En Europe, de plus en plus d’investisseurs optent pour le développement durable, ce qui va de pair avec la popularité croissante des indices ESG. Cela affecte-t-il les indices traditionnels ?
Le fait que les indices durables gagnent en notoriété et en importance se traduit par l’augmentation rapide du nombre d’exchange traded funds (ETF) durables. Selon les chiffres récents du cabinet de recherche ETFGI, ces suiveurs d’indices verts gèrent aujourd’hui près de 25 milliards de dollars au niveau mondial. Cela ne représente encore qu’une fraction du capital total investi dans les ETF traditionnels, mais la croissance est très rapide, confirme Deborah Yang, responsable des indices ESG chez le créateur d’indices MSCI.
« Les assureurs et les fonds de pension sont à l’origine de cette tendance, mais on constate en Europe que les petits investisseurs souhaitent désormais investir eux aussi de manière plus durable », explique Yang lors d’un entretien avec Fondsnieuws. « Beaucoup de nos clients nous disent qu’ils veulent prendre davantage de mesures plus rapidement. »
Tout d’abord, cela signifie que plus d’argent sera investi dans des spin-offs vertes d’indices traditionnels tels que le MSCI World, le MSCI Emerging Markets ou le S&P 500. Les variantes d’indices durables sont reconnaissables à des termes tels qu’ESG (environmental, social and corporate governance) ou ISR (investissement socialement responsable). Les grands investisseurs peuvent composer leur propre panier d’indices durables, mais un indice durable déjà connu a plus de poids auprès des parties prenantes.
Un large front opte pour la durabilité
La vague durable ne concerne pas seulement les ETF et autres produits indiciels. Les fonds d’investissement actifs, les fonds mandatés et les portefeuilles d’investissement institutionnels font également la transition vers une forme d’investissement plus durable. À cet égard, certains vont un peu plus loin que d’autres. Cependant, Yang déclare : « De plus en plus de fonds de pension et assureurs intègrent l’ESG dans l’ensemble de leur processus d’investissement. Il va sans dire qu’ils choisissent également un benchmark qui reflète bien cette réalité. » En conséquence, les indices durables serviront également plus souvent de référence, estime Yang.
Le MSCI World SRI et le MSCI World ESG Leaders sont des indices MSCI durables bien connus, mais il en existe beaucoup d’autres. « Sur nos 700 indices, environ 120 ont maintenant une approche durable », explique Yang.
L’éventail varie de l’exclusion des armes controversées à des exclusions de grande portée et une sélection stricte basée sur un score ESG. L’utilisation de ces indices augmente rapidement : « Les revenus de notre gamme d’indices ESG – ce qui concerne notamment les licences d’utilisation – augmentent d’environ 50 % par an », déclare Yang.
Critères stricts
L’un des titulaires de licence est le gestionnaire d’actifs français Amundi, qui travaille sur une série d’ETF durables. À la fin de l’année dernière, nous avons lancé une série qui correspond à l’indice le plus durable de MSCI, le MSCI World SRI », déclare Gert-Jan Verhagen, responsable ETF, Indexing & Smart Beta chez Amundi au Benelux. « Nous aurions pu choisir un indice moins durable, comme l’ESG Leaders, mais nous avons opté pour les critères les plus stricts car nous constatons que les clients s’orientent de plus en plus sur cette voie. »
Chez Amundi, tous les ETF font d’ailleurs désormais l’objet d’un screening durable, basé sur leur propre méthodologie de notation ESG, explique Verhagen. « Ce faisant, nous n’allons pas aussi loin que notre nouvelle gamme ISR. L’investissement durable ne signifie pas la même chose pour tous nos clients, et nécessite un important travail de personnalisation. Mais on peut dire qu’une grande partie des actifs que nous gérons, tant activement que passivement, ont désormais une approche durable. »
Selon Verhagen, savoir quel benchmark durable utiliser pour leur portefeuille investi de manière durable est une décision difficile à prendre pour les grands investisseurs, tels que les fonds de pension. « Un indice de durabilité important et bien connu, assorti de critères de sélection stricts, génère la confiance si vous devez rendre des comptes à des parties prenantes. Mais vous êtes alors lié aux critères de cet indice ; vous perdez la flexibilité d’appliquer votre propre politique ESG. En effet, si vous suivez néanmoins votre propre cap, cela peut conduire à une grosse erreur de suivi. »
Durable versus traditionnel
Ni Yang ni Verhagen ne pensent que l’avènement rapide des indices durables a un effet négatif sur les indices traditionnels. Verhagen : « On pourrait s’attendre à ce que si l’on investit davantage dans des ETF durables, cela se fasse au détriment des capitaux alloués à un indice traditionnel. Cependant, nous avons affaire à deux mouvements forts : la croissance des investissements durables et celle des investissements indiciels dans leur ensemble. Le passage de l’actif au passif est encore loin d’être terminé. » Il y a encore beaucoup d’argent d’investissement qui afflue vers des indices larges et plus liquides pondérés par capitalisation boursière », explique également Yang.
Selon Yang, l’émergence d’indices durables en tant que benchmark pour les investisseurs institutionnels n’entraînera pas la mise à l’écart des indices traditionnels.
Yang : « Un indice large et traditionnel reflète toujours l’univers d’investissement potentiel des investisseurs mondiaux. Cela ne change pas. Vous pouvez ensuite appliquer toutes sortes de restrictions ESG au portefeuille, mais à titre de référence, vous voulez encore savoir ce qu’a fait le marché au sens large.»
« Vous voyez alors l’impact de la décision d’investir de manière plus durable, pour ainsi dire. Un indice durable est ensuite un excellent indicateur de ses propres compétences ESG, y compris en termes de responsabilité vis-à-vis des parties prenantes. De nos jours, les consultants utilisent les deux types d’indicateurs pour évaluer un gestionnaire d’actifs.