Tanguy van de Werve, directeur-generaal van Efama.
Tanguy van de Werve, directeur-generaal van Efama.

Depuis des années, le rêve d’un marché financier européen pleinement intégré demeure entravé par la fragmentation, notamment dans le domaine fiscal. Tanguy van de Werve, directeur général de l’European Fund and Asset Management Association (EFAMA), appelle à une action décisive pour remédier à ce problème structurel. Selon lui, l’harmonisation des régimes fiscaux au sein de l’UE ne constitue pas un simple détail, mais une étape cruciale vers un climat d’investissement compétitif en Europe. 

Tanguy van de Werve, directeur général de l’EFAMA depuis 2018, souligne que les barrières fiscales actuelles renforcent le biais national chez les investisseurs européens. Bien que quelques progrès aient été réalisés sur certains points spécifiques, l’absence d’harmonisation fiscale continue d’entraver les investissements transfrontaliers et compromet les objectifs de l’Union des marchés de capitaux (UMC).

Lancé par l’UE en 2015, ce plan ambitieux, qui ne s’est jusqu’ici pas concrétisé, vise à harmoniser les marchés de capitaux. Il se heurte toutefois à des obstacles structurels tels que la fragmentation et le manque de volonté politique. Selon Tanguy van de Werve, l’harmonisation fiscale constitue une condition essentielle pour atteindre effectivement les objectifs de l’UMC.

Une avancée récente encourageante réside dans la directive dite « Faster », conçue pour rationaliser les procédures de retenue à la source dans les États membres de l’UE. Bien qu’il salue cette initiative, Tanguy van de Werve souligne que sa mise en œuvre effective dépend de l’engagement des États membres. « Il ne s’agit que d’une solution partielle. Les États membres doivent maintenant faire preuve de détermination pour accélérer ce processus », ajoute-t-il.

Investissements à long terme

Outre la réforme de la retenue à la source, Tanguy van de Werve plaide pour une approche fiscale plus large visant à encourager les investissements à long terme. Il cite le Fonds européen d’investissement à long terme (ELTIF) comme un exemple concret de l’impact positif des incitations fiscales pour attirer les investisseurs particuliers. Dans des pays comme la France et l’Italie, où des avantages fiscaux sont appliqués, les ELTIF connaissent un succès croissant. En revanche, les Pays-Bas restent à la traîne, précisément en raison de l’absence de telles incitations fiscales.

La récente introduction d’ELTIF 2.0 simplifie désormais l’accès aux investissements alternatifs pour un public plus large. « Il est essentiel de rendre ces fonds attractifs et accessibles aux investisseurs particuliers », déclare Tanguy van de Werve. Cela implique de repenser les modèles de distribution, de renforcer la collaboration entre les gestionnaires d’actifs, ainsi que de déployer des solutions fintech. Il souligne également l’importance de l’éducation financière, indispensable pour aider les petits investisseurs à mieux appréhender les avantages et les risques liés aux investissements à long terme.

Réformer les systèmes de retraite

Tanguy van de Werve souligne le paradoxe entre les taux d’épargne élevés en Europe et le niveau d’investissement relativement faible qui va de pair. Il appelle davantage d’États membres de l’UE à réformer leurs systèmes de retraite, notamment par une adhésion automatique à des plans de pension d’entreprise et la mise en place de systèmes nationaux de suivi des pensions, comme ceux déjà en place aux Pays-Bas et en Belgique. De telles initiatives pourraient inciter les citoyens à assumer une plus grande responsabilité dans la constitution de leur épargne-pension.

Il considère également l’éducation financière comme un pilier fondamental. « Une éducation précoce peut transformer la planification financière en habitude vertueuse », affirme-t-il. En outre, la participation des salariés par le biais de programmes d’actionnariat pourrait également les familiariser avec les avantages de l’investissement, à condition de réduire la complexité administrative.

Promouvoir une culture de l’investissement

Selon Tanguy van de Werve, des pays comme le Danemark, la Suède, les Pays-Bas et le Royaume-Uni ont démontré l’efficacité des incitations fiscales pour modifier les comportements en matière d’investissement. « Vous seriez étonné de constater à quelle vitesse les habitudes culturelles peuvent évoluer lorsque les citoyens bénéficient des incitations appropriées », déclare-t-il. Cependant, la question reste de savoir si les pays lourdement endettés seront disposés à mettre en place de telles incitations fiscales.
L’EFAMA appelle la prochaine Commission européenne et le Parlement européen à promouvoir activement une véritable culture de l’investissement. « Les jeunes générations doivent apprendre à prendre des risques calculés pour assurer leur avenir financier », conclut Tanguy van de Werve.

Les gestionnaires d’actifs européens, quant à eux, risquent de perdre leur position sur la scène mondiale si les problèmes actuels (réglementation stricte, fragmentation du marché, inefficacités opérationnelles…) ne sont pas rapidement résolus. Tanguy van de Werve met en garde contre ces obstacles, qui représentent une menace sérieuse pour la compétitivité du secteur.

Ces limitations ont déjà placé les gestionnaires d’actifs européens dans une position désavantageuse face à leurs concurrents internationaux, notamment américains. 
« Les gestionnaires d’actifs européens ont besoin d’un cadre réglementaire qui leur permette de rivaliser à armes égales », affirme Tanguy van de Werve. Il rappelle que les fonds américains gèrent une part nettement plus importante des investissements, ce qui renforce leur position concurrentielle. Sans réformes rapides et ambitieuses, l’Europe risque de perdre encore davantage de terrain.

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