Les règles et procédures qui régissent un indice peuvent créer un écart entre les performances du marché et ce que les investisseurs dans les fonds indiciels reçoivent réellement. Les gestionnaires de fonds passifs devraient améliorer la due diligence concernant les décisions prises par les promoteurs d’indices.
Selon Dimensional, les promoteurs d’indices prennent de nombreuses décisions actives qui ont des conséquences significatives sur les caractéristiques et les rendements des indices promus. Cela concerne notamment les actions et les pays inclus dans l’indice, mais aussi la manière dont le rééquilibrage est réalisé.
Dans un rapport publié en juillet, Wes Crill, Senior Investment Director chez Dimensional, attire l’attention sur la révision annuelle de l’indice Russell, et en particulier sur l’ajout de Dell. Le fabricant américain d’ordinateurs avait justement été retiré de l’indice lors de la révision de l’année précédente en raison des critères d’admissibilité de l’indice Russell.
Pendant l’année de son exclusion, l’action Dell a réalisé un rendement total cumulé de 177,5 %, soit plus de sept fois celui de l’indice Russell 3000 (24,6 %).
5 % de différence
Dans un rapport publié précédemment, Karen Umland, collègue de Wes Crill, avait déjà mis au jour les choix méthodologiques divergents opérés par les promoteurs d’indices. « Cela peut entraîner des écarts de rendement entre des indices conçus pour cibler la même classe d’actifs », a-t-elle conclu.
Karen Umland a comparé les rendements annuels de trois indices de petites capitalisations américaines au cours des 20 dernières années, jusqu’en 2023. Elle a constaté que l’écart de rendement moyen entre l’indice le plus performant et l’indice le moins performant atteignait près de 5 %, et qu’il pouvait être encore plus marqué certaines années. « En 2009 et en 2021, par exemple, le rendement de l’indice le plus performant dépassait de plus de 10 % celui de l’indice le moins performant. »
Selon le rapport, même les indices conçus pour représenter l’ensemble du marché américain se comportent différemment. L’écart de rendement annuel entre quatre promoteurs d’indices de référence pour l’ensemble du marché américain a varié de 0,2 % à 3,2 % au cours des 20 dernières années, avec un écart moyen de 1 %.
Nombreuses hypothèses
Dimensional n’est pas seule à parvenir à cette conclusion. Il y a quelques années, l’Investment Company Institute (ICI) avait déjà souligné dans un rapport que l’élaboration et la gestion d’un indice reposaient souvent sur « un nombre important d’hypothèses, d’inputs, de règles et de choix méthodologiques ». « Il n’existe pas de méthode unique pour mesurer ou même définir la performance d’un ‘marché’ », déclarait l’association des fonds d’investissement en 2021. « Le promoteur de l’indice doit d’abord déterminer ce qu’il veut mesurer (par exemple, la performance des actions américaines à grande capitalisation), puis trouver un moyen de le faire de manière raisonnable. »
Dès qu’un promoteur d’indices définit un univers d’investissement, il opère des choix actifs, souligne également Karen Umland. Le choix du moment auquel des actions sont ajoutées, retirées, et leur pondération constituent également des décisions actives.
Elle cite en exemple l’inclusion de Tesla dans l’indice S&P 500 : « En janvier 2020, l’action Tesla se négociait autour de 40 dollars, ce qui faisait de l’entreprise approximativement la 60e capitalisation boursière des États-Unis. À ce moment-là, Tesla ne répondait cependant pas encore à tous les critères requis pour intégrer l’indice S&P 500, dont l’exigence de réaliser quatre trimestres consécutifs de bénéfices positifs. »
« Plus tard cette année-là, en novembre, S&P Dow Jones a annoncé que Tesla était désormais éligible et serait intégrée au S&P 500 en décembre », poursuit-elle. « Entre-temps, le cours de l’action Tesla avait augmenté durant l’année 2020. La veille de son inclusion, l’action Tesla valait environ 200 dollars, ce qui en faisait la sixième plus grande capitalisation boursière des États-Unis. Le fait d’avoir manqué la performance de Tesla pendant la majeure partie de l’année 2020 a pénalisé le rendement de l’indice S&P 500 cette année-là, par rapport à d’autres indices américains de grandes capitalisations qui incluaient déjà l’action, comme l’indice Russell 1000. »
Selon la chercheuse de Dimensional, l’exemple de Tesla illustre comment les différences entre les méthodologies des indices peuvent avoir un impact sur les rendements, de manière comparable aux décisions de sélection d’actions prises par les gestionnaires actifs.
Changement d’indice
Une étude récente de Morningstar sur les conséquences du changement d’indice de référence par un fonds indiciel corrobore ces conclusions. Le comparateur de fonds indique qu’un quart des 1200 fonds indiciels étudiés ont changé d’indice de référence au moins une fois. Ce qui est particulièrement intéressant pour la question soulevée par Dimensional, c’est que Morningstar a calculé les erreurs de suivi entre les anciens et les nouveaux indices sur une période de cinq ans.
Pour une majorité de fonds, ces erreurs de suivi restent limitées à 3 %, mais un nombre significatif de fonds enregistre des taux plus élevés, dépassant parfois même les 10 %. Cela concerne principalement les petits fonds. Les grands fonds changent parfois d’indice de référence, mais selon Morningstar, le nouvel indice conserve alors « la plupart » des règles de l’ancien.
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