, entre autres chez Schroders et JP Morgan. Il veillera à ce que Truncus reste fidèle à ses principes d’investissement. 

Pieter Van Neste ne veut pas dévoiler les parties émettrices avec lesquelles Truncus collabore. La plupart des gestionnaires sont peu connus en Belgique. « Nous ne pratiquons pas la transparence sur nos collaborations avec des tiers vers l’extérieur. Outre nos douze partenaires, nous en suivons une cinquantaine de près, tous pratiquant une approche de valeur. Notre gestionnaire de valeur américain, par exemple, est parvenu à générer 11,50 % de rendement sur base annuelle depuis le lancement en 2008. Cette année, il a atteint un retour net de 9,72 % en cumul annuel. Et ça, sans les actions FAANG. »

Author(s)
Target Audiences
Access
Limited
Article type
Article
FD Article
No