Quaestor est peu connu du grand public. Ce gestionnaire de patrimoine basé à Roulers a discrètement développé une offre d’investissement axée sur les obligations privées et le capital-investissement. L’entreprise gère plus de 2 milliards d’euros et compte plus de 30 collaborateurs. « Nous préférons rester sous le radar, sans doute en raison de notre modestie typique de la Flandre occidentale » déclare Philippe Vanmarcke, cofondateur de Quaestor.
Ce qui a débuté il y a 25 ans comme une société de gestion d’actifs traditionnelle est aujourd’hui un gestionnaire multi-actifs et un acteur de premier plan sur le marché du capital-investissement. « Nous nous adressons à une clientèle fortunée et proposons des opportunités d’investissements aussi bien privés que publics. »
Un intérêt financier direct
Outre un fonds obligataire, Quaestor propose trois fonds d’actions : un fonds mixte dynamique, un fonds d’actions et un fonds RDT destiné aux entreprises. Quaestor trace également sa propre voie dans le domaine du capital-investissement. « Nous restons indépendants et recherchons des initiatives intéressantes et de grande envergure dans ce secteur. En regroupant nos investissements, nous pouvons participer en tant qu’entité unique. L’année dernière, nous avons ainsi réalisé un investissement majeur chez Waterland. L’investissement minimum y est généralement compris entre 10 à 20 millions d’euros par investisseur. Nous regroupons cette somme pour nos clients, ce qui leur permet d’accéder à des marchés qui leur seraient sinon inaccessibles. »
Philippe Vanmarcke et ses associés co-investissent eux-mêmes dans les projets. « Nous ne sommes pas des banquiers, mais des entrepreneurs. Nous avons un intérêt financier direct, et c’est ce qui nous différencie des banques traditionnelles. J’ai récemment discuté avec un collaborateur d’une grande banque, qui m’a expliqué qu’il devait servir plus de 500 clients avec seulement trois ou quatre produits standardisés. Chez Quaestor, nous procédons différemment. Nous travaillons sur mesure, avec une offre unique pour chaque client. »
2,5 millions d’euros
Chez Quaestor, le seuil d’entrée pour les clients est fixé à 2,5 millions d’euros. « C’est vraiment le minimum absolu. Nous avions initialement un seuil d’entrée de 1 million d’euros, mais nous l’avons relevé. C’est la seule façon de garantir une bonne diversification dans un portefeuille de capital-investissement. » Philippe Vanmarcke s’étonne de l’approche de certaines autres banques. « Je vois de grandes banques abaisser leur seuil minimum de 1 million à 250 000 euros. Je me demande alors dans quelle mesure la banque privée peut encore être qualifiée de « privée ». Les clients de Quaestor sont généralement des entrepreneurs prospères qui ont vendu leur entreprise, ainsi que des professions libérales et des sportifs de haut niveau. »
Aucun salaire
En 2000, Philippe Vanmarcke travaillait chez KBC Private Banking lorsqu’il a décidé, avec quatre collègues, de fonder Quaestor. « Certains d’entre nous avaient grandi dans un environnement entrepreneurial. L’idée de créer notre propre entreprise a germé lors de discussions du vendredi soir, autour d’un verre. J’ai toujours su que je deviendrais entrepreneur. Si ce n’avait pas été Quaestor, cela aurait été un autre projet. »
Pour beaucoup, cela aurait été un pas infranchissable. « Je ne l’ai pas ressenti comme un obstacle. L’une des principales raisons était que nous étions cinq à nous lancer. Nous partagions les bénéfices – s’il y en avait – mais aussi les soucis. Nous étions tous dans la trentaine. C’est vrai, nous avons laissé derrière nous un salaire confortable et une voiture de société, mais nous pouvions compter sur le soutien total de nos partenaires et de nos familles. Nous savions que pendant les six premiers mois, nous ne toucherions aucun salaire et que nous n’aurions aucune sécurité. »
Sur son lit de mort
