« En moyenne, les holdings surperforment le marché au sens large. Nous avons cherché à savoir si cela était dû au talent ou à la chance, et avons ainsi découvert quels facteurs sont déterminants pour ce succès », explique Joren Van Aken, analyste chez Degroof Petercam.
Les analystes se sont inspirés du livre de Michael Mauboussin intitulé ‘The success equation’. L’auteur soutient que les résultats de toutes les activités dans la vie, qu’il s’agisse du sport, des jeux de hasard, de l’entreprenariat ou de l’investissement, sont déterminés par le talent ou la chance. « Nous savions que les holdings surperforment à long terme. L’approche de notre rapport consistait à déterminer si nous pouvions attribuer la performance au talent ou à la chance. »
À cette fin, la croissance de la Net Asset Value (NAV, valeur liquidative) du portefeuille d’investissement a été utilisée comme indicateur de talent. « En effet, cette variable est le résultat direct des décisions d’investissement. » Comme équivalent pour le facteur chance, les changements dans la décote des holdings ont été utilisés. « Ceux-ci sont déterminés par divers facteurs, mais dépendent largement du sentiment, qui est irrationnel.
Sofina en est un bon exemple. Au début, l’euphorie régnait autour de l’action et celle-ci était cotée avec une prime. Par la suite, le sentiment s’est inversé et Sofina est aujourd’hui cotée avec une forte décote. »
C’est ainsi que les chercheurs sont parvenus à leur première conclusion. « Le talent s’est avéré clairement décisif. En effet, la quasi-totalité du rendement de cours des holdings étudiés s’explique par la croissance de la valeur liquidative », souligne Joren Van Aken. La décote avec laquelle les holdings sont cotés ne semble pas avoir d’impact à long terme sur le rendement.
Décotes et bonnes affaires
D’où vient alors l’attention particulière accordée à cette décote ? Joren Van Aken met en évidence une erreur de raisonnement typique. « Les gens pensent souvent qu’une forte décote est bon marché et qu’une décote plus faible est chère. On peut comparer cela aux soldes dans un magasin : les clients voient de fortes réductions et pensent faire une bonne affaire. Mais pour les holdings, ce n’est pas nécessairement le cas », souligne-t-il avec insistance. Joren Van Aken conseille donc aux investisseurs de ne pas se focaliser aveuglément sur la décote. « Une forte décote est souvent un mauvais signe et indique qu’il y a plus à prendre en considération. Si l’on examine les performances, on constate qu’il aurait été plus judicieux d’acheter les holdings avec une décote moins importante. Investor AB et Investment AB Latour font ainsi partie des holdings les plus performants d’Europe, alors qu’ils ont généralement une faible décote. »
Cela nous amène à un autre élément favori des investisseurs : le rachat d’actions propres. « Les share buybacks sont fondamentalement une bonne option. L’idée sous-jacente est qu’une entreprise fait savoir au marché qu’elle est cotée trop bon marché. Mais dans la pratique, nous constatons que ce signal positif ne fonctionne souvent qu’une seule fois. »
Joren Van Aken souligne que le rachat d’actions propres n’est donc pas nécessairement une mauvaise chose. Tout dépend de l’objectif qui sous-tend ces programmes. « Les rachats d’actions ne contribuent pas à réduire la décote. Si les holdings le font dans le cadre d’une logique d’investissement, c’est différent, par exemple si le management ne voit que peu d’opportunités d’investissement, ou des opportunités de qualité insuffisante. Mais s’il existe d’autres possibilités d’ajouter de la valeur à long terme, nous donnons la préférence aux investissements en portefeuille. »
Les backtests et les études peuvent fournir des informations intéressantes, mais que peut-on appliquer dans la pratique ? Joren Van Aken explique que lors de la sélection, les investisseurs doivent d’abord se concentrer sur les holdings dont la croissance de la valeur liquidative constitue la priorité numéro un. « Des holdings comme Exor et Investor AB le démontrent clairement. » Deuxièmement, les investisseurs ne doivent pas se fixer aveuglément sur l’évolution du cours. « Celle-ci est influencée par la décote et donne donc une image faussée. L’évolution de la valeur liquidative constitue la boussole des investisseurs en holdings. Prenons l’exemple de Sofina. Le cours de l’action a chuté d’environ 50 %, alors que la baisse de la valeur liquidative se situait entre 10 et 20 %. »
Troisièmement, l’allocation d’actifs doit être examinée de près. « Le management effectue-t-il de bons investissements ou bien l’argent est-il utilisé pour des share buybacks ? » La quatrième et dernière étape consiste à examiner le portefeuille sous-jacent. « Les investisseurs doivent se demander ce qui rend le portefeuille unique. A-t-il une ‘moat’ ou une ‘barrier to entry’ spécifiques ? Pour certains holdings, on peut acheter la majorité des positions sur le marché boursier. D’autres, comme Sofina et Brederode, offrent via des réseaux uniques un accès au capital-investissement auxquels les investisseurs ordinaires n’ont pas accès.