Lyndon Man, Invesco
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Les rendements y sont inférieurs à ceux des États-Unis, mais Lyndon Man, gestionnaire du fonds Invesco Global Investment Grade Corporate Bond, préfère tout de même les obligations d’entreprises européennes aux américaines. Pourquoi ? L’économie américaine se porte mieux que l’économie européenne.

« Nous avons une sous-pondération en obligations américaines parce que les États-Unis sont déjà relativement avancés dans le cycle de crédit. Cette situation n’est pas idéale pour les investisseurs obligataires, car ils sont confrontés à des programmes de rachat d’actions, de nombreuses fusions et acquisitions et des sociétés qui émettent de la dette pour les financer. C’est peut-être une bonne chose pour les investisseurs en actions, mais pas pour les investisseurs obligataires », explique Man dans un entretien avec Investment Officer.

Il en va de même pour l’assouplissement de la réglementation stricte introduite après la crise financière. « L’assouplissement de la loi Dodd-Frank est peut-être également une bonne nouvelle pour les investisseurs en actions, mais du point de vue des créanciers, il entraîne des risques accrus, et donc un spread plus élevé.»

Les États-Unis s’endettent, l’Europe réduit sa dette

C’est pourquoi Man affiche une préférence pour les obligations d’entreprises européennes, qui représentent environ la moitié de l’actif du fonds, soit une allocation environ deux fois plus élevée que celle aux obligations d’entreprises américaines.

« En Europe, la situation est exactement l’inverse de celle des États-Unis. Les entreprises y sont encore en phase de désendettement et la politique monétaire y est plus large. »

Les valorisations relatives des obligations d’entreprises par rapport aux obligations d’État sont également plus attrayantes en Europe, estime Man. « Ceci est dû à la prime de risque géopolitique liée à l’Italie et au Brexit. »

De plus, Man s’attend à ce que l’inflation et la croissance en Europe restent faibles. « La poursuite de l’assouplissement monétaire n’est pas la solution. Ce dont l’Europe a besoin, ce n’est pas d’un stimulus monétaire, mais de mesures de relance budgétaire. Mais cela nécessite une intégration politique, et je ne pense pas qu’elle se produira rapidement. Je m’attends à ce que les taux d’intérêt n’augmentent pas avant l’an prochain, et par très petits paliers de 5 à 10 points de base.

Les ratios de capital plus importants que les bénéfices

En Europe, Man affiche une forte préférence pour les banques. Les taux d’intérêt bas et négatifs sont fondamentalement une mauvaise nouvelle pour ce secteur, réalise également Man. « Du point de vue de la rentabilité, les banques européennes ne sont pas très performantes par rapport aux banques américaines. Mais les investisseurs obligataires ne se soucient pas tant de la rentabilité. Ce qui nous importe, c’est la solvabilité des entreprises et le ratio entre le capital et la dette. »

À cet égard, les banques européennes sont aujourd’hui en meilleure santé qu’il y a quelques années. « Les ratios de fonds propres de base sont passés en moyenne de 8 % à 13 %, et la part des prêts non productifs a également été fortement réduite. »

Pourtant, les banques ont encore des spreads plus élevés que les sociétés non financières, note Man. « Nous nous attendons à ce que cela change, car les banques continuent de réduire leurs bilans alors que les sociétés non financières s’endettent davantage. »

Préoccupations concernant l’Italie

Cependant, Man n’est pas positif à l’égard de toutes les banques européennes. Malgré la création d’une union bancaire européenne, les investisseurs continuent de lier étroitement la solvabilité des banques à celle de leur pays d’origine. Or si une croissance économique modérée peut être bonne du point de vue des investisseurs obligataires, elle ne doit pas non plus être trop mauvaise. C’est pourquoi le portefeuille de Man ne comporte pas d’obligations de banques italiennes.

« Nous sommes préoccupés par la viabilité de la dette publique italienne et par la situation politique en Italie. Les perspectives de croissance sont également médiocres et le pourcentage de prêts non productifs reste autour des 10 %. Soit trois à quatre fois la moyenne européenne. »

Obligations hybrides

Malgré sa forte surpondération européenne, le rendement moyen des obligations de son fonds (mesuré en dollars) est avec 5,2% nettement supérieur à la moyenne du marché. Ceci est dû au fait qu’une part relativement importante de l’actif du fonds est investie dans des titres subordonnés, majoritairement émis par des entreprises investment grade et principalement à court terme.

Man : « Nous n’avons aucun problème à investir dans des dettes subordonnées telles que les obligations hybrides. Nous estimons que le risque de récession est faible et qu’avec les faibles taux d’intérêt actuels, le risque de défaut n’est pas vraiment présent. »

Un des avantages de ces obligations hybrides est qu’elles sont moins sensibles à l’inflation et aux taux d’intérêt plus élevés. Non que Man table sur une augmentation soudaine de l’inflation. « Toutefois, même une légère hausse de l’inflation peut pousser momentanément les rendements obligataires à la hausse. C’est pourquoi nous préférons les obligations qui peuvent surperformer en cas de hausse des taux d’intérêt, parce qu’elles ont un tampon sous forme de portage supplémentaire, comme les obligations hybrides, ou une échéance courte. »

Il y a quelques semaines, le groupe espagnol Banco Santander a provoqué des turbulences car il n’avait pas remboursé une obligation hybride après cinq ans, comme c’était jusqu’alors d’usage pour les banques, mais avait préféré prolonger son échéance.

Man ne s’attend pas à ce que cet événement change fondamentalement le marché des CoCo. « Les CoCo sont devenus la norme parmi les banques européennes ces dernières années. L’option d’achat après cinq ans a toujours été facultative. Les spécifications d’une obligation sont également importantes, tout comme la solvabilité de l’entreprise qui l’émet. De plus, nous nous concentrons sur les obligations à ‘reset coupon’ élevé, afin de minimiser l’impact du non-remboursement. »

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