Crestbridge gets CSSF depository licence in Luxembourg
CSSF hq.jpg

Les experts juridiques alertent sur l’intensification des efforts des régulateurs pour lutter contre l’écoblanchiment. À la fin de l’année dernière, la première amende a été infligée pour non-respect du règlement européen sur la publication d’informations en matière de durabilité (SFDR).

La société londonienne Aviva Investors (96 milliards de dollars d’actifs sous gestion) a écopé d’une amende de 56 500 euros pour infraction à la législation sur la durabilité, a-t-on appris fin novembre. Selon les experts, les fonds Article 8 font l’objet d’une surveillance renforcée.

Un associé d’un cabinet d’avocats étroitement impliqué dans l’affaire affirme que cette première amende SFDR en Europe « a eu un impact certain ». « Cette action marque le début de la phase de mise en application », déclare Cyril Clugnac, Senior Associate chez Norton Rose Fulbright Luxembourg.

Un fonds obligataire de la sphère émergente dans le viseur

Lors d’une inspection menée l’année dernière, la Commission de surveillance du secteur financier luxembourgeois, la CSSF, a ciblé cinq compartiments d’Aviva classés sous l’Article 8 de la SFDR, qui impose que les fonds promeuvent des caractéristiques environnementales ou sociales. Les conclusions ont révélé que l’Emerging Markets Bond Fund d’Aviva, qui gère plus de 3 milliards de dollars, avait investi 5,5 % de son portefeuille dans des obligations émises par cinq pays ne respectant pas les critères d’exclusion énoncés dans le prospectus.

Par ailleurs, le gendarme financier a épinglé quatre fonds d’actions – dont le Climate Transition Global Equity et le Natural Capital Transition Global Equity d’Aviva - pour alignement insuffisant de leurs investissements sur les Objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies, contrairement à ce qui était allégué dans leurs prospectus.

Mesure correctives

Aviva a depuis lors renforcé ses processus de conformité et modifié les textes de ses prospectus. « La CSSF a confirmé que les mesures correctives prises par la société de gestion […] sont suffisantes pour répondre à ses conclusions », a déclaré un porte-parole d’Aviva.

Cette première amende infligée par le régulateur n’a pas surpris les experts juridiques basés au Luxembourg. La visite du Groupe d’action financière (GAFI) du G7 en 2022 avait souligné la nécessité d’une application plus stricte des règles, non seulement en matière de lutte contre le blanchiment d’argent, mais aussi dans le secteur financier plus largement. « L’objectif est clairement de renforcer la surveillance », a commenté un avocat.

Signal clair

Alors que le secteur exprime depuis longtemps sa frustration face au manque de clarté des définitions de l’Article 8 de la SFDR, l’amende infligée à Aviva lève désormais toute ambiguïté sur ce qui est autorisé ou non. 

Bien que la sanction financière soit modeste, les experts juridiques s’étonnent que ce soit précisément Aviva, basée à Londres et souvent saluée pour ses efforts en matière de durabilité, qui ait été la première « cible ». Selon eux, les normes strictes qu’Aviva s’est imposées pourraient l’avoir rendue plus vulnérable au contrôle. « Lorsque vous établissez des règles que vous n’êtes pas en mesure de respecter, vous êtes plus à risque », commente un gestionnaire de fonds européen.

Renforcement des directives

Dans le cadre de la SFDR, introduite en 2021, les gestionnaires de fonds peuvent définir eux-mêmes les caractéristiques de durabilité qu’ils attribuent à leurs fonds, mais sont tenus de respecter les engagements qu’ils affichent. Les fonds Article 6 n’ont aucune ambition ESG, tandis que les fonds Article 9, souvent qualifiés de vert foncé, sont soumis à des critères plus stricts. Les problèmes surviennent souvent avec les fonds Article 8, qui laissent une certaine marge d’interprétation.

SFDR 2.0 en préparation
Le cadre de la SFDR, pierre angulaire des ambitions européennes en matière de finance durable, devrait faire l’objet d’une refonte majeure afin de clarifier les définitions et les normes de reporting. Une fois adopté, sous la forme d’une SFDR 2.0 (probablement d’ici 2028), ce nouveau cadre pourrait introduire de nouvelles catégories de fonds alignant plus étroitement les allégations de durabilité sur les pratiques d’investissement réelles. 
En attendant, des sanctions comme celle infligée à Aviva visent à apporter davantage de clarté sur le marché. Cyril Clugnac a souligné « une prise de conscience accrue de l’importance des formulations dans les publications SFDR et de l’attention particulière qu’elles requièrent, ce qui pourrait conduire à une réévaluation de certains processus de sélection des investissements. » 
Bien que l’amende infligée à Aviva soit la première au titre de la SFDR, ce n’est pas la première sanction visant un gestionnaire d’actifs européen pour des allégations de durabilité. En 2023, DWS, basée à Francfort, s’était vu infliger une amende de 19 millions de dollars par la Securities and Exchange Commission (SEC) américaine pour allégations ESG trompeuses dans sa communication marketing.

Articles connexes sur Investment Officer :

Author(s)
Access
Members
Article type
Article
FD Article
No