Stefan Duchateau
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L’accélération de la chute des cours des actions aux États-Unis s’est traduite par le bond de géant de 75 points de base effectué par le taux directeur américain pour tenter d’endiguer l’inflation galopante. Le fait que la banque centrale va effectivement procéder à ce relèvement inédit a été confirmé dans l’intervalle après la réunion du FOMC du 15 juin.

La série totale des relèvements successifs des taux d’intérêt à court terme ne se terminerait, selon la prévision la plus récente, qu’à la mi-2023 au niveau de 3,25 % à 3,5 %. Le mouvement haussier serait ainsi plus agressif qu’on l’avait anticipé dans un premier temps. Il implique, après le méga-bond en juin, des relèvements de 0,75 % en juillet, de 50 points de base en septembre et novembre, complétés ensuite par des augmentations de 25 points de base en décembre et, sans doute également, en février et mars 2023.

D’autres resserrements de la politique monétaire seront-ils encore nécessaires par la suite ? Tout dépendra de l’évaluation qui sera effectuée à mi-parcours. Actuellement, on l’estime peu probable, mais rien n’est exclu. Si le taux directeur passe le cap de 3,5 %, nous entrerions en tout cas dans la zone d’une politique monétaire restrictive, ce qui déclencherait immanquablement une récession. Il y a peu de temps, le scénario était encore que la Fed infléchirait sa politique expansionniste actuelle pour adopter une politique neutre.

Ces dernières semaines, les marchés avaient certes déjà intégré une augmentation de 0,75 % dans leur scénario relatif aux taux, mais ils ne l’anticipaient qu’à la fin juillet. En définitive, ce relèvement d’une ampleur exceptionnelle n’intervient donc que 6 semaines plus tôt que prévu. En soi, cela n’a rien de dramatique, parce que la Fed avait déjà pris du retard dans sa réponse au dérapage des chiffres de l’inflation, l’obligeant ainsi à s’engager résolument dans un mouvement de rattrapage. 

Graphique 1 : Évolution prévue du taux directeur américain

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Mais le relèvement additionnel (attendu) du taux directeur de 25 points de base en juin a été le coup de trop et a provoqué une onde de choc sur les marchés boursiers, alarmés de voir ainsi augmenter la probabilité de réalisation du scénario le plus craint : une inflation qu’on ne parvient pas à faire refluer (à temps), alors que les resserrements additionnels de la politique monétaire sont de nature à ralentir considérablement la croissance économique. Trop est vraiment te veel. 

La perspective d’une telle évolution économique défavorable pèse lourdement sur le sentiment boursier et fait entrer les indices d’actions aux États-Unis dans une phase de correction. Les reculs prononcés des cours boursiers, surtout vendredi et lundi derniers, ont surtout visé les entreprises de croissance. 

Le signal le plus négatif est venu des marchés obligataires : le taux d’intérêt des obligations à long terme a continué à progresser, malgré le risque accru d’une récession économique. Cette incohérence traduit une fébrilité accrue des marchés, mais également le manque de confiance à l’égard de la banque centrale américaine. 

Du côté de la zone euro, les taux progressent même encore plus fortement en raison de la résistance limitée qu’offre la BCE à l’inflation. Jeudi dernier, la banque centrale européenne a annoncé qu’elle relèverait son taux directeur dans la zone euro (en juillet seulement) et mettrait fin (un peu plus rapidement que prévu) à son programme de soutien des obligations. Cependant, le relèvement inattendu et substantiel du taux directeur de la Banque nationale suisse le 16 juin augmente sensiblement la pression haussière sur les taux d’intérêt à court terme de la zone euro. En tout cas, le solide relèvement du taux directeur suisse alimente (encore plus) la méfiance à l’égard de la politique anti-inflationniste de la BCE.   

Graphique 2 : Évolution des taux d’intérêt à long terme aux États-Unis et dans la zone euro

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Mais le relèvement additionnel (attendu) du taux directeur de 25 points de base en juin a été le coup de trop et a provoqué une onde de choc sur les marchés boursiers, alarmés de voir ainsi augmenter la probabilité de réalisation du scénario le plus craint : une inflation qu’on ne parvient pas à faire refluer (à temps), alors que les resserrements additionnels de la politique monétaire sont de nature à ralentir considérablement la croissance économique. Trop est vraiment te veel. 

La perspective d’une telle évolution économique défavorable pèse lourdement sur le sentiment boursier et fait entrer les indices d’actions aux États-Unis dans une phase de correction. Les reculs prononcés des cours boursiers, surtout vendredi et lundi derniers, ont surtout visé les entreprises de croissance. 

Le signal le plus négatif est venu des marchés obligataires : le taux d’intérêt des obligations à long terme a continué à progresser, malgré le risque accru d’une récession économique. Cette incohérence traduit une fébrilité accrue des marchés, mais également le manque de confiance à l’égard de la banque centrale américaine. 

Du côté de la zone euro, les taux progressent même encore plus fortement en raison de la résistance limitée qu’offre la BCE à l’inflation. Jeudi dernier, la banque centrale européenne a annoncé qu’elle relèverait son taux directeur dans la zone euro (en juillet seulement) et mettrait fin (un peu plus rapidement que prévu) à son programme de soutien des obligations.

Cependant, le relèvement inattendu et substantiel du taux directeur de la Banque nationale suisse le 16 juin augmente sensiblement la pression haussière sur les taux d’intérêt à court terme de la zone euro. En tout cas, le solide relèvement du taux directeur suisse alimente (encore plus) la méfiance à l’égard de la politique anti-inflationniste de la BCE.

Graphique 3 : Évolution de l’inflation de base aux États-Unis (CPI, CPE et inflation attendue à 5 ans) 

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Il faut surtout s’intéresser à l’inflation CPE, qui sert de guide à la Fed pour sa politique monétaire. Ce chiffre plus modéré ne sera publié, malheureusement, qu’à la fin du mois. Là aussi, la tendance des chiffres de base semble orientée à la baisse.  Si une politique efficace contre l’inflation reste une absolue nécessité, elle doit cependant nous épargner des électrochocs intempestifs, susceptibles de provoquer des dégâts économiques inutiles. 

Il va de soi que nous tablons à terme sur un redressement des cours des actions. Dans une perspective de long terme, chaque recul se profile comme une opportunité, une fois les obstacles surmontés. 

Mais il est manifeste que nous n’en sommes pas encore là. Pour y arriver, les exportations alimentaires de l’Ukraine doivent rapidement monter en puissance. Le problème concerne surtout le blé. Les autres produits agricoles (comme l’huile de tournesol, le maïs et le soja) sont désormais transportés en grande partie par le rail, la route et la navigation fluviale.

Graphique 4 : Évolution des prix alimentaires (en USD

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Les prix pétroliers doivent refluer. La pression haussière est en réalité surtout provoquée par l’effet pervers (prévisible) des sanctions occidentales sur les importations de pétrole russe. Elles créent une pénurie artificielle et poussent ainsi les prix à des niveaux records, sans provoquer pour autant de baisse de la demande de pétrole. 

Entre-temps, la Russie exporte plus de pétrole vers l’Europe qu’avant l’invasion, et cela à un prix (beaucoup) plus élevé… Au Kremlin, on s’en frotte les mains. Une levée de ces sanctions ferait retomber le prix de l’énergie à des niveaux inférieurs et on frapperait finalement beaucoup plus durement le portefeuille de l’ennemi que ce n’est le cas actuellement. Il en va d’ailleurs de même pour les engrais et fertilisants. Le contraste est frappant : de nombreuses matières premières moins exposées aux sanctions cotent à présent à des prix sensiblement plus bas qu’avant l’invasion. 

Graphique 5 : Évolution des prix des matières premières depuis l’invasion

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Pour l’heure, nous restons légèrement sous-pondérés en actions, en conservant notre accent sur les entreprises américaines. Mais nous sommes conscients du fait que nous devons nous attendre à un deuxième trimestre difficile en termes de résultats d’entreprises. 

Entre-temps, la bourse chinoise semble vouloir être la première à se redresser, après une période très difficile marquée par des mesures anti-COVID qui ont entravé durement l’activité des principales régions économiques. À présent, les confinements les plus stricts sont levés progressivement. Si bien que la Chine est (avec la Russie…) à peu près la seule zone économique où les taux d’intérêt diminuent. 

Graphique 6 : Évolution de plusieurs bourses mondiales depuis l’invasion militaire. 

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Sur les marchés obligataires, on se souviendra encore longtemps des évolutions des mois récents. Une telle progression des taux d’intérêt à long terme ne s’était encore jamais produite dans le passé. Elle a ainsi provoqué des pertes (beaucoup) plus lourdes que celles intervenues durant les débâcles de 1994 ou 1981. 

Le pire de ces relèvements des taux d’intérêt est sans doute derrière nous. Il sera donc intéressant de compléter progressivement nos positions obligataires fortement sous-pondérées (depuis longtemps) avec des obligations d’État qui offrent à présent une rémunération beaucoup plus élevée. Mais nous nous garderons bien d’aller plus vite que la musique.

This is not the beginning of the end, but perhaps the end of the beginning… 

Faites preuve de patience, évitez les réactions de panique et veillez à conserver une bonne diversification dans votre portefeuille d’investissement adapté à votre profil.  Profitez du beau temps à venir. Rien de tel pour oublier un peu les pertes passagères. Et si cela ne suffit pas, délectez-vous à nouveau de la vidéo de la visite récente de l’Ours Paddington à la Reine d’Angleterre.

Stefan Duchateau enseigne l’investissement. Il est également consultant indépendant et expert en connaissances chez Investment Officer.

 

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