Wim Van Hyfte, Candriam
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Les grandes entreprises énergétiques comme ExxonMobil et Shell investissent bien trop peu dans les énergies renouvelables. Elles mettent ainsi leur propre avenir en danger car les services publics, eux, ont bien compris leur intérêt, comme l’explique Wim Van Hyfte, chef de la recherche et des investissements responsables de Candriam.

« Pourquoi utilisons-nous les carburants fossiles ? Dans les grandes lignes, ce sont les transports, l’industrie pétrochimique et la production d’électricité qui sont concernés », déclare Wim Van Hyfte.  

« Une part importante des activités des entreprises énergétiques est destinée aux services publics. Si ces derniers se tournent massivement vers les énergies renouvelables, une tendance qui a d’ores et déjà commencé à se dessiner, alors les entreprises énergétiques auront un très gros problème. Une bonne partie de leurs réserves de pétrole et de gaz pourront s’en trouver dépréciées. » 

Ce processus s’accélérera lorsque l’Union européenne fixera les prix du CO2, ce qui devrait se produire au cours de la décennie à venir. Le prix des carburants fossiles augmentera alors et « les services publics diront rapidement qu’ils n’en ont plus du tout besoin ». 

Dans le cadre de l’accord de Paris sur le climat, le charbon est de toute façon voué à disparaître selon Van Hyfte, et le pétrole, en particulier celui de mauvaise qualité ou aux coûts d’extraction élevés, n’a pas non plus d’avenir à terme. 

Le gaz constitue encore, selon lui, un point d’interrogation sur le long terme, mais reste indubitablement important à court terme, entre autres pour la stabilité du réseau électrique. 

La raison qui pousse encore les entreprises énergétiques à investir des milliards d’euros dans l’extraction d’énergies fossiles reste les bénéfices élevés qu’elles prévoient de réaliser sur des stocks récemment découverts. Elles mentionnent à cet égard l’augmentation de la population mondiale et de la prospérité, qui accroîtra la demande en pétrole. 

« Je pense qu’on sous-estime largement l’innovation en matière d’énergie renouvelable, et Candriam ne partage pas les scénarios mis en avant par Exxon, par exemple, et par l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Les prévisions de l’AIE sont revues à la baisse chaque année, tandis que la tendance du renouvelable est revue à la hausse tous les ans. Ce scénario ne fera que s’accélérer. »  

En outre, dès que la pollution sera prise en compte dans la fixation des prix des carburants fossiles, les bénéfices qui y sont liés diminueront d’eux‑mêmes. 

Les grandes entreprises énergétiques jettent donc leur argent par les fenêtres, ce que déplore Van Hyfte, car ce sont justement ces entreprises qui, avec leurs énormes ressources, sont en mesure de conditionner significativement la transition énergétique. 

« Elles le comprennent bien et communiquent à ce sujet, mais y investissent encore bien trop peu. Nous devons donc exercer davantage de pression afin qu’elles consacrent un budget plus important aux énergies renouvelables. » 

L’argument avancé par les entreprises énergétiques, qui est la présence d’encore trop peu de possibilités d’investissement rentables, est balayé d’une main par le spécialiste du durable. « Il existe de nombreuses possibilités. Et même les parcs à éoliennes parviennent à se gérer sans subventions. » 

Pour le moment, Candriam s’expose peu aux grands géants énergétiques. « Nous ne sommes pas pour l’exclusion de ces entreprises, car le monde ne peut pas encore s’en passer. Si on exclut le fossile, on exclut en même temps 80 % du renouvelable. Nous donnons simplement notre préférence à des services publics qui ont déjà sérieusement entamé leur passage au renouvelable. » 

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