LE CFA Institute constate un intérêt grandissant pour sa formation ESG. Richard Fernand, responsable des certificats de l’institut de formation pour les professionnels de la finance, confie à Investment Officer que ce sont surtout les non-titulaires d’une charte CFA qui suivent les formations en vue d’obtenir un certificat ESG et risques climatiques, évaluation et investissement.
« Lorsque nous avons commencé en 2019, nous avions environ 2 000 inscriptions. Aujourd’hui, plus de 40 000 personnes ont suivi la formation. C’est en Europe et en Asie du Sud-Est que l’intérêt est le plus marqué », déclare Richard Fernand. « Mais ce qui est le plus surprenant, c’est qu’il s’agit principalement de nouveaux étudiants : 85 % des personnes inscrites suivent une formation chez nous pour la première fois et n’ont donc pas obtenu la charte CFA. Cela montre un grand intérêt pour le marché. Il est également frappant de constater que plus de la moitié des inscrits sont des femmes. »
« Pourtant, notre focalisation sur l’ESG n’a rien de nouveau », poursuit Richard Fernand. « Cela fait plus de 20 ans que le programme CFA met explicitement l’accent sur la gouvernance. Mais le certificat ESG Investing approfondit les trois composantes de l’ESG. La réglementation européenne sur la divulgation joue un rôle important à cet égard, et fait bouger les lignes : certaines de ces idées et de ces philosophies sont adoptées dans le monde entier. Je pense que nous cheminons assez rapidement vers une sorte de norme mondiale. »
L’évolution continue des formations
L’offre de formations du CFA a évolué ces dernières années et continuera à le faire. Le responsable de la formation voit de nouvelles opportunités de formation, « par exemple, dans un chevauchement évident entre les investissements climatiques et le capital-investissement. Avec ce type de formations spécifiques, nous approfondissons le sujet. »
Le CFA Institute s’appuie sur des spécialistes pour élaborer le contenu de la formation et fait appel à des experts externes qui peuvent fournir des informations sur les pratiques du marché. « Nous essayons également de faire des analyses pour voir où doit aller le secteur à court et à moyen terme. »
« En fin de compte, la question que les gestionnaires d’actifs doivent se poser est la suivante : les entreprises sont-elles parées pour faire face à une nouvelle réalité ? » s’interroge Richard Fernand. « Cette nouvelle réalité implique des réglementations plus strictes, mais aussi de nouveaux coûts et risques. Que faire d’une entreprise qui a besoin d’eau de refroidissement ? On peut dire que l’ESG est devenu un terme politiquement chargé aux États-Unis, cela ne signifie pas encore pour autant qu’un gestionnaire d’actifs ne tienne pas compte de la rareté de l’eau en Californie. À cet égard, je ne pense pas que la profession d’analyste change beaucoup. Ces derniers doivent considérer de manière critique le réalisme de la stratégie d’une entreprise. Ils ont toujours eu ce regard critique sur la stratégie, mais maintenant une couche vient s’y ajouter : un plan de transition. Ce n’est donc pas vraiment une approche totalement nouvelle, mais plutôt une extension. »
Richard Fernand s’attend à ce que toute « société de gestion de fonds bien-pensante » ait conscience que la transition vers une économie à faible émission de carbone ne peut pas être arrêtée. « Là où il peut y avoir des divergences d’opinions, c’est sur la vitesse à laquelle cette transition se fera. Cette considération implique naturellement des stratégies d’investissement différentes. Certains secteurs, comme l’industrie du charbon, vont sans doute totalement disparaître. Avec un grand nombre d’actifs échoués à la clé. Et là également, la question se pose : peut-on reconvertir une mine en surface, par exemple ? Et la maintenir ainsi plus ou moins rentable ? Ce sont des questions que nous abordons dans notre formation. »
Quasi impossible
Nadia de Coninck, CFO chez I4B, un investisseur privé dans l’infrastructure belge, a récemment obtenu le certificat ESG. « J’ai obtenu la charte CFA il y a plus de 15 ans », explique-t-elle. « Mais l’ESG est devenu un élément tellement important de l’analyse des risques qu’il est devenu pour moi nécessaire de l’approfondir. Lorsque le CFA Institute a proposé un certificat ESG en 2021, je me suis immédiatement inscrite à la formation. »
Selon Nadia de Coninck, il est pratiquement impossible aujourd’hui de prendre une décision d’investissement sans que les facteurs ESG ne constituent un élément essentiel de l’analyse des risques. « Le changement climatique est une réalité. Il faut en tenir compte. Si vos travaux d’infrastructure ne tiennent pas compte des risques climatiques, de la biodiversité et de la pollution, vous n’obtiendrez plus de permis. La double matérialité est donc devenue une donnée de base de l’analyse des risques. La formation du CFA m’a donné une bonne base. Elle m’a aidé à intégrer les facteurs ESG dans notre due diligence et notre gestion d’actifs, en plus des réglementations. »
Nadia de Coninck donne l’exemple d’un tronçon du ring de Gand, où I4B est intervenu comme actionnaire principal dans le cadre d’un PPP. « L’impact social et les bénéfices environnementaux de ce projet sont significatifs : en nous concentrant sur la mobilité verte, nous réduisons les embouteillages et les émissions de CO2. Les 22 kilomètres de pistes cyclables interconnectées favorisent des déplacements domicile-travail respectueux de l’environnement. Les études mettent en évidence une amélioration remarquable de la sécurité future des usagers faibles (piétons, cyclistes, etc.) une fois ce projet achevé. »
Elle décrit comment la réduction du bruit par l’installation de barrières antibruit et l’utilisation d’asphalte antibruit illustrent l’importance accordée à l’amélioration du bien-être de la communauté locale. « Le projet tient également compte de la biodiversité. D’une part en créant des écoducs, qui permettent aux animaux de traverser en toute sécurité. D’autre part, de vastes zones sont également (re)boisées, avec davantage d’arbres qu’à l’origine. L’ESG est un élément supplémentaire dans l’analyse des risques et il garantit une estimation correcte du rendement ajusté au risque d’un projet. »