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L’offre et la demande jouent un rôle important sur le marché immobilier et continueront d’influencer significativement les prix à mesure que la réserve de logements diminuera. Après la grande crise financière, aussi bien en Europe qu’aux États-Unis, une pénurie structurelle de millions de logements s’est progressivement manifestée.

Dans le passé, afin de déterminer si quelqu’un pouvait se permettre d’acheter un logement et d’estimer le potentiel d’augmentation des prix de l’immobilier, l’analyse se concentrait principalement sur les revenus, les taux d’intérêt et les prix de l’immobilier. Bien qu’en théorie, de moins en moins de personnes puissent se permettre d’acquérir un nouveau logement, il y a toujours des acheteurs. L’apport financier familial joue un rôle de plus en plus important à cet égard. En réalité, nous adoptons tous un peu le modèle chinois.

En Chine, le soutien familial joue un rôle important dans le financement d’un logement. La culture chinoise accordant une grande importance à la famille et au soutien intergénérationnel, il est courant que les familles regroupent leurs moyens financiers pour aider les plus jeunes à acheter un logement, en particulier dans les zones urbaines où les prix des logements peuvent être élevés. Ainsi, l’apport personnel peut constituer un premier obstacle majeur à l’accession à la propriété. Dans bon nombre de cas, les parents ou d’autres membres de la famille peuvent contribuer à cet apport et se portent souvent garants pour le prêt si les revenus ou le dossier de crédit sont insuffisants pour obtenir un prêt hypothécaire. La copropriété est également courante, la famille investissant dans le logement non seulement en tant que lieu de vie, mais aussi en tant que moyen d’épargne. Il est d’ailleurs assez courant en Chine d’offrir de l’argent à l’acquéreur par le biais des fameuses enveloppes rouges. 

En Chine, l’intérêt collectif prévaut sur l’individu. En Europe occidentale et aux États-Unis, l’individu est souvent prioritaire, mais cette tendance commence à changer par nécessité au sein des familles. Ici, la génération du baby-boom vit dans des logements dont l’hypothèque est largement, sinon entièrement remboursée, ce qui signifie que beaucoup de capitaux propres sont immobilisés dans le bien immobilier. Pour la première fois dans l’histoire, cela permet à des groupes plus larges au sein de la société d’acquérir un logement avec le soutien financier des parents. Aux Pays-Bas, cela a même été encouragé fiscalement pendant un certain temps par le biais de la mesure fiscale surnommée « jubelton » (NdlR : exonération de la donation pour achat d’un logement). Aux États-Unis également, il apparaît que les parents aident de plus en plus leurs enfants à acquérir un logement. Le fait que le nombre d’enfants par famille soit en baisse depuis des années n’y est pas étranger. Il y a donc encore un potentiel de hausse pour les prix de l’immobilier.

Dans la plupart des pays, les prix de l’immobilier ont récemment atteint un étiage. La baisse des prix de l’immobilier était une conséquence directe de la hausse des taux d’intérêt. Cependant, le recul mondial des prix de l’immobilier s’est révélé, dans l’ensemble, beaucoup moins prononcé que prévu. Fitch révise maintenant ses estimations, suggérant une hausse de 6 % des prix nominaux aux États-Unis l’an dernier, contre une prévision initiale de 5 % de contraction. Au Royaume-Uni, une contraction plus modérée de 2 % est maintenant prévue pour 2023, alors que l’estimation initiale pouvait atteindre 7 %. Dans certaines économies, dont les États-Unis, l’Australie et le Royaume-Uni, autant de pays dans lesquels les parents et le reste de la famille disposent d’un capital immobilier relativement élevé grâce aux fortes hausses de prix survenues dans le passé, le marché a finalement bien mieux résisté que prévu. 

Alors que ces pratiques, qui rappellent celles observées en Chine, se sont largement répandues en Europe occidentale et aux États-Unis, le marché immobilier chinois est en difficulté depuis trois ans. Cette situation résulte de la politique de Xi Jinping, qui, convaincu que les logements sont faits pour être habités, pas pour spéculer , a effectivement verrouillé le marché immobilier chinois. La nouvelle politique chinoise a eu un impact immédiat sur les promoteurs immobiliers, entraînant la faillite de certains grands acteurs ayant bénéficié d’un financement important. Cette situation exerce bien sûr une pression considérable sur l’économie chinoise, car le secteur du bâtiment et tous les produits et services associés à la construction et à l’aménagement de logements représentent jusqu’à 15 % de l’économie chinoise. Face à cette perte d’activité, il est remarquable que la Chine ait tout de même réussi à poursuivre son développement, notamment en devenant le premier exportateur mondial de voitures électriques et en acquérant une position de quasi-monopole dans les secteurs des cellules solaires et des éoliennes. Dernièrement, des mesures de plus en plus nombreuses ont cependant été prises afin de relancer le marché immobilier chinois. Celles-ci finiront par porter leurs fruits, notamment parce que des millions de Chinois continueront de migrer de la campagne vers les villes dans les années à venir.

En plus de l’apport financier familial comme nouveau facteur influant sur l’évolution des prix de l’immobilier, un pic des taux d’intérêt a été observé à la fin de l’année passée. De plus, les salaires augmentent. Pendant longtemps, la croissance salariale est restée inférieure à l’inflation, mais la baisse rapide de cette dernière s’est traduite par une augmentation effective du revenu disponible, facilitant ainsi l’acquisition d’un logement. À l’heure actuelle, la hausse des prix de l’immobilier engendre des retombées positives sur la prospérité et renforce la confiance des consommateurs. Cependant, des prix immobiliers élevés rendent également l’économie vulnérable. De plus, il est regrettable qu’autant de capital soit immobilisé sur le marché immobilier. Des prix immobiliers plus élevés se traduisent également par des charges de logement plus élevées et un endettement plus important, autant d’argent qui pourrait être alloué de manière plus judicieuse. Ici également, le logement est encore souvent perçu comme un objet d’épargne ou d’investissement, ce qui n’est pas justifié. Sur ce point, Xi a tout à fait raison en déclarant que les logements sont faits pour être habités, et pas pour spéculer. Les propriétaires voient uniquement le gain potentiel sur leur logement actuel, mais celui qui vend sa maison a généralement besoin d’en acquérir une nouvelle. De plus, il n’existe pas de véritable marché immobilier aux Pays-Bas. En théorie, des prix plus élevés devraient entraîner une augmentation de l’offre, mais c’est plutôt l’inverse qui se produit. 94 000 logements avaient été construits en 1995, un chiffre tombé à 60 000 en 2003. L’année dernière, ce chiffre était remonté avec beaucoup de difficultés à 73 000, alors que parallèlement, la population des Pays-Bas a augmenté de 1,7 million d’habitants en vingt ans. Trop d’intervenants (constructeurs, promoteurs, municipalités) tirent avantage de prix immobiliers élevés. Pour eux, la hausse des prix de l’immobilier constitue un incitatif à construire moins, afin de s’assurer des bénéfices futurs encore plus élevés. C’est aussi une des raisons pour lesquelles les prix de l’immobilier augmentent.

Han Dieperink est directeur de la stratégie d’investissement chez Auréus Vermogensbeheer. Il a auparavant été directeur des investissements chez Rabobank en Schretlen & Co.

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