L’intelligence artificielle permet un gain d’efficacité significatif dans le recouvrement du prélèvement à la source, mais l’expertise reste cruciale. Ces deux éléments peuvent (et doivent) fonctionner ensemble.
L’IA modifie la façon dont les institutions financières gèrent les informations et traitent les données. Dans le monde complexe du recouvrement du prélèvement à la source*, son attrait est évident. Le processus de recouvrement implique des documents fragmentés, des juridictions multiples et des délais légaux courts. Pour les gestionnaires de fonds dont l’exposition transfrontalière est importante, ces facteurs peuvent rapidement conduire à une perte de valeur cachée.
L’utilité de l’IA
L’IA est un outil idoine pour s’attaquer au volume et à la diversité des données qui ralentissent le processus de recouvrement. La reconnaissance optique de caractères (OCR) permet de traiter en quelques secondes des milliers de documents de clients et de dépositaires, dans des formats qui devaient auparavant être saisis manuellement. Le traitement du langage naturel permet de lire et d’interpréter les clauses des conventions, des certificats ou des notifications des autorités fiscales et de mettre en évidence les points pertinents pour un examen plus approfondi. Cela permet non seulement d’accélérer la préparation, mais aussi de réduire les erreurs types associées au traitement manuel.
L’IA permet également d’améliorer le suivi. Les systèmes automatisés peuvent analyser la jurisprudence mondiale, les changements réglementaires et les modifications apportées aux traités et repérer les évolutions susceptibles d’affecter les portefeuilles. En pratique, cela signifie que les possibilités de recouvrement peuvent être identifiées plus tôt, ce qui réduit le risque qu’elles passent inaperçues. Pour les investisseurs opérant dans plusieurs juridictions, cette intelligence proactive peut aider à transformer le processus de recouvrement d’une tâche réactive en un élément structuré de la gestion de portefeuille.
L’importance de l’expertise humaine
Les gains d’efficacité sont réels, mais les contraintes le sont tout autant. Par exemple, la question de savoir si une Sicav luxembourgeoise peut bénéficier d’une exemption conventionnelle ou comment formuler une réponse complète à la demande d’une autorité fiscale n’est pas tranchée de manière optimale sur la base de grands modèles de langage (LLM) et de leurs résultats probabilistes. Ce sont les résultats déterministes qui sont décisifs. En outre, les délais de réponse aux questions sont souvent très courts et exigent une documentation et un raisonnement précis, étayés et vérifiables.
Dans le secteur, les demandes soumises trop rapidement via des modules d’automatisation standards peuvent être rejetées si les réponses ne respectent pas les exigences procédurales. Lors du recouvrement du prélèvement à la source, le risque de rejet constitue l’une des plus grandes menaces empêchant la préservation de la valeur.
Un modèle appliqué
Un bon exemple de l’intégration efficace de l’IA à l’expertise métier est le développement d’un moteur de maximisation des demandes de recouvrement du prélèvement à la source. Ce système évalue des milliers de scénarios potentiels de recouvrement pour chaque moment de dividende et optimise les résultats grâce à une analyse algorithmique avancée. Les résultats sont ensuite évalués par des personnes. Lorsque l’IA est efficacement combinée à l’intervention humaine, elle peut augmenter la vitesse de traitement tout en maintenant un degré élevé de précision et de contrôle.
La leçon à tirer pour les gestionnaires de fonds
La vraie question n’est pas de savoir si l’IA doit être utilisée, mais comment. Les tâches automatisées, la prévention des erreurs et l’intervention de l’évaluation humaine dans le processus détermineront si cette technologie apporte de réelles améliorations ou si elle ne fait que déplacer le risque. Dans un marché où la gouvernance, les audits et les rapports détaillés sont primordiaux, la transparence du processus est au moins aussi importante que la rapidité.
De mon point de vue, l’IA a déjà changé ce qui était possible en matière de recouvrement du prélèvement à la source. Cependant, tout comme dans l’univers de l’investissement, la technologie révèle son plein potentiel lorsqu’elle accompagne un jugement humain éclairé, plutôt que de le supplanter.
Reuben John est Managing Director DACH, UK & IE chez Wtax, qui fait partie du panel d’experts d’Investment Officer.r.
*Cet article a été rédigé pour nos lecteurs luxembourgeois, mais peut être pertinent pour les lecteurs basés en Belgique ou aux Pays-Bas