La pression reste constante pour que les investisseurs institutionnels s’engagent pour influencer les sociétés à adopter de meilleures pratiques. Euronext a récemment organisé une table ronde afin de montrer l’importance prise par la gouvernance d’entreprise et la responsabilité actionnariale, notamment sous la pression des diverses règlementations mises en place au niveau européen.
Pression règlementaire
Chez Deminor, Charles Dumoulin souligne que les actionnaires institutionnels ont de plus en plus d’obligations dans les interactions qu’ils entretiennent avec les sociétés dont ils détiennent une participation. « Leurs clients s’attendent de plus en plus à ce qu’ils exercent leurs droits, et votent activement lors des décisions qui sont prises aux assemblées générales. Et l’amendement de la directive européenne sur les droits des actionnaires (qui entrera en vigueur d’ici juin 2019) va encore renforcer cette obligation ».
« Les gestionnaires devront être plus transparents quant à la la manière dont elles comptent exercer leurs droits, et ils devront fournir un rapport détaillé à posteriori ». Charles Dumoulin souligne également que de nouvelles initiatives pourraient être prises en vue d’inciter les investisseurs institutionnels à intégrer des considérations soutenables (facteurs ESG) lorsqu’ils sont en contact avec les directions.
Engagement et transparence
Ophélie Mortier souligne pour sa part que ce processus a commencé depuis 2001 chez Degroof Petercam Asset Management. « Depuis 2013, nous avons fixé une politique en matière de vote, et nous avons également mis en place un programme d’engagement sur différents sujet pour les entreprises dont nous sommes actionnaires, en faisant par exemple attention à la protection des actionnaires minoritaires ou à la composition du conseil d’administration ».
Cette procédure qui est désormais systématique pour les entreprises dont les actifs sous gestion dépassent 1 million d’euros et qui représentent plus de 0,5% des encours du fonds. En 2017, DPAM a ainsi voté pour les résolutions de plus de 500 sociétés, sur près de 8.000 questions, avec environ 85% de votes soutenant les mesures déposées. Les différents intervenants soulignent toutefois que la transparence fait aujourd’hui souvent défaut dans la manière dont les votes par procuration (Proxy Voting) sont enregistrés électroniquement. « Il nous est impossible de savoir si nos votes ont été bien enregistrés, ou si nos remarques ont été transmises à la direction des entreprises dans lesquelles nous votons », souligne encore Ophélie Mortier (Degroof Petercam AM).
Engagement et transparence
De son côté, Marco Becht (Solvay Business School of Economics & Management) indique que la période de détention des actifs sur les marchés financiers est devenue de plus en plus courte, ce qui n’incite par certains intervenants à exercer pleinement leur droits. « En outre, il est intéressant de constater que tous les institutionnels ne votent pas de la même manière sur les différents points à l’agenda », et que certains auront tendance à voter à gauche ou à droite selon leurs engagements. Il note également la part grandissante prise par les Hedge Funds, qui sont de plus en plus actifs internationalement (notamment en Asie) pour faire passer certaines résolutions.
Quant à la perspective de voir arriver des actions à double droit de vote en Belgique, les différents intervenants se montrent assez partagés. Deminor et Degroof Petercam AM estiment que ce serait en définitive une mauvaise chose, car l’attractivité du marché s’en trouverait réduite pour les investisseurs institutionnels. Marco Becht souligne pour sa part qu’il existe de nombreux mécanismes en place sur le marché néerlandais visant à protéger les actionnaires de référence. « L’avantage est toutefois d’empêcher plus facilement que les fleurons nationaux ne partent de la cote. Vu l’absence de protection dont bénéficient les entreprises belges à ce niveau là, je suis parfois surpris qu’il y ait encore des sociétés de qualité cotées à Bruxelles ».