Han Dieperink
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Elle s’est longtemps fait attendre, mais une véritable correction du marché boursier a finalement eu lieu la semaine dernière. Il existe différents types de corrections, et celle-ci semble être une correction de marché haussier, qui se distingue d’une correction de marché baissier par sa moindre profondeur et sa durée plus courte.

Typiquement, une correction de marché haussier est d’environ 10 %. En effet, entre le sommet atteint le 16 juillet et le creux de lundi dernier, le marché a reculé d’environ 10 %. Ce type de correction survient lorsque le sentiment du marché a pris trop d’avance sur les fondamentaux. Fondamentalement, rien n’a changé, mais le marché avait simplement trop anticipé. La correction permet de relâcher brièvement la pression. C’est une pause régénératrice.

Les corrections sont normales en bourse. Elles constituent le prix que tout investisseur doit payer pour le rendement supérieur à long terme des actions. Une correction d’environ 10 % survient presque chaque année. Cette fois, il était plutôt exceptionnel qu’aucune correction notable ne se soit produite depuis le début du rallye de fin d’année en octobre dernier. Cela s’explique principalement par le fait que cette année, les fondamentaux se sont plus fortement améliorés que les prix n’ont augmenté.

Cependant, toutes ces bonnes nouvelles sont extrapolées vers l’avenir et le moindre revers peut suffire à déclencher ce type de correction. L’avantage d’une correction est qu’elle tempère les attentes, augmentant ainsi le potentiel de hausse futur.

Hausse des taux d’intérêt au Japon

Une correction vise également à effrayer les spéculateurs, et cela a particulièrement bien fonctionné cette fois-ci. La Banque centrale du Japon a joué un rôle déterminant en relevant ses taux d’intérêt de 0,1 à 0,25 %. Cette hausse n’était pas dictée par une économie japonaise florissante ou une inflation galopante, mais visait principalement à soutenir le yen japonais.

Alors que le ministère des finances japonais avait échoué avec ses précédents achats de soutien, la Banque du Japon a réussi à provoquer une rapide appréciation du yen. Celle-ci a rendu les emprunts à faible coût en yen beaucoup moins attractifs, signant ainsi la fin des fameux carry trades. Cette situation a contribué à faire grimper l’indice VIX au-dessus des 60 points, ce qui a également contraint à réduire d’autres positions spéculatives. Après tout, rien n’est aussi prévisible que la gestion des risques basée sur la value-at-risk. Une telle correction permet de repartir sur des bases saines.

Points positifs

Les banques centrales n’aiment pas les corrections. Bien que leur rôle ne soit pas de plaire aux actionnaires, elles ont appris depuis la grande crise financière que les corrections peuvent avoir un impact négatif sur la stabilité financière. Avec un niveau d’endettement aussi élevé, cela peut mettre l’économie sous pression. Alors qu’avant cette correction, des doutes subsistaient quant à savoir si et quand la Fed procéderait à sa première baisse des taux d’intérêt, on s’attend désormais à trois hausses de taux cette année, ce qui constitue maintenant le bas de la fourchette des attentes du marché. Cette correction a donc apporté une plus grande certitude quant aux futures baisses de taux, un autre point positif pour la bourse.

Une correction oblige également les entreprises à être encore plus précises dans leurs prévisions pour l’avenir. Celles qui ne sont pas en mesure d’expliquer clairement comment leurs résultats évolueront dans le futur sont en mauvaise posture. Cette fois-ci, les doutes portaient principalement sur la capacité de tous ces investissements massifs dans l’intelligence artificielle à générer les rendements espérés pour l’avenir.

Il est sans doute inévitable que certaines entreprises ne parviennent pas à répondre aux attentes, mais les rapports trimestriels ont également révélé qu’aucune entreprise ne peut se permettre d’ignorer l’intelligence artificielle. Parmi les entreprises technologiques, les surprises positives en matière de croissance émanaient principalement du secteur de l’intelligence artificielle. En outre, pour la première fois depuis longtemps, la croissance des bénéfices s’est également manifestée ce trimestre en dehors du secteur des technologies de l’information, ce qui a contribué à un élargissement du marché.

Pas encore une bulle

Les corrections dans un marché haussier sont normales, mais celui-ci n’est pas un marché haussier ordinaire. Le marché actuel rappelle plutôt celui des années 90, lorsque l’avènement d’internet, notamment, avait stimulé la productivité. Un phénomène similaire s’était déjà produit dans les Années folles, lorsque les avancées de la deuxième révolution industrielle avaient été pleinement exploitées. Ces deux périodes se caractérisaient par des rendements boursiers supérieurs à la moyenne. Cela n’a rien d’étonnant, car une productivité accrue se traduit par une croissance économique plus rapide et une augmentation plus marquée des bénéfices.

En parallèle, cette productivité élevée permet de maintenir l’inflation à un faible niveau, ce qui avait déjà favorisé le précédent atterrissage en douceur en 1995. À l’époque, les taux d’intérêt étaient ensuite restés élevés plus longtemps, mais les deux corrections provoquées par la crise asiatique et la crise de LTCM avaient apporté davantage de liquidité, or c’est bien celle-ci qui alimente le marché boursier. Cette même liquidité devrait s’améliorer dès le mois prochain avec le début des baisses de taux d’intérêt aux États-Unis.

Ainsi, la correction a eu l’effet particulier d’apporter plus de clarté sur les évolutions fondamentales en matière de liquidité et de croissance économique. De plus, l’euphorie qui régnait auparavant s’est atténuée. Par ailleurs, une correction rend les actions plus abordables, bien que cet effet soit modéré par le redressement rapide des marchés.

À court terme, la valorisation influence peu les cours, alors qu’à long terme, son impact devient nettement plus significatif. De plus, même les valorisations des Sept Magnifiques n’ont pas encore atteint un niveau de bulle spéculative, c’est-à-dire un niveau où les valorisations ne peuvent plus être justifiées de manière rationnelle. Rapporté aux prévisions de croissance pour les années à venir, le ratio PEG est même inférieur de 40 % à la moyenne du marché. Tous les signaux annonciateurs d’une potentielle formation de bulle (changement de paradigme, promesses dans un avenir lointain, élargissement du thème d’investissement et liquidité accrue) sont désormais au vert.

Han Dieperink est directeur de la stratégie d’investissement chez Auréus Vermogensbeheer. Il a auparavant été directeur des investissements chez Rabobank et Schretlen & Co.

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