Yaday’s Pauline Bovyn and Stonehage Fleming's Raphael Eder (right) on stage at the LPEA Insights conference. Photo: IO.
Yaday’s Pauline Bovyn and Stonehage Fleming's Raphael Eder (right) on stage at the LPEA Insights conference. Photo: IO.

Malgré les années difficiles qu’ont connues les marchés privés récemment , les family offices constatent un intérêt croissant pour le capital-investissement et le capital-risque, en particulier parmi la jeune génération.

La nouvelle génération s’intéresse au capital-investissement ? « Oui, absolument », répond à Investment Officer Raphael Eber, associé et CEO pour l’Europe continentale chez Stonehage Fleming, qui s’exprimait lors de la conférence annuelle Insights de la Luxembourg Private Equity & Venture Capital Association, organisée à Kirchberg la semaine dernière. Stonehage Fleming, un multi-family office mondial, a été racheté en septembre par Corient, qui est désormais le plus grand gestionnaire d’actifs au monde pour les clients (ultra)fortunés.

« Le placement en capital-investissement donne à la nouvelle génération un objectif à atteindre », explique M. Eber. « La part du capital-investissement passe de 5 à 20 %. Cela signifie que des milliards vont affluer sur les marchés du capital-investissement dans les années à venir. L’intérêt est clairement présent. »

Les chiffres du World Wealth Report annuel de Capgemini confirment l’évaluation optimiste de M. Eber. En Europe, l’allocation des clients fortunés aux investissements alternatifs est passée de 13 % en 2024 à 15 % en 2025. Pas moins de 88 % des chargés de clientèle interrogés ont indiqué que les jeunes clients fortunés sont plus intéressés par les investissements alternatifs que les baby-boomers. Parmi la nouvelle génération de clients fortunés au Luxembourg, le capital-investissement et la dette privée sont les classes d’actifs alternatifs les plus populaires.

Vision à long terme

Jean-Daniel Zandona, directeur commercial de la société luxembourgeoise de gestion d’actifs Arendt Investor Services, constate également un intérêt considérable pour les actifs privés chez les familles fortunées. Selon lui, celles-ci investissent souvent jusqu’à 40 % de leurs actifs sur les marchés privés. « Elles investissent plus que la moyenne dans l’économie réelle, déclare-t-il. De nombreuses familles ont bâti leur fortune de cette manière, ce qui explique une affinité naturelle pour ce type d’investissement. »

Malgré les risques tels que les tensions géopolitiques et l’instabilité politique, les family offices restent des investisseurs stables, selon l’étude Family Office Investment Insights de Goldman Sachs, publiée en septembre. L’allocation moyenne aux investissements alternatifs a légèrement diminué, passant de 44 % en 2023 à 42 % en 2025. En ce qui concerne le capital-investissement, il est passé de 26 % en 2023 à 21 % en 2025. Pourtant, 39 % des family offices prévoient d’augmenter leur part de capital-investissement au cours des 12 prochains mois, tandis que 46 % ne prévoient aucun changement. Seuls 15 % d’entre eux déclarent vouloir réduire leur exposition.

Les family offices disposent de beaucoup de « capital patient » et d’une vision à long terme, ce qui correspond bien aux investissements en capital-investissement. Selon M. Eber, ils raisonnent en décennies, et non en années. « Notre devise est la suivante : nous ne voulons pas rendre riches nos clients mais nous voulons qu’ils restent riches. C’est une grande différence. »

Le capital-risque repose sur les familles

Les family offices peuvent déployer des capitaux par le biais de fonds de capital-investissement, ainsi que par des investissements directs ou des co-investissements. Au sein de son single-family office destiné à la famille Afflelou, Yaday a développé une pratique de capital-risque qui a financé plus de 140 start-ups et 17 fonds en dix ans. En juin, Yaday a annoncé le lancement d’un fonds de 100 millions d’euros destiné aux jeunes entreprises technologiques. Le Yaday Club réunit également des business angels et d’autres family offices afin de mettre en commun leur expertise et d’investir ensemble.

Pauline Bovyn, cofondatrice de l’entreprise, cite comme l’un des plus grands défis la constitution d’une solide réserve de nouveaux contrats. « Il s’agit d’un processus à long terme qu’il faut laisser se développer de manière organique. Vous devez vraiment être présent sur le marché », dit-elle.

Il est également essentiel de constituer une équipe pluridisciplinaire et d’attirer les bons talents. « Un family office n’est pas comparable à un grand fonds de capital-risque, explique Mme Bovyn. Vous avez besoin de personnes aux compétences complémentaires et aux perspectives géographiques ou sectorielles différentes », complète Aurélie Jean, spécialiste des sciences informatiques, qui aide la société à regarder « sous le capot » des entreprises et à mieux évaluer leur potentiel de croissance.

Il est important d’avoir des attentes réalistes quant aux performances et à la liquidité des investissements en capital-risque, souligne Mme Bovyn. « Le capital-risque est par définition une classe d’actifs risquée », affirme-t-elle. « L’on doit faire preuve d’humilité et de transparence à l’égard de ses co-investisseurs ou de ses commanditaires et de tout son écosystème. C’est une approche sur-mesure : savoir comment soutenir au mieux les entrepreneurs dans lesquels on investit, et quel est le bon moment pour se retirer. Cela nécessite une participation active et concrète si l’on veut obtenir de bons résultats. »

L’une des leçons à tirer pour Yaday est l’importance de prévoir suffisamment de marge pour participer à plusieurs levées de fonds de start-ups. « Pour un single-family office, il est crucial de disposer de liquidités, déclare Mme Bovyn. Non seulement pour investir davantage dans les meilleures entreprises, mais aussi parce qu’il existe des micro-cycles. Il faut être résilient pour pouvoir saisir la bonne opportunité au bon moment – et être suffisamment patient pour attendre. »

Author(s)
Categories
Access
Members
Article type
Article
FD Article
No