« Les intéressants taux d’intérêt à long terme ne vont pas rester éternellement aussi élevés. C’est le moment de fixer certains rendements », déclare Wim D’Haese, directeur de la stratégie d’investissement chez Deutsche Bank Belgique. Il prévoit trois baisses des taux d’intérêt à compter de juin 2024, avec à la clé un impact positif sur les actions.
« Beaucoup de nos prévisions se sont réalisées cette année », affirme Wim D’Haese. Quelques passages des perspectives de la Deutsche Bank de fin 2022 lui donnent en effet raison : « Une croissance économique ralentie en 2023 ne se traduira pas nécessairement par des marchés financiers affaiblis. Ces derniers pourraient s’avérer, au cours de l’année à venir, plus résilients qu’en 2022 », pouvait-on entre autres y lire.
Trois baisses des taux d’intérêt en 2024
Ce qui, en revanche, ne s’est pas réalisé, c’est la perspective d’une légère récession en Europe et aux États-Unis. « Elle n’a pas eu lieu pour l’instant, bien que l’Europe s’en soit approchée avec 2 trimestres de croissance nulle », précise Wim D’Haese. « Nous tablons à présent sur une poursuite du ralentissement de la croissance dans les deux régions au premier semestre 2024. Nous pensons que l’Europe ne va pas connaître de récession ; pour les États-Unis, ce sera limite. Le plus important est que l’économie, selon nous, ne va pas s’effondrer. Nous prévoyons en outre trois baisses des taux d’intérêt à compter de juin 2024, tant aux États-Unis qu’en zone euro, ainsi qu’une inflation sous-jacente en baisse, mais tenace. Ce n’est qu’en 2025 que l’objectif des banques centrales sera atteint ou, tout du moins, en vue. »
« Chaque situation de marché crée ses défis, mais aussi ses opportunités », poursuit le stratège en investissement quant à l’allocation d’actifs actuelle de la Deutsche Bank. « Ces opportunités se trouvent actuellement sur le marché obligataire. C’est bien lui qui a changé la donne en 2023. Les taux d’intérêt resteront peut-être élevés un moment, mais le pic est proche – voire déjà passé. C’est le moment idéal, après tant d’années de vaches maigres, de remplir à nouveau son portefeuille obligataire et de fixer, pour un certain temps, d’intéressants rendements. Nous n’avions plus vu depuis longtemps les intérêts que l’on peut actuellement acquérir sur le long terme. Cela dit, ces rendements intéressants ne resteront pas éternellement aussi élevés. Ce conseil est bien suivi par nos clients. Concernant la durée, cependant, tout le monde n’est pas convaincu que le pic soit déjà passé. Ces clients investissent donc sur une année afin de fixer tout de même des rendements sur le plus long terme. Nous choisissons des obligations d’entreprise de qualité, qui offrent le meilleur rapport entre risque et rendement. Pour le high yield, en revanche, il est encore trop tôt, car le ralentissement de la croissance devrait entraîner des taux de défaillance élevés. »
5 à 7 % de croissance du RPA
Concernant les actions, la Deutsche Bank note davantage de réticence chez les investisseurs. « Ceci est dû à la potentielle récession à venir », explique Wim D’Haese. « Le scénario d’un atterrissage en douceur de l’économie est de plus en plus crédible, bien que la politique monétaire restrictive de la Fed ait toujours, jusqu’à présent, conduit à une récession. Nos clients attendent le bon moment pour les actions et ne se lancent pas tête baissée. Les marchés boursiers ont déjà bien rebondi suite à la correction de fin octobre. Selon nous, ce rally pourrait encore se poursuivre. Le premier semestre 2024 sera de nouveau un peu plus difficile, mais nous attendons une nouvelle hausse au second semestre. Nous partons du principe que la croissance des bénéfices d’exploitation redeviendra positive en 2024 – 5 à 7 % aux États-Unis et en zone euro – et pourra ainsi soutenir les cours des actions. Les actions demeurent le moteur de croissance d’un portefeuille à plus long terme et méritent donc une place prépondérante. »
Sur le plan thématique, au début de l’année, la Deutsche Bank a mis en avant quatre thèmes pour le long terme : transition énergétique, cybersécurité, soins de santé et infrastructure. Cela n’a pas été un franc succès, admet Wim D’Haese : « Si le volet technologique – cybersécurité et IA – a été une grande réussite, le reste est dans le rouge. La transition énergétique est particulière à cet égard, car elle est un thème de long terme par excellence. Notre fonds consacré à l’ensemble du processus énergétique, de la production à la distribution, a passé une année difficile, les attentes de croissance élevées en la matière n’ayant, cette année, pas (encore) pu être réalisées. Le sujet du climat semble être de nouveau quelque peu hors jeu. »
La préférence régionale pour l’Europe et les États-Unis reste bien réelle. « Nous constatons une décote historique en Europe. C’est donc un bon moment pour surpondérer cette région. Plusieurs mois difficiles nous attendent encore sur le plan économique, et dans de telles circonstances, la performance du marché américain est souvent meilleure que celle de l’Europe. C’est pourquoi nous préférons aujourd’hui, du point de vue tactique, miser sur les États-Unis, et favoriser l’Europe sur un horizon un peu plus lointain. Nous ajoutons ensuite à cela un peu du Japon et des marchés émergents. »