Conner Rousseau - Vooruit
Conner Rousseau - Vooruit

Avec sa proposition de taxe sur les millionnaires – qu’il préfère appeler « contribution » – le président du parti Vooruit, Conner Rousseau, jette un pavé dans la mare. La taxe vise les comptes titres, les actions, les obligations ainsi que les cryptomonnaies.

Le dirigeant socialiste propose un impôt annuel progressif sur les personnes physiques – « donc les personnes, et non les entreprises » – dont le patrimoine financier total dépasse 1 million d’euros. Les biens immobiliers ne sont donc pas pris en compte dans la base imposable.

M. Rousseau estime qu’environ 150 000 personnes dépassent ce seuil. Les personnes physiques dont le patrimoine financier est inférieur à 1 million d’euros sont totalement exonérées de cette contribution, selon de la proposition. 

« Ceux qui vont travailler cotisent pour la moitié de leur salaire. Ceux qui possèdent plus d’un million d’euros (en comptes-titres, actions, obligations, cryptomonnaies) ne cotisent pas. Cela doit changer. Si nous demandons des efforts à tout le monde, il faut aussi en demander aux 1 % les plus riches de ce pays. Tout le monde doit faire preuve de solidarité », a déclaré le président du parti Vooruit. 

Il a présenté sa proposition mercredi dans Het Laatste Nieuws, le journal le plus populaire de Flandre, au beau milieu des négociations budgétaires du gouvernement fédéral, dont son parti fait également partie.

L’impôt serait appliqué selon un barème progressif : une contribution de 0,3 % serait exigée sur les actifs financiers compris entre 1 et 2 millions d’euros, ce qui équivaudrait donc à une taxe de 3000 euros sur des actifs de 1 million d’euros. Dans la proposition, la taxe passe à 0,45 % pour les patrimoines compris entre 2 et 3 millions d’euros et à 0,6 % pour les patrimoines supérieurs à 3 millions d’euros. M. Rousseau a calculé que la taxe rapporterait au Trésor 1 milliard d’euros par an.

« Bricolage sur bricolage »

Il n’est guère surprenant que les libéraux francophones du MR, qui font également partie de la coalition, rejettent la proposition. « Je trouve très intéressant que dans le pays le plus taxé au monde, on puisse encore proposer de nouvelles taxes », a déclaré Georges-Louis Bouchez, président du MR, à VTM Nieuws.

Plusieurs experts financiers dénoncent sur les médias sociaux le fait qu’un autre impôt sur la fortune soit déjà envisagé, alors que l’impôt sur les plus-values n’a même pas encore été mis en œuvre dans la pratique.

« Après le cafouillage de l’impôt sur les plus-values, on veut maintenant introduire le cafouillage de l’impôt sur les millionnaires, sans même réduire les impôts sur les salaires… Quel immense gâchis », réagit l’économiste Stijn Baert (Ugent). « La taxe sur les millionnaires est de nouveau à l’ordre du jour. Une fois de plus avec le parti pris idéologique qui va avec, une fois de plus sans vision. Cafouillage sur cafouillage. Certains ne s’en lassent jamais. Les gens devraient en fait se révolter sur le plan fiscal », écrit l’expert fiscal Mark Delanote.

Pas de « taxe Zucman »

Les critiques accusent M. Rousseau de courir après le parti d’extrême gauche PVDA avec sa proposition. Le parti, qui selon les sondages est en pleine ascension dans toute la Belgique, réagit « positivement mais de manière critique ». Son secrétaire général, Peter Mertens, estime qu’un « débat sur la taxe sur les millionnaires est toujours une bonne idée ». Il souhaite que l’on se concentre davantage encore sur les plus riches.

« Il est grand temps de mettre en place une taxe ambitieuse sans échappatoires fiscales, estime M. Mertens. Non pas un petit impôt de 0,6 % au maximum comme le propose aujourd’hui M. Rousseau, mais un impôt de 2 à 3 % sur les patrimoines supérieurs à 5 millions d’euros. Cela permettrait de gagner jusqu’à 8 milliards d’euros par an. »

« Il n’est pas question d’une taxe Zucman sur les super riches, comme on l’envisage actuellement en France », analyse le journaliste politique Wouter Verschelden dans sa newsletter W16. L’économiste Gabriel Zucman plaide auprès de nos voisins du sud pour une taxe de 2 % sur les patrimoines totaux (y compris les biens immobiliers) supérieurs à 100 millions d’euros.

« Vooruit ressort une vieille proposition sous un habit neuf. En fait, les socialistes veulent étendre considérablement la taxe actuelle sur les valeurs mobilières en incluant tous les actifs financiers, les comptes d’épargne, les cryptomonnaies et les actions non cotées. Des propositions dans ce sens étaient déjà sur la table lors de la formation du gouvernement l’année dernière, mais elles ont été bloquées par la droite en raison de leur complexité. La question est de savoir si cela va réussir cette fois. »

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