Client Key Insights (CKI) est le nom du module d’IA que BNP Paribas Fortis développe spécifiquement pour ses chargés de clientèle en banque privée et en gestion de patrimoine. Il s’ajoute à Yara, le ChatGPT interne pour l’ensemble de la banque.
CKI doit fournir au chargé de clientèle des données internes et externes sur les mouvements des actifs du client. L’application regroupe toutes les interactions du client avec la banque dans une vue d’ensemble, ce qui permet au banquier de prendre rapidement connaissance de la situation financière et de l’évolution des actifs investis. Le client a-t-il appelé le centre d’appel de la banque parce qu’il avait perdu sa carte de crédit ? Est-ce qu’il transfère une grosse somme d’argent à un membre de sa famille ? Ou bien s’est-il renseigné sur les formules de prêt immobilier ? Son banquier privé reçoit alors à chaque fois une alerte à ce sujet.
Événements de liquidité
Mais les banquiers privés sont particulièrement intéressés par les indications sur les événements de liquidité à venir chez le client, tels que la vente d’une entreprise familiale. Le module d’IA analysera donc également des sources externes, telles que les actes notariés publiés au Moniteur belge ou les spéculations sur les offres publiques d’achat dans les médias financiers. Autant de tâches que le banquier privé n’aura plus à accomplir lui-même.
Les alertes sont également utiles pour les moments importants de la vie, tels que les mariages, les décès ou les divorces. En effet, ces moments clés peuvent bouleverser considérablement le patrimoine d’un client, qui peut alors se montrer ouvert à des conseils en investissement. L’intelligence artificielle tentera de détecter ces « moments de vérité » pour chaque client fortuné.
Sur le terrain, tous ces apports de l’IA devraient surtout se traduire par des rendez-vous clients plus productifs grâce à un banquier privé « amélioré ». « Nous laissons l’IA se charger de rassembler les bonnes données avant une conversation entre le banquier privé et un client fortuné. Même après la réunion, l’IA va faciliter le travail du banquier privé, en faisant un rapport et en suggérant des suivis », a expliqué Anthony Belpaire, responsable de l’IA chez BNP Paribas Fortis, lors d’une conférence de presse la semaine dernière.
ABN Amro, qui a présenté la semaine dernière sa stratégie à moyen terme, nourrit des projets similaires. Les deux banques affirment que l’IA réduira la charge de travail administratif de leurs banquiers privés et de leurs gestionnaires de patrimoine, ce qui permettra aux chargés de clientèle de se concentrer pleinement sur l’interaction humaine avec les clients.
À long terme, Client Key Insights devrait également devenir plus proactif, prévoit BNP Paribas Fortis, et même recommander des produits et services spécifiques en fonction du profil du client, que le banquier privé pourra alors proposer immédiatement. L’« optimisation de l’agenda », dans laquelle l’IA ne se contentera pas de recommander le bon moment pour rencontrer le client, mais ajoutera immédiatement des sujets de discussion et contribuera ainsi à établir l’agenda, est toujours en cours d’élaboration.
IA agentique
Après la révolution déclenchée ces dernières années par l’IA générative et notamment ChatGPT, BNP Paribas Fortis se prépare déjà à la phase suivante : l’IA agentique. L’intelligence artificielle sera alors dotée de l’autonomie nécessaire – via des logiciels de connexion tels que les API – pour extraire des données de sources externes et interagir avec d’autres robots d’IA.
« Lorsqu’un entrepreneur demande un prêt, nous avons besoin de son bilan, de son compte de résultat et de son plan financier. S’il y a un agent intégré dans le logiciel de comptabilité du client, il peut être possible d’obtenir ces documents automatiquement », mentionne M. Belpaire à titre d’exemple. « Ces agents peuvent être considérés comme un risque, mais nous les voyons comme une opportunité : ils nous aideront à accélérer les démarches administratives entre la banque et le client. »
Demain, la banque pourrait ne pas interagir avec le client lui-même, mais avec un algorithme travaillant pour le compte du client.
Anthony Belpaire, responsable de l’IA, BNP Paribas Fortis
Selon M. Belpaire, il est tout à fait concevable que, dans un avenir proche, l’IA de la banque dialogue avec l’IA du client. Ou comment la science-fiction de « Matrix » semble peu à peu devenir réalité.
« Demain, la banque pourrait ne pas interagir avec le client lui-même, mais avec un algorithme travaillant pour le compte du client. Nous devons nous préparer à un avenir où les agents agiront au nom du client ou du prospect. »