Peter De Coensel
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Aujourd’hui, les obligations sont systématiquement présentées comme une alternative d’investissement à part entière, ce qui n’était plus arrivé depuis longtemps. Et qui de mieux pour parler des obligations que Peter De Coensel ? CEO du gestionnaire de patrimoine Degroof Petercam Asset Management (DPAM) depuis 2021, il a précédemment occupé pendant de nombreuses années le poste de gestionnaire de fonds spécialisé dans les marchés obligataires.

Peter De Coensel souligne d’emblée que les marchés obligataires sont passés d’une valorisation extrêmement chère à bon marché, ce qui nous ramène environ 20 ans plus tôt. Selon lui, ce mouvement s’est déroulé en trois phases. « Tout d’abord, fin 2020, les anticipations d’inflation ont commencé à augmenter. Puis, à partir de mars 2022, la Réserve fédérale a lancé la machine et, avec une hausse sans précédent de 525 points de base, nous a exposés à un aplatissement baissier agressif de la courbe des taux. Au cours des deux ou trois derniers mois, nous avons observé une phase de stabilisation avec un ancrage des taux à court terme, mais une augmentation des taux à long terme en raison de l’inquiétude croissante liée aux déficits budgétaires persistants aux États-Unis et dans l’Union européenne. Cependant, on sent aujourd’hui que les indicateurs économiques ralentissent. »

Pour l’ancien gestionnaire obligataire, nous nous trouvons actuellement en pleine phase de consolidation des taux d’intérêt et le marché obligataire présente de nombreuses similitudes avec celui des années 90. En tant qu’ancien teneur de marché en obligations d’État, il constate que les « bond vigilantes » sont de retour et n’hésitent pas à rappeler aux gouvernements l’importance de leur politique budgétaire. « Un seul mauvais rapport peut déjà entraîner une hausse des taux d’intérêt à long terme. » Il estime toutefois que le segment court de la courbe des taux semble solidement ancré. « Nous vivons une période où la plupart des obligations d’État, des titres investment grade et des titres à haut rendement bénéficient d’un portage positif : chaque mois, vous pouvez actuellement cumuler un portage de 35 à 45 points de base avec un portefeuille de crédit solide, et cela continue de s’accumuler chaque mois », souligne-t-il.  

Un marché obligataire sain

Pour le CEO de DPAM, nous nous trouvons aux prémices d’un marché obligataire sain. « Contrairement aux actions, les obligations sont des contrats. Par conséquent, si vous souhaitez verrouiller la valeur de manière contractuelle, c’est le moment de le faire. Ce qui est attractif, c’est lorsque vous obtenez entre 4,5 et 5 % sur les obligations IG en Europe et que vous y ajoutez le risque lié au dollar, vous pouvez obtenir 6,5 % aux États-Unis. Si vous passez ensuite au haut rendement, vous pouvez actuellement y ajouter environ 2 %. Et peut-être qu’après une ou deux faillites éventuelles dans votre portefeuille, vous obtiendrez encore un rendement de 7 à 9 % en Europe et aux États-Unis, respectivement. » 

Peter De Coensel souligne également que certains acteurs du marché chercheront naturellement à tester qui est le maillon faible. « Sur le marché des obligations d’État, ces moments ne manqueront pas de se produire. Mais au bout du compte, nous nous attendons à ce que la volatilité générale finisse par retomber : cela se produit généralement lorsque les taux directeurs ont atteint leur pic. Cette stabilisation des marchés obligataires devrait avoir lieu en 2024. »  

Favoriser la diversification

« Je continue de penser que les obligations constituent une excellente diversification. Aujourd’hui, on constate cependant beaucoup d’incertitude chez les investisseurs car nombre d’entre eux ont connu une véritable traversée du désert en ce qui concerne les obligations au cours des dix dernières années », déclare Peter De Coensel. Pour lui, une grande diversification géographique au sein des titres à revenu fixe est essentielle. « Nous jouons pleinement la carte de la diversification depuis des années et examinons également la dette des marchés émergents en monnaie locale, par exemple. Historiquement, les marchés émergents ont un niveau d’endettement plus faible. En fait, si la politique monétaire de l’Occident devait rester restrictive pendant plus longtemps, avec des taux d’intérêt élevés sur une période prolongée, la situation financière deviendrait plus précaire dans les pays de l’OCDE que sur les marchés émergents solides. » 

Et qu’en est-il des tensions géopolitiques, qui sont tout de même assez fortes actuellement ? « Les conflits ont toujours existé, mais les tensions actuelles ont pris une autre dimension avec une fragmentation accrue et la collaboration de certains pays du Sud. Le centre de gravité se déplacera davantage vers l’Est et le Sud, et moins vers l’Ouest », souligne Peter De Coensel. Cependant, il ajoute un message important : en raison de cette fragmentation et de l’incertitude géopolitique, qui persistera selon lui pendant de nombreuses années encore, les investisseurs devront se diversifier davantage à l’échelle mondiale, et en particulier dans le domaine des titres à revenu fixe. « En effet, la situation des taux d’intérêt en Chine est différente de celle aux États-Unis, en Inde, au Brésil, etc. Il faudra donc toujours partir d’une bonne analyse de la situation des taux d’intérêt et rechercher les secteurs et régions susceptibles d’offrir de la valeur. »

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