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La masse monétaire sur le marché diminue rapidement, et l’inflation baisse plus vite que prévu. Le mot déflation apparaît de plus en plus fréquemment dans les médias financiers. Les gestionnaires d’actifs ne sont pas encore impressionnés. « Malgré les risques, l’inflation restera à un niveau élevé frustrant. »

Toutes les prévisions d’inflation de l’année dernière se sont avérées vaines, y compris celles des banques centrales. Actuellement, l’inflation diminue plus rapidement que les analystes ne le prévoyaient. Les dernières données sur l’inflation, celles de l’Allemagne, ne font pas exception.

L’inflation dans la plus grande économie d’Europe a chuté à 9,6 % en glissement annuel en décembre. Ce chiffre est nettement inférieur au pic de 11,6 % atteint en octobre, et inférieur aux 10,7 % que les économistes avaient précédemment prévus. Les économistes se sont également trompés de 0,4 % en France, où l’inflation s’est établie à 6,7 % en décembre.

Les grands sites d’informations financières comme Yahoo Finance abreuvent déjà leurs lecteurs de listes des actions les mieux protégées contre la déflation. Bien que contraires au consensus, les prédictions de déflation ne sortent pas de nulle part. En particulier, la baisse exceptionnelle des liquidités pourrait exercer l’année prochaine une pression déflationniste aiguë et persistante.

Selon Daniel Ivascyn, group CIO chez PIMCO, une grande incertitude est apparue quant à la structure du marché et aux liquidités disponibles. « Par rapport au passé, il y a de moins en moins de liquidités sur le marché. Des surprises peuvent survenir, comme nous l’avons vu sur le marché LDI (Liability Driven Investment) au Royaume-Uni », déclare Ivascyn en réaction à l’annonce du resserrement monétaire de la BCE.

Baisse des liquidités

Pour la première fois en 28 ans, la masse monétaire a diminué en novembre. En fait, entre avril 2020 et avril 2021, la masse monétaire aux États-Unis a même souvent augmenté de plus de 35 % en glissement annuel pour s’affaiblir rapidement par la suite. En novembre 2022, la croissance annualisée de la masse monétaire s’établissait à -0,28 %. C’est moins qu’en octobre (2,59 %) et moins qu’en novembre 2021 (6,66 %).

Une croissance monétaire négative est mauvaise pour la croissance économique et pour l’emploi, et soulève des questions sur la faisabilité de l’‘atterrissage en douceur’ visé par les banques centrales dans la lutte contre l’inflation. Lorsque la masse monétaire augmente plus lentement ou même se réduit, cela peut entraîner une baisse du niveau général des prix : la déflation.

M3 Usa and Eurozone

Habituellement, les baisses des taux d’intérêt et les assouplissements quantitatifs constituent les principaux ingrédients de l’approche des banques centrales pour réduire la pression déflationniste, mais l’Europe en particulier semble se diriger vers une politique opposée.

Après ses dernières réunions, la BCE a clairement indiqué son intention de combler l’écart de taux d’intérêt avec la Fed. L’assouplissement quantitatif va faire place à un cycle de resserrement et on s’attend maintenant à ce que la première phase d’arrêt progressif des réinvestissements de l’Asset Purchase Programme (APP, Programme d’achats actifs) s’élève à partir de mars à environ 50 % des titres arrivant à échéance.

Pimco, la plus grande société d’obligations au monde, prévoit cependant, ‘tout comme d’autres sociétés de fonds’, que bien que la masse monétaire diminue et que l’inflation baisse, « celle-ci va rester à un niveau élevé frustrant », déclare Ivascyn. La recherche scientifique montre que les baisses rapides de l’inflation sont en effet l’exception plutôt que la règle.

Une baisse rapide de l’inflation se produit rarement

Le rapport History Lessons: How “Transitory” Is Inflation? de la société d’investissement américaine Research Affiliates montre qu› « une fois que le génie de l’inflation est sorti de la bouteille, le retour à un niveau normal peut prendre beaucoup plus de temps que la plupart des gens ne l’imaginent », déclare Rob Arnott, auteur de l’étude publiée le mois dernier.

« Le retour à une inflation de 3 %, que nous considérons comme la limite supérieure d’une inflation bénigne durable, est facile à partir de 4 %, difficile à partir de 6 % et très difficile à partir de 8 % ou davantage. Au-delà de 8 %, le retour à un niveau d’inflation de 3 % prend généralement de 6 à 20 ans, avec une médiane de plus de 10 ans. »

Une méta-analyse de 2013 basée sur 67 études publiées sur l’inflation mondiale et la politique monétaire révèle que dans 198 cas de relèvement des taux directeurs de 1 % ou davantage, une baisse de 1 % de l’inflation dans les économies développées n’a été atteinte qu’entre deux et quatre ans environ, explique Arnott.

Inflation

Ou bien l’inflation deviendra-t-elle récalcitrante ? L’inflation existe depuis des millénaires et peut presque toujours être réduite à une forte augmentation de la masse monétaire. « Pour les gouvernements, c’est le paradis », commence Sam Adams, Chief Investment Officer chez Truncus, basée à Zele. « C’était déjà le cas à l’époque romaine, même s’il n’y avait alors pas encore de banques centrales. À l’époque, on ‘coupait’ l’argent en réduisant la teneur en argent des pièces, et la monnaie perdait donc de sa valeur sans que les gens ne s’en rendent compte. »

Adams fait une analogie avec l’époque actuelle, durant laquelle la population commence à prendre conscience de son appauvrissement et il devient progressivement évident que les banques centrales et les gouvernements ne peuvent plus maîtriser la situation. « Dans le système de Bretton Woods, l’argent était garanti par l’or, mais ce système a été abandonné en 1971 », déclare Adams. 

« Lorsque la vitesse de circulation de la monnaie commence à augmenter de manière exponentielle, le génie sort de la bouteille. La situation suscite de nombreuses comparaisons avec les années 70, durant lesquelles beaucoup d’argent a été créé pour financer la guerre du Vietnam. En 1973, il y a eu un choc d’offre après que l’OPEP ait imposé un embargo pétrolier aux pays qui avaient soutenu Israël dans la guerre du Kippour, suivi par un deuxième choc d’offre en 1979 après une baisse de la production pétrolière due à la révolution iranienne. Volcker a dû porter les taux d’intérêt à 20 % au début des années 80 pour juguler une inflation de 15 %, ce qui a provoqué une forte récession. »

Cela rappelle bien sûr la situation actuelle. L’inflation a commencé à augmenter à partir de 2020 en raison des chocs d’offre causés par la pandémie et la guerre en Ukraine, combinés à l’augmentation de la vitesse de circulation de la monnaie une fois que la population s’est mise à dépenser l’argent de la pandémie distribué.

 

 

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