A billboard promoting an online ETF broker in Cologne. Photo: IO.
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Au cours du premier semestre 2025, la quasi-totalité de l’encours investi par les particuliers allemands dans des fonds d’actions l’a été dans des ETF. Cette forte croissance consolide le rôle de l’Allemagne en tant que premier marché européen des ETF et accroît la pression sur les marges des gestionnaires de fonds.

L’industrie allemande des fonds a attiré 19,6 milliards d’euros de fonds d’actions au cours des six mois de l’année. Selon l’association professionnelle BVI, 19,3 milliards d’euros ont été investis dans des ETF. En comptant l’ensemble des catégories d’actifs, les actifs investis en ETF et couverts par BVI représentent 423 milliards d’euros. L’association estime toutefois le marché total des ETF allemands à plus de 600 milliards d’euros si l’on tient compte des actifs hors reporting. Cela fait de l’Allemagne le plus grand marché national d’ETF en Europe, loin devant les autres pays.

Rudolf Siebel« Les jeunes ne considèrent pas les ETF comme une alternative mais comme la forme d’investissement par excellence », explique Rudolf Siebel, managing director de BVI, à Investment Officer.

Vigueur du marché de détail

L’Allemagne compte aujourd’hui plus de 30 millions de plans d’épargne, dont un tiers environ est investi dans des ETF. Les dépôts mensuels s’élèvent souvent à plusieurs centaines d’euros, ce qui permet aux investisseurs de construire régulièrement des positions à long terme.

La pandémie de Covid-19 a accéléré cette évolution : les néo-courtiers et les applications de trading gamifiées ont abaissé les barrières à l’entrée et attiré de nouveaux investisseurs vers les ETF en actions mondiales qui répliquent des indices tels que le MSCI World et le S&P 500. Aux quatre coins du pays, les panneaux publicitaires vantant les mérites des ETF pullulent. Le MSCI World est suivi par 21 ETF, selon le portail européen JustETF.

Cet essor s’est fait même sans allègement fiscal. En Allemagne, les plus-values supérieures à 1000 euros par an sont imposées à un taux de 25 %. À cela s’ajoutent une surtaxe de solidarité régionale et, le cas échéant, une taxe ecclésiastique.

BVI est favorable à l’introduction d’un régime fiscal qui permettrait aux investisseurs d’accumuler leur seuil de franchise d’impôt de 1000 euros sur plusieurs années, mais M. Siebel indique qu’une telle réforme n’est pas actuellement à l’ordre du jour.

Pression sur les marges

Pour le secteur, la popularité des ETF est une arme à double tranchant. D’une part, ces produits ont rendu les marchés financiers accessibles à des millions de nouveaux investisseurs. D’autre part, ils renforcent les pressions structurelles sur les marges.

« Les ETF révolutionnent la gestion d’actifs. Ils réduisent les coûts et donnent aux investisseurs une certaine liberté grâce à la négociabilité intrajournalière, explique M. Siebel. Mais ils modifient également la dynamique économique de notre secteur. »

Avec les produits passifs, les frais sont tellement réduits que seuls les plus grands fournisseurs peuvent opérer de manière rentable à grande échelle. Cela oblige les sociétés de gestion à investir massivement dans la technologie, la distribution et la conformité, tout en s’engageant dans une guerre des prix. Les petits acteurs risquent d’être évincés s’ils ne se distinguent pas par des stratégies actives, des solutions alternatives ou des propositions de niche.

Les nouveaux venus sur le marché des ETF sont confrontés aux barrières à l’entrée les plus élevées. Si un ETF ne collecte que 20 millions d’euros, cela suffit à peine à couvrir les coûts des données. « Vous avez besoin de centaines de milliards si vous voulez être compétitif au niveau international », explique M. Siebel.

Le secteur des fonds en mouvement

En Allemagne, comme dans d’autres pays, les investisseurs institutionnels ont adopté les ETF avant les particuliers. BVI estime que les investisseurs institutionnels détiennent environ deux tiers du total des actifs des ETF en Allemagne. Néanmoins, les fonds de pension et les assureurs – qui sont traditionnellement les plus gros investisseurs dans les Spezialfonds allemands à capital variable (la variante allemande des fonds d’investissement alternatifs, forte d’un encours de 2200 milliards d’euros) – continuent de privilégier les mandats actifs et les stratégies à revenu fixe. « Le commerce de détail est maintenant le véritable moteur de la croissance des ventes nettes », selon M. Siebel.

Le total des actifs gérés en Allemagne atteignait 4600 milliards d’euros en milieu d’année, soit près de 1300 milliards d’euros de plus qu’il y a cinq ans. Au premier semestre 2025, les fonds de détail ont attiré 47,8 milliards d’euros de collecte nette. Les fonds obligataires ont dominé le classement des ventes avec 22,7 milliards d’euros, principalement des stratégies d’emprunts à court terme et d’obligations d’entreprises. Les fonds d’actions restent la catégorie la plus importante au sein des fonds de détail, avec 825 milliards d’euros d’actifs, suivis par les fonds mixtes avec 366 milliards d’euros et les fonds d’obligations avec 286 milliards d’euros.

Les fonds à capital fixe, qui constituent un segment restreint du marché en pleine expansion, représentent aujourd’hui 63 milliards d’euros, contre 20 milliards d’euros en 2020. Le capital-investissement est devenu le segment le plus important, représentant près de la moitié des actifs, tandis que l’immobilier n’en représente plus qu’un tiers. Le marché reste fortement institutionnel : les Spezialfonds gèrent 94 % des actifs.

Le contexte européen

L’essor en l’Allemagne s’inscrit dans le cadre d’une croissance européenne plus large. Dans l’ensemble de l’Europe, les ETF pesaient 2100 milliards d’euros à la fin de 2024, avec des entrées nettes record de 269 milliards d’euros cette année-là, selon l’Efama. Le marché est principalement basé sur les Ucits, l’Irlande et le Luxembourg représentant plus de 90 % des actifs domiciliés. Les ETF en actions dominent, avec environ trois quarts des investissements, tandis que ceux en obligations représentent environ un cinquième. Les investisseurs concentrent leurs allocations les plus importantes sur les actions américaines et mondiales à grande capitalisation.

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