Le Japon est connu pour être l’exemple même du déclin séculaire. Il se caractérise par une population vieillissante, une faible croissance économique et une pression déflationniste. Aujourd’hui, le pays brille de mille feux, mais personne ne s’en soucie.
Les actions japonaises ont fait figure d’exception discrète sur les marchés mondiaux cette année, ainsi qu’en témoignent le gain de 25 % de l’indice Nikkei 225 et du Tokyo Stock Price Index (Topix). À titre de comparaison, l’indice américain S&P500 a progressé de 14 % depuis janvier, et l’indice européen Stoxx 600 d’un peu moins de 6 %.
La solide performance des actions japonaises est soutenue par la croissance économique. Bien que l’économie japonaise ait enregistré en août une contraction de 0,6 % en glissement annuel par rapport au mois précédent en raison d’une demande étrangère plus faible, l’économie du pays continue de croître plus fortement que celle des États-Unis et de l’Europe. Au deuxième trimestre, le PIB japonais a enregistré un taux de croissance annualisé de 6 %.
Le fait que les bénéfices aient pu être revus considérablement à la hausse a stimulé les cours boursiers, mais les gestionnaires de portefeuilles actifs restent néanmoins obstinément sous-exposés au Japon. Parmi les stratégies de gestion active utilisant le MSCI EAFE (marchés développés hors États-Unis) comme indice de référence, 84 % sous-pondèrent le Japon, de 7,5 % en moyenne.
Sous-pondération du Japon par les fonds actifs se référant au MSCI EAFE
Selon Rick Friedman et Drew Edwards, gestionnaires de portefeuille chez GMO, « les raisons de cette sous-pondération s’expliquent davantage par des préjugés structurels que par une analyse fondamentale. » Selon eux, le problème avec le Japon réside dans le fait que les centres financiers mondiaux, tels que New York et Londres, doivent surmonter un important décalage horaire, une barrière linguistique et d’autres particularités structurelles qui rendent la recherche fondamentale sur les actions japonaises plus difficile.
« Rares sont ceux qui vont rencontrer le management de petites et moyennes entreprises japonaises cotées en bourse, où nous identifions les opportunités les plus intéressantes », déclare Drew Edwards dans une note. Ce dernier attribue la légère augmentation des flux d’investissement vers le Japon (peu significative par rapport à la performance boursière) à l’afflux général vers les ETF et les contrats à terme.
« La plupart des sociétés de fonds sont prudentes, car il est peu probable que leurs gestionnaires de fonds possèdent les compétences nécessaires pour naviguer sur le marché japonais », déclare Drew Edwards.
Il est intéressant de noter que les investisseurs qui ne sont pas concernés par les obstacles mentionnés par GMO, à savoir les Japonais eux-mêmes, manifestent également peu d’enthousiasme à l’égard du marché boursier national. Selon les données de la Banque du Japon, les ménages japonais investissent 11 % de leur épargne dans des actions, tandis que pas moins de 54 % restent placés en liquidités et en dépôts bancaires.
À titre de comparaison, les ménages américains investissent près de 40 % de leur patrimoine sur le marché boursier, tandis que 13 % restent placés en liquidités et en dépôts bancaires, rapporte le Wall Street Journal, qui s’appuie sur des données de la Réserve fédérale.
Selon Hidekazu Ishida, conseiller chez Fincity Tokyo, une société qui travaille en collaboration avec le gouvernement et le secteur pour stimuler l’investissement, la plupart des Japonais considèrent l’investissement comme « très risqué ». « Être impliqué dans la finance est perçu comme ‘pas cool’ » déclare le conseiller au journal économique américain.
Politique monétaire
Aux Pays-Bas, Van Lanschot Kempen a néanmoins augmenté son allocation au Japon, ainsi qu’en témoigne sa dernière note adressée aux clients. « Alors que nous sommes préoccupés par le resserrement de la politique monétaire aux États-Unis et dans la zone euro, qui se traduit par une baisse de la croissance monétaire et une stagnation des prêts bancaires, ces problèmes ne se posent pas au Japon », écrit la banque.
En raison de la politique monétaire accommodante du Japon et du resserrement aux États-Unis, le yen japonais s’est affaibli face à la devise américaine pour se rapprocher du seuil critique de 150 yens pour un dollar américain, auquel la Banque du Japon est intervenue dans le passé pour soutenir le yen.
« Il est possible que la banque centrale japonaise mette fin aux taux d’intérêt négatifs au tournant de l’année, mais une politique monétaire stricte est encore loin d’être une réalité. De plus, la normalisation de l’inflation et de la politique monétaire pourrait également avoir un impact positif sur la confiance dans l’économie japonaise », déclare Van Lanschot Kempen.
La stratégie GMO International Equity maintient une surpondération solide de 3,4 % sur le Japon. D’autres stratégies montrent que GMO affiche des surpondérations similaires, voire plus importantes, par rapport à leurs indices de référence.