« In the end, we only regret the chances we didn’t take », peut-on lire sur la photo de profil Facebook de Philippe Vanmarcke. « Cette citation résume bien ma philosophie de vie. Les opportunités se présentent et il faut les saisir. C’est ce que je dis toujours à mes enfants. Il faut évaluer les opportunités, puis décider si on se lance ou non. En cas d’échec, on aura au moins essayé. Ma plus grande peur serait de me retrouver sur mon lit de mort en me disant : « Pourquoi je ne l’ai pas fait ? ». Ma devise est donc la suivante : fonce. Si ça ne fonctionne pas, il y aura toujours des gens autour de toi pour te soutenir. »
Parler d’argent avec ses enfants
Philippe Vanmarcke a un fils et une fille, respectivement âgés de 29 et 27 ans. « Je discute ouvertement des questions d’argent avec eux. Ils sont parfaitement au courant de notre situation financière. Ils ont tous deux une formation médicale et ne s’intéressent donc pas particulièrement aux marchés financiers. Parfois, je trouve ça dommage, car la finance occupe une place importante dans ma vie. Mais ils sont heureux et bien ancrés dans leur parcours de vie, et c’est le plus important. Je suis également content qu’à leur âge, ils ne soient pas entièrement focalisés sur l’argent. »
Triathlons
Bien que la finance ne soit pas un centre d’intérêt commun, Philippe Vanmarcke et ses enfants partagent une véritable passion pour le sport. L’été dernier, il a participé pour la quatrième fois à l’Ironman de Tallinn avec son fils, et il a également couru plusieurs marathons avec sa fille.
« Le sport est très important pour moi. À 38 ans, j’ai perdu mon père, décédé d’un cancer du poumon. Il fumait énormément et cela a été un véritable signal d’alarme pour moi. J’ai arrêté de fumer et je me suis mis à la course à pied. Je me suis inscrit à un club de marathon et j’ai couru les marathons de Londres, Berlin, Boston, Chicago et New York. Depuis, il y en a eu beaucoup d’autres. Le sport est vraiment devenu essentiel. Les longues courses d’endurance et les randonnées à vélo m’aident vraiment à me vider l’esprit. »
Beaucoup d’entraînement
La préparation d’un Ironman est extrêmement exigeante. « De janvier à août dernier, j’ai consacré environ 400 heures à l’entraînement. Cela représente en moyenne 12 heures par semaine, avec des pointes pouvant atteindre 20 heures durant les semaines précédant la course. Pour moi, cela signifie me lever tôt, parfois dès quatre ou cinq heures du matin. Je m’entraîne également souvent pendant la pause lunch, ici chez Quaestor. »
De même, Philippe Vanmarcke s’entraîne souvent après le travail. « Il n’est pas rare que je rentre d’un rendez-vous client à vingt-deux heures et que je parte encore courir encore pendant une heure. J’ai la chance de ne pas avoir besoin de beaucoup de sommeil et de récupérer rapidement après l’effort. Mais cela reste un équilibre délicat. Il faut concilier travail, famille et sport. Ma famille est toujours soulagée quand l’Ironman est terminé ! » s’exclame-t-il en riant.
Et le prochain défi ? « En avril prochain, je participerai au Marathon des Sables. C’est l’un des ultramarathons les plus difficiles et les plus beaux du monde. Il s’agit de parcourir 260 kilomètres à travers le Maroc, répartis sur six jours. C’est vraiment une expérience incontournable sur ma liste de souhaits. »
S’arrêter à 16 heures
Quaestor gère aujourd’hui plus de 2 milliards d’euros, mais cela n’a pas été sans sacrifices. « Comme les autres associés, j’ai toujours travaillé très dur. Les 10 à 15 premières années de Quaestor ont été particulièrement intenses. Mes enfants étaient encore petits, et j’étais souvent absent tard le soir pour rendre visite à des clients ou participer à des événements de réseautage. Leur mère a été formidable durant cette période, elle a toujours été présente pour eux. »
Philippe Vanmarcke reconnaît qu’il a manqué de nombreux moments importants durant cette période. « On ne peut pas quitter une banque pour créer sa propre entreprise et s’arrêter tous les jours à 16h pour aller se promener au bord de la mer avec ses enfants. Chaque choix a des conséquences. Aujourd’hui, mes enfants ont 27 et 29 ans, et nous pouvons passer du temps ensemble. Cela ne change pas le passé, mais c’est d’autant plus précieux de pouvoir être présent pour eux maintenant. J’apprécie énormément ces moments. »