L’ambitieux projet de Retail Investment Strategy (RIS) européenne est menacé. Le vote à ce sujet a été reporté, ce qui pourrait entraîner un retard de plusieurs années.
La commission des Affaires économiques du Parlement européen devait se prononcer en février sur les propositions de la Commission européenne visant à améliorer l’accès des investisseurs particuliers aux marchés des capitaux. Cependant, ce vote a été reporté à fin mars, car le dossier est complexe et il faut faire traduire une longue série de nouveaux amendements dans toutes les langues officielles de l’UE. Par conséquent, il est loin d’être certain que l’approbation finale de la RIS puisse avoir lieu avant les prochaines élections européennes. Pour le Parlement, il s’agira d’une course contre la montre : si le feu vert n’est pas donné en avril, il ne pourra l’être avant la fin de la législature actuelle.
Politiquement sensible
La Retail Investment Strategy vise à améliorer l’accès des investisseurs particuliers aux marchés des capitaux européens. À cette fin, les commissions pourraient être interdites, selon plusieurs variantes. Stéphanie Yon-Courtin, eurodéputée libérale française et coordinatrice de ce dossier brûlant, a reconnu que le dossier était ‘politiquement sensible’, mais souligné qu’il s’agissait d’une priorité absolue pour la présidence belge de l’UE au cours du premier semestre de cette année.
Stéphanie Yon-Courtin reste optimiste : « Comme nous avions besoin de davantage de temps pour les traductions, j’ai décidé, l’an dernier, de revoir le calendrier afin de garantir une marge suffisante pour les négociations. Ce dossier est crucial tant pour le Parlement européen que pour la présidence belge. Il a le potentiel de changer radicalement la vie quotidienne de nos citoyens, en particulier dans les domaines de l’épargne et de l’investissement. C’est précisément pour cette raison qu’il est si chargé politiquement. »
Les critiques expriment des doutes
Cependant, les Cassandre doutent de sa capacité à parvenir à un accord avant le mois d’avril. « Certains points controversés ont mis des bâtons dans les roues des parties prenantes dès le départ », déclare Peter Norwood de FinanceWatch, un groupe d’activistes qui défend les intérêts financiers des consommateurs. En particulier, l’interdiction partielle des inducements et des clauses value-for-money freine les progrès.
Arnaud Houdmont, de Better Finance, un groupe de pression européen représentant les investisseurs, craint qu’aucun vote en séance plénière ne soit tenu avant les élections. « Le report à fin mars augure d’importants défis pour Stéphanie Yon-Courtin. Il n’y a actuellement aucune perspective d’accord. »
Avec les élections du Parlement européen prévues du 6 au 9 juin 2024 et seulement deux sessions plénières en avril, il s’agira d’une véritable course contre la montre. Si le paquet de mesures RIS n’est pas approuvé d’ici là, la proposition initiale sera écartée. Seule une nouvelle Commission européenne pourra alors lancer une nouvelle proposition, ce qui pourrait prendre des années.
Des éléments cruciaux supprimés
En octobre, Stéphanie Yon-Courtin a supprimé des éléments cruciaux des propositions de la Commission européenne, tels que le concept de value-for-money et l’interdiction partielle des inducements, déjà introduite aux Pays-Bas et au Royaume-Uni il y a quelques années. Peter Norwood doute qu’un accord puisse être trouvé avant les élections européennes, même si un consensus a été atteint en commission en janvier.
Arnaud Houdmont voit quant à lui une lueur d’espoir : le report pourrait jouer en faveur des consommateurs. « Sous la pression, une stratégie édulcorée pourrait émerger, qui maintiendrait le statu quo. Cela favoriserait principalement les intérêts d’un petit groupe influent. » Selon lui, une version diluée de la stratégie n’apportera que peu d’avantages aux investisseurs et aux épargnants.