Rebecca Chesworth, SFDR
Rebecca Chesworth, State Street SPDR ETFs

On observe cette année un fort afflux net dans les ETF d’actions européens. Bien que ce soit, à court terme, l’actualité qui influence le marché, les investisseurs se tiennent prêts à étoffer leurs positions. Cet afflux est particulièrement notable dans la finance et l’industrie.

Lors d’un entretien avec Investment Officer, mi février, Rebecca Chesworth, stratège en actions chez State Street SPDR ETFs, a expliqué qu’après des années de sous-performance, le marché boursier européen a pris, cette année, un bien meilleur départ que Wall Street. L’allocation régionale au niveau des ETF confirme en outre le regain de popularité du Vieux Continent auprès des investisseurs. Au mois de janvier, ce sont 2,6 milliards de dollars nets qui ont été investis dans les ETF actions européens, selon les chiffres de State Street sur les ETF cotés en Europe.

Ces deux derniers mois, dans l’ensemble, le flux était encore négatif. « Nous avons cependant vu un rebond des afflux après l’investiture de Donald Trump », indique Rebecca Chesworth. « Le nouveau président a immédiatement annoncé des droits à l’importation sur les produits issus du Mexique et du Canada, mais l’Europe est passée entre les mailles du filet, ce qui a rassuré les investisseurs. Il en faut peu pour éveiller de nouveau l’intérêt des investisseurs institutionnels en Europe. Les actions européennes sont bon marché et largement sous-représentées dans les portefeuilles d’investissement. »

Cases à cocher

Le président Donald Trump a beau menacer d’imposer rapidement des droits à l’importation pour l’Union européenne également, la tendance positive se poursuit. Entre le 1er janvier et le 14 février, l’afflux net s’est élevé à 6,7 milliards de dollars. Pourtant, Rebecca Chesworth n’ose pas encore parler d’une réelle rupture. « À vrai dire, les investisseurs institutionnels ont une liste de cases que l’Europe doit cocher avant qu’ils allouent structurellement plus d’argent à la région. »

Ainsi, la situation politique incertaine de certains pays européens suscite quelques craintes. Selon Rebecca Chesworth, néanmoins, les résultats positifs des élections en Allemagne pourraient atténuer ces inquiétudes. Un autre point délicat est la faiblesse de l’économie. « Si l’Allemagne joue un rôle stimulateur plus important, la croissance pourra reprendre en Europe, surtout si la situation s’améliore de nouveau en Chine. En outre, la fin de la guerre en Ukraine ne pourra qu’être favorable au sentiment sur le marché boursier européen. »

Enfin, certains problèmes structurels en Europe effraient les investisseurs ; c’est notamment le cas de la réglementation complexe, qui affecte sa compétitivité. Rebecca Chesworth estime malheureusement que ces problèmes ne devraient pas disparaître de sitôt. « Dans l’ensemble, le tableau n’est pas encore tout à fait positif en Europe ; on ne peut donc pas, pour l’heure, parler d’un redressement durable du sentiment. Mais comme nous l’avons dit, la région est si bon marché et sous-pondérée que de bonnes nouvelles pourraient accélérer les afflux; ce serait notamment le cas si une solution était trouvée pour le conflit en Ukraine. »

À l’inverse, de mauvaises nouvelles concernant les droits américains à l’importation pourraient rapidement entraîner des prises de bénéfices en Europe, craint Rebecca Chesworth. Elle prédit cependant un avenir radieux aux actions européennes sur le long terme. « Pendant les six prochains mois, de nombreux investisseurs vont revenir en Europe et utiliser les corrections des cours pour étoffer leurs positions. »

Les banques en vogue

Au mois de janvier, les flux financiers sont allés tant vers de grands indices boursiers comme le MSCI Europe que vers l’Euro Stoxx 50. On constate cependant une préférence marquée pour l’Europe continentale, le Royaume-Uni étant jusqu’à présent confronté à des flux sortants en 2025. Du point de vue sectoriel, on note surtout un fort afflux dans la finance, tant en Europe qu’aux États-Unis.

« L’un des moteurs de ces hausses du cours des actions bancaires européennes est la consolidation prévue en Europe. Les banques sont tout simplement trop nombreuses et le marché compte sur de nouvelles acquisitions et fusions », explique Rebecca Chesworth. Elle se montre sceptique quant aux fusions bancaires transfrontalières en Union européenne, du fait des risques d’intégration. Elle estime cependant que les possibilités de consolidation interne sont largement suffisantes, dans plusieurs pays, pour que les actions bancaires fassent encore rêver les investisseurs.

La légère amélioration des perspectives économiques en Europe joue également en faveur des banques et autres secteurs cycliques. « La confiance des consommateurs et des entreprises s’améliore prudemment. De plus, les chiffres des entreprises au quatrième trimestre sont, à ce stade, bien meilleurs que prévu. Les analystes revoient leurs estimations bénéficiaires à la hausse, et cela participe à la hausse des cours en Europe », affirme-t-elle.

Deux bonnes surprises plutôt qu’une

La finance n’est pas la seule bonne surprise : les entreprises industrielles ont aussi apporté une bonne nouvelle. Ces deux secteurs, en Europe comme aux États-Unis, se distinguent cette année en matière d’afflux dans les ETF. « Des entreprises européennes comme Siemens et Schneider Electric sont actives dans le monde entier et exposées à des tendances structurelles de croissance telles que la transition énergétique, la hausse des dépenses liées à la défense et la construction de centres de données. Nos échanges avec nos clients nous permettent de constater qu’ils souhaitent en tirer parti. »

L’énergie figure parmi les secteurs où les afflux sont les plus importants. Selon Rebecca Chesworth, ce phénomène est essentiellement dû à la baisse des cours du pétrole, en anticipation notamment d’une possible fin de la guerre en Ukraine et des promesses électorales de Donald Trump, qui compte extraire davantage de pétrole et de gaz et réduire de moitié le prix de l’énergie.

Une autre tendance majeure, aux yeux de la stratège en actions, est la différence de performance entre les petites capitalisations européennes et américaines. Les petites actions américaines montrent une forte surperformance cette année, tandis que le segment européen des petites capitalisations reste en berne. « L’économie européenne en est encore à un stade précoce de sa relance, et les investisseurs attendent la suite des événements pour prendre davantage de risques. Si l’écart de valorisation entre les grandes et les petites capitalisations se creusait trop, cela pourrait vraisemblablement attirer plus d’acheteurs », conclut Rebecca Chesworth.

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