L’industrie des fonds d’investissement suit en permanence les mises à jour, directives et nouvelles réglementations. Les modifications les plus récentes concernent la DGFIA ainsi qu’une explication de l’AEMF quant à la manière dont le concept de durabilité doit être appliqué dans la réglementation.
AIFMD 2.0
Le 6 novembre 2023, le Conseil de l’Union européenne a publié le texte définitif des modifications de la Directive sur les gestionnaires de fonds d’investissement alternatifs (DGFIA). Bien que le texte ait pour but de modifier la DGFIA plutôt que de créer une directive entièrement nouvelle, la directive modifiée est connue sous le nom de DGFIA 2.0.
Des modifications sont également apportées à la directive sur les organismes de placement collectif en valeurs mobilières (directive OPCVM). Compte tenu de l’ampleur des modifications apportées à la DGFIA et des limitations dans l’espace de la colonne, nous présentons certains nouveaux développements, mais sans analyse plus approfondie.
La Commission européenne constate que la DGFIA a atteint son objectif principal, assurer un niveau élevé de protection des investisseurs et préserver la stabilité financière. L’objectif des modifications (comme indiqué dans les considérants de la proposition) est l’harmonisation des règles pour les fonds d’investissement alternatifs octroyant des prêts, une clarification des règles d’externalisation, l’amélioration de l’accès transfrontalier aux services de dépôt et la facilitation de l’utilisation d’outils de gestion de la liquidité.
La directive actuelle semble présenter des lacunes sur tous ces points. Les prochaines modifications dans le cadre de la DGFIA 2.0 semblent plutôt constituer une ‘évolution qu’une révolution’ des règles, ce qui est très probablement conforme à la tentative de la Commission européenne de permettre une transition en douceur du marché vers le nouveau et futur régime (modifié).
L’AEMF concernant la durabilité
L’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) continue de se pencher sur les questions de durabilité. Le 22 novembre 2023, l’AEMF a publié le document ‘Concepts of sustainable investments and environmentally sustainable activities in the EU Sustainable Finance framework’, dans lequel le concept de durabilité est expliqué tel qu’il doit être utilisé dans le cadre de la finance durable (FD) de l’UE. Le document examine et compare le concept de durabilité dans le cadre du règlement sur la taxonomie de l’UE (RT) et de la Sustainable Finance Disclosure Directive (SFRD, règlement sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers). De plus, à la même date, l’AEMF a publié le document ‘Do No Significant Harm (DNSH) definitions and criteria across the EU sustainable Finance Framework’.
En bref :
En ce qui concerne la taxonomie de l’UE, ce règlement définit l’investissement durable comme « un investissement dans une ou plusieurs activités économiques qualifiées d’écologiquement durables ». Un investissement durable est ‘conforme à la taxonomie’ si :
- il contribue de manière substantielle à la réalisation d’un ou plusieurs des six objectifs environnementaux énoncés à l’article 3 du règlement sur la taxonomie (RT) ;
- il ne cause de préjudice important à aucun de ces objectifs environnementaux ;
- il est réalisé dans le respect de garanties minimales ; et
- il répond aux critères de screening technique (TSC) énoncés dans le règlement sur la taxonomie (RT).
En ce qui concerne la DGFIA, ce règlement définit le terme ‘investissement durable’ comme étant :
- un investissement dans une activité économique contribuant à un objectif environnemental ou social ;
- un investissement qui ne cause pas de préjudice important aux objectifs environnementaux ou sociaux ; et
- un investissement dans des entreprises ayant de bonnes pratiques de gouvernance, notamment en ce qui concerne les structures de gestion, les relations avec les employés, la rémunération du personnel et le respect de la législation fiscale.
Si l’on examine les critères des investissements durables aussi bien dans le règlement sur la taxonomie (RT) que dans la DGFIA, il apparaît que les définitions et les concepts ne sont pas totalement alignés, ce qui soulève la question de la ratio legis sous-jacente.
En ce qui concerne la question de savoir qui doit maintenant appliquer la taxonomie (‘écologiquement durable’), le règlement sur la taxonomie (RT) concerne les sociétés financières et non financières (dans le cadre des obligations de reporting non financier), tandis que le champ d’application de la DGFIA est limité aux seuls acteurs du marché financier.
En ce qui concerne les critères d’application et de divulgation du concept d’investissement durable, les critères de screening technique (CST) du règlement sur la taxonomie (RT) comprennent des critères spécifiques liés aux secteurs et étayés scientifiquement, tandis que la DGFIA ne définit pas de critères, seuils ou objectifs spécifiques pour l’évaluation des investissements durables (à l’exception des exigences de divulgation spécifiques prévues aux articles 8 et 9 du règlement).
Il en va plus ou moins de même pour le concept de ‘contribution substantielle’ et les principes du concept ‘Do No Significant Harm’ (DNSH, ne cause pas de préjudice important). Les critères de screening technique (CST) du règlement sur la taxonomie (RT) font référence à des objectifs et seuils (ou exigences) spécifiques, tandis que le cadre de la DGFIA ne prescrit pas de tels objectifs et seuils spécifiques, mais indique plutôt que les investissements durables doivent au moins satisfaire à trois critères de l’article 2, paragraphe 17, de la DGFIA, à savoir la contribution, le principe DNSH et la bonne gouvernance.
En ce qui concerne le principe DNSH, la principale remarque est que dans le règlement sur la taxonomie (RT), le principe DNSH s’applique au niveau de l’activité économique, tandis que la DGFIA a introduit ce principe au niveau des investissements, c’est-à-dire comme l’un des trois éléments pour l’évaluation des investissements durables, comprenant également une évaluation de l’impact environnemental et social global du produit financier.
Tom Loonen est professeur de droit financier à l’Université d’Amsterdam et special counsel chez Pinsent Masons Pays-Bas. Jan Saalfrank est associé spécialisé dans les fonds d’investissement chez Pinsent Masons Luxembourg. Lous Vervuurt est avocat chez Pinsent Masons Pays-Bas et conseille les clients en matière de réglementation financière et de respect de la réglementation relative à la lutte contre le blanchiment d’argent. Le cabinet d’avocats est un partenaire de connaissance d’Investment Officer.