Les banques centrales ne sont pas les seules à vouloir accroître leur position en or physique : les clients des gestionnaires d’actifs demandent également de plus en plus souvent de l’or en tant qu’investissement. Les tensions géopolitiques, l’incertitude quant à l’inflation et les valorisations élevées des marchés boursiers les poussent à se tourner vers le métal précieux.
Chez ABN Amro, les clients se renseignent plus fréquemment sur l’or en tant qu’investissement depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie et la forte inflation de 2022. Depuis cette même période, des clients ont indiqué à Optimix qu’ils étaient satisfaits de l’importante position en or que le gestionnaire d’actifs détient pour le compte de ses clients. La société de négoce d’or Doijer & Kalff a vu ses achats d’or augmenter de 32 % en un mois au moment de l’invasion russe et continue d’enregistrer des niveaux d’achat plus élevés qu’avant l’invasion.
« Depuis la guerre entre la Russie et l’Ukraine, c’est plutôt l’or qui est à l’honneur », résume Diemer de Vries, chez Optimix. Les tensions géopolitiques alimentent une demande accrue de la part de nos clients. En tant que gestionnaire de portefeuille, Diemer De Vries assure le lien avec les clients.
Chez ABN Amro, l’augmentation de la demande est principalement due à l’image de l’or en tant qu’investissement performant en période de turbulences, explique Thomas Pellegrom, stratège en investissement. Outre la géopolitique, l’inflation et les valorisations élevées des actions, il explique également cet intérêt pour l’or par la situation aux États-Unis.
Diemer De Vries partage le sentiment des clients d’Optimix : « Les clients veulent des investissements sûrs, parce qu’ils ont l’impression de vivre dans un monde chaotique et incertain. Cependant, nous pensons qu’il faut séparer le sentiment de l’aspect technique de l’investissement. »
Position en or
Optimix a développé sa position dans l’or depuis 2018, initialement avec une position d’environ 3 % dans un tracker sur l’or physique. Cette année, le gestionnaire d’actifs a étoffé sa position, qui atteint désormais 6 % sur l’or, à partir de son portefeuille équilibré.
Chez ABN Amro, la demande des clients fortunés existe donc, mais elle n’a, selon Thomas Pellegrom, pas vraiment donné lieu à des investissements réels. Toutefois, ce dernier ne se prononce pas sur la quantité d’or détenue par les clients fortunés ni sur l’évolution en pourcentage de cette quantité.
Doijer & Kalff a constaté un pic dans les achats d’or en février 2022, avec une accalmie les mois suivants. Le même scénario (pic puis accalmie) s’est produit en mars 2023, lorsque les banques américaines ont connu des difficultés.
Les mêmes pics sont observés pour le prix de l’or. En mars 2022, l’once troy (31,1 grammes) a dépassé les 2 000 dollars, avant de repasser légèrement au-dessus des 1 600 dollars en octobre 2022. Aujourd’hui, elle dépasse les 2 400 dollars.
Banques centrales
ABN Amro estime qu’il ne faut pas sous-estimer le rôle des banques centrales dans la fixation du prix de l’or. « Nous constatons que la hausse du prix de l’or s’accompagne d’une augmentation de la demande d’or de la part des banques centrales », déclare Thomas Pellegrom.
Reinoud Bogert, associé chez Doijer & Kalff, affirme également que l’or bénéficie « bien évidemment des importants achats d’or par les banques centrales de l’Est ». Le pourcentage d’or dans les réserves totales des banques centrales de l’Est en particulier est bien inférieur à la moyenne d’il y a 40 ans. Le rattrapage qui s’opère actuellement est impressionnant. Cette tendance s’est amorcée en 2010, et il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. Les banques centrales échangent leurs dollars américains contre de l’or ».
Depuis mai 2023, selon le World Gold Council, toutes les banques centrales confondues achètent plus d’or qu’elles n’en vendent. C’était également le cas entre février 2022 et février 2023. Selon les derniers chiffres de l’association professionnelle de l’industrie aurifère, les banques centrales ont ajouté 1037 tonnes d’or à leurs stocks l’année dernière. En 2022, le chiffre était de 1082 tonnes, un record. Cette année, ce sont surtout la Turquie, la Chine et l’Inde qui achètent beaucoup d’or. Les États-Unis possèdent les plus importantes réserves d’or, avec plus de 8 000 tonnes. Les Pays-Bas sont au dixième rang, avec plus de 600 tonnes.