Michael Freilich
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Sous l’impulsion du député Michael Freilich (N-VA), un débat s’engage sur la nécessité de mieux protéger les petits investisseurs et les actionnaires minoritaires à la Bourse de Bruxelles. Les appels se multiplient pour doter l’autorité de surveillance, la FSMA, de moyens renforcés afin d’intervenir lorsque l’actionnaire principal d’une entreprise cotée agit de manière unilatérale.

Du krach des sociétés pharmaceutiques Mithra et Biocartis à la sortie de Bourse de l’armateur Exmar, en passant par les années de conflit entre actionnaires autour de Nyrstar, les drames survenus à la Bourse de Bruxelles, dans lesquels les petits investisseurs se sentent floués et se retrouvent parfois même les mains vides, sont monnaie courante.

Selon le député Michael Freilich, qui s’illustre par son engagement dans les dossiers financiers, cette situation s’explique par le comportement de l’actionnaire majoritaire, souvent une famille d’affaires connue ou un entrepreneur influent qui agit uniquement dans son propre intérêt, mais aussi par une législation belge trop laxiste qui permet de telles pratiques.

« La dynamique entre les administrateurs, les commissaires et les actionnaires est régulièrement défaillante, ce qui nuit à la confiance dans nos marchés financiers. Les actionnaires minoritaires sont souvent victimes de pratiques telles que la manipulation de marché, la tromperie et la fraude », analyse-t-il.

Le déclin de la place bruxelloise

« Les conséquences sociétales de ces pratiques sont considérables. Un exemple concret est la détérioration de la réputation de la Bourse de Bruxelles. Les grands investisseurs institutionnels évitent de plus en plus la Belgique et le nombre d’entreprises cotées diminue d’année en année. Cela crée un cercle vicieux, avec une baisse de liquidité et une érosion continue du marché des capitaux », a-t-il déclaré mardi lors de la commission parlementaire des Finances.

Cette commission parlementaire a approuvé sa proposition d’organiser des auditions sur la question, en accordant une attention particulière à l’autorité de surveillance des marchés, la FSMA. Il est également probable que des organisations représentant les investisseurs individuels puissent s’exprimer.

Michael Freilich espère qu’au terme de ce processus, la Chambre pourra « trouver une solution consensuelle pour protéger les actionnaires minoritaires et rendre la Bourse de Bruxelles à nouveau attrayante ». Selon le député, la mesure la plus évidente serait d’élargir les compétences de la FSMA, le « gardien des marchés financiers ».

Nyrstar, un traumatisme

Kris Vansanten, Managing Partner du cabinet de conseil Quanteus Group, qualifie de « jalon important » l’inscription d’une meilleure protection des actionnaires minoritaires à l’agenda de la Chambre.

Il est l’un des investisseurs activistes impliqués dans l’affaire Nyrstar. En 2019, les actifs stratégiques de cette entreprise belge spécialisée dans le zinc ont été détournés par le négociant en matières premières Trafigura au moyen de manœuvres financières, laissant les petits investisseurs totalement démunis. En 2022, la FSMA a trouvé suffisamment d’éléments à charge pour  transmettre le dossier au parquet.

Mais bien sûr, le mal était déjà fait pour les petits actionnaires. « La FSMA ne pouvait pas intervenir en amont et, par exemple, suspendre la restructuration financière de Nyrstar, car cela ne relève pas de son mandat », explique Kris Vansant, mettant cette faille en lumière.

Lors de la commission parlementaire, Michael Freilich a souligné que la valeur boursière de Nyrstar a plongé de 2 milliards d’euros à 7 millions d’euros à peine aujourd’hui. L’enquête pénale est toujours en cours.

Investisseurs institutionnels

Selon Kris Vansanten, ce ne sont pas seulement les investisseurs particuliers belges, mais aussi les investisseurs institutionnels internationaux qui s’interrogent sérieusement sur le cadre juridique et réglementaire actuel en Belgique. Ces derniers pointent du doigt certaines sorties récentes de la Bourse de Bruxelles, où, grâce à une stratégie soigneusement préparée, l’actionnaire de référence réalise souvent une excellente opération, tandis que les actionnaires minoritaires sont laissés pour compte.

« Le cadre législatif actuel en Belgique représente un risque majeur, tant pour les petits investisseurs particuliers que pour les acteurs institutionnels internationaux détenant une petite participation dans une entreprise belge cotée. En effet, l’actionnaire de référence peut imposer sa volonté beaucoup trop facilement, c’est pourquoi les investisseurs institutionnels, comme les fonds de pension, réfléchissent à deux fois avant de prendre, par exemple, une participation de 1 % dans une entreprise belge cotée », explique-t-il.

« Le fonctionnement actuel de la Bourse de Bruxelles en matière de protection des investisseurs est catastrophique pour la confiance dans ce marché. Un investisseur opportuniste peut exploiter un affaiblissement temporaire de la situation financière d’une entreprise pour servir ses intérêts, sans que les actionnaires minoritaires aient leur mot à dire. »

Trahison nationale

Le fait que le cadre juridique n’a jamais été révisé s’explique, selon lui, par la multiplicité des parties intéressées. Selon Kris Vansante, « il existe tout un écosystème composé de cabinets d’avocats, de consultants et d’agences de relations publiques qui profitent de cette situation. On pourrait qualifier cela de trahison nationale, motivée uniquement par la quête d’honoraires. Le lancement d’un débat public constitue donc une avancée majeure que nous saluons. »

Pour l’heure, la FSMA n’a pas souhaité commenter et attend les auditions parlementaires.

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