Après être restées dans l’ombre pendant des années, les obligations des marchés émergents libellées en devises locales figurent parmi les fleurons de la sphère obligataire en 2023.
Grâce aux rendements élevés des marchés émergents, les obligations en devises locales forment une catégorie de placement intéressante depuis le début de l’année. Les investisseurs professionnels ont tout particulièrement jeté leur dévolu sur les devises et obligations d’Amérique latine. Comme pour de nombreux marchés développés, l’inflation et la politique monétaire jouent un rôle dans cette décision.
Le Brésil, notamment, recueille désormais les fruits de son intervention musclée pour brider l’inflation. La Banco Central do Brasil avait en effet été l’une des premières à relever son taux directeur, alors de 2 %, en 2021. Début août, elle a toutefois annoncé qu’elle allait abaisser ce dernier de 50 points de base, à 13,25 % (le taux s’établit désormais même à 12,75 %). D’autres pays d’Amérique latine se distinguent aussi, même si l’Argentine, comme souvent, reste un cas à part.
Argentine
Les élections présidentielles du 22 octobre 2023 se sont tenues dans un contexte d’inflation extrêmement élevée. 40 % des Argentins vivent désormais sous le seuil de pauvreté et les économistes mettent en garde contre un scénario d’hyperinflation, alors que l’un des candidats entend faire fonctionner la planche à billets sans aucune limite. Ces mesures rendraient encore plus difficile le respect de l’accord avec le FMI, qui a accordé un prêt en juillet. Le désintérêt des investisseurs pour le pays n’a dès lors rien d’étonnant.
Chine
À la différence du reste du monde, l’Asie n’est pas taraudée par l’inflation. Au contraire même : Beijing s’inquiète désormais d’une possible déflation. Économistes et journalistes tirent même un parallèle avec la période déflationniste qu’a connue le Japon après l’éclatement de la bulle immobilière et boursière. Sans grand succès, les politiciens multiplient les efforts pour encourager la croissance et redonner confiance aux consommateurs, alors que le secteur immobilier, qui représente près du quart de l’activité économique en Chine, est dans la tourmente.
Le retour de l’optimisme ?
Entre 2012 et 2021, surtout, la catégorie Morningstar des obligations des marchés émergents en devise locale a sous-performé. Ces fonds n’ont, en moyenne, généré qu’un rendement annuel de 1,1 %, alors que l’indice large Bloomberg Global Aggregate en euros a gagné 3,1 %. En 2022, la catégorie a moins reculé que les obligations internationales, et la tendance s’est prolongée en 2023 : en moyenne, les fonds ont progressé de 5 % sur les neuf premiers mois de l’année, alors que le Bloomberg Global Aggregate reculait de 1,4%.
La récente surperformance s’explique par deux grands facteurs : tout d’abord, une politique budgétaire moins expansionniste pendant la pandémie, associée à l’intervention précoce des banques centrales afin de lutter contre l’inflation et, ensuite, le revenu plus élevé issu de ces obligations, ainsi que la baisse récente des taux, qui étaye le rendement total.
Le top 5
Le top 5 de cette semaine passe en revue les fonds investissant dans des obligations des marchés émergents en devise locale (et pour lesquels des données de portefeuille récentes sont disponibles), sur la base de leurs performances sur les neuf premiers mois de 2023.
C’est un tracker qui occupe la plus haute marche du podium : l’ETF PIMCO Emerging Markets Advantage Local Bond Index UCITS réplique un indice pondéré sur la base du PIB et non par le marché, comme de coutume. L’exposition à chaque pays ne peut dépasser 15 % et la notation minimale est BB-. Ce choix a été fait parce que les marchés pondérés par le marché font souvent la part belle aux pays plus endettés. Fin septembre, le portefeuille affichait une duration effective de 5,1 années et son rendement à l’échéance estimé était de 7,6 %. En termes de devises, la plus importante exposition revenait au Brésil (15 %), à l’Inde (14,4 %), à la Chine (13,6 %), au Mexique (13,3 %) et à l’Indonésie (11 %).
Le top 5 inclut également le fonds d’obligations des marchés émergents de Capital Group, qui s’est vu attribuer par les analystes de Morningstar une notation supérieure à la moyenne sur les piliers People et Process. La stratégie est actuellement gérée par trois personnes très expérimentées : Kirstie Spence, Robert Neithart et Luis de Oliveria. Le deuxième prendra toutefois bientôt sa pension. En moyenne, les trois gérants peuvent se targuer de trente années d’expérience, dont 28 chez Capital Group. Les gérants ne cherchent pas de consensus : ils sont chacun responsables de la gestion d’un tiers du portefeuille environ. Depuis le 1er octobre 2023, la majorité du portefeuille de Robert Neithart est géré par les sept analystes qui composent l’équipe de Capital Group.
Le processus associe des perspectives macroéconomiques top-down à une analyse fondamentale bottom-up. La grande majorité de l’encours est investie dans des obligations en devise locale, mais les gérants ont la latitude de s’affranchir quelque peu de l’indice. La duration du portefeuille, qui mesure sa sensibilité aux taux, peut diverger d’un an par rapport à celle de l’indice JPM GBI-EM Global Diversified. L’équipe mise surtout sur la sélection géographique pour ajouter de la valeur